Une salle de shoot devrait ouvrir en 2020 dans le quartier de la Conception à Marseille. Cette annonce suscite depuis quelques jours de nombreuses réactions sur internet et les réseaux sociaux.
Jean-Claude Gaudin, maire de Marseille, a toujours dit que « si un tel lieu devait être créé, ça ne pouvait être qu’à l’intérieur de l’hôpital et sous le contrôle des médecins ». Il a chargé le Docteur Patrick Padovani, adjoint au maire délégué à l’hygiène et à la santé, « de poursuivre le dialogue avec les partenaires concernés ».
En 2013, la Ville de Marseille envisageait déjà d’avoir une salle de shoot, avant d’y renoncer. Il y a quelques jours, le journal La Provence relayait l’information selon laquelle une salle de consommation à moindre risque, communément appelée « salle de shoot », devrait voir le jour à Marseille dans un bâtiment attenant à l’hôpital de la Conception dans le courant de l’année 2020. Jusqu’à hier, il ne manquait plus que la validation définitive du ministère de la Santé et la salle aurait sans doute pu voir le jour. Mais, c’était sans compter sur l’opposition des habitants du quartier et celle de certains élus locaux, qui ont, principalement fait part de leurs inquiétudes. Certains se sont d’ailleurs mobilisés contre l’emplacement choisi pour l’implantation du lieu.
Des élus s’opposent au projet, les habitants lancent une pétition
Martine Vassal, présidente du Conseil départemental et de la Métropole se positionne résolument contre l’ouverture d’une salle de shoot. Elle n’est pas la seule puisque Bruno Gilles, sénateur LR en lice pour la mairie de Marseille, est lui clairement opposé au projet. Il déclarait d’ailleurs dans un tweet, qu’après avoir consulté des riverains et commerçants du quartier toute la journée en compagnie du docteur Patrick Padovani et de la maire Marine Pustorino, il a constaté « un défaut d’information des habitants et un manque de recul sur le procédé », demandant ainsi « le retrait immédiat du projet de salle de shoot ».
Je suis opposée à l’ouverture programmée d’une salle de shoot subventionnée, à deux pas de l’Hôpital de la Conception et du centre-ville.https://t.co/lQBJwZ08co
— Martine VASSAL (@MartineVassal) June 5, 2019
Du côté des habitants, la gronde est de mise. Ils sont inquiets de voir apparaître cette salle dans leur quartier, en plein centre-ville, à deux pas du parc où ils amènent leurs enfants. Selon le journal 20 Minutes, Jenny, une habitante très impliquée dans la vie du quartier est scandalisée par ce projet. Elle aurait donc décidé de lancer une pétition qui sera en ligne lundi pour faire annuler son ouverture.
Une installation nécessaire en centre-ville
Au lendemain des révélations de La Provence, l’adjoint à la santé à la mairie de Marseille, Patrick Padovani, est revenu sur le projet. Même si la Ville de Marseille semble favorable à une implantation dans le centre de Marseille pour le rendre accessible en transport en commun, le Dr Padovani se dit prêt à prendre en compte les avis de tous sur l’emplacement de la salle. Il explique qu’il est possible de « trouver un autre lieu » et rappelle que le maire a donné son accord : « Une parole a été donnée. Le dossier suit désormais son cours au ministère de la Santé avant l’ouverture de la salle en 2020 ».
Ces salles permettent aux toxicomanes de consommer leur drogue dans de bonnes conditions sanitaires. Pour le Dr Patrick Padovani « il ne s’agit pas de rentrer faire un geste et de repartir. Il y a tout un accompagnement médical et social », avant d’ajouter que tous les jours de 13h à 21h « deux infirmiers seront présents sur place, un médecin à plein temps, des psychologues, un psychiatre et cinq travailleurs sociaux » pour un nombre d’injecteurs estimé à 1 200 à Marseille. C’est l’association Asud Mars Say Yeah, présidée par le docteur Béatrice Stambul, qui se chargera du bon fonctionnement de cette future salle.
Dans un communiqué de presse, la députée LREM, Cathy Racon-Bouzon, elle, indique que le projet « est toujours au stade de la réflexion » et qu’il n’a « reçu » pour le moment, « aucune pré-validation des servies de l’État ». En effet, la faisabilité du projet doit d’abord être étudier par un comité de pilotage et validé par le ministère de la Santé, si et seulement si « les critères exigés sont remplis d’après un cahier des charges très précis ».
Une phase d’expérimentation indispensable
La députée se dit, quant à elle, favorable à « toutes les expérimentations qui vont dans le sens de l’encadrement sanitaire des personnes toxicomanes ». Une enveloppe de l’Etat d’un million d’euros a même été débloqué pour la phase d’expérimentation, en attendant des financements plus importants.
Pour taire les inquiétudes, elle ajoute qu’elle s’assurera personnellement « que le projet remplisse tous les critères définis par le Ministère » et qu’il ne « présente pas des conséquences néfastes sur l’environnement proche ». Elle prend pour exemple les expérimentations menées à Paris et Strasbourg avant d’affirmer que cette implantation qui n’est pour l’instant qu’au stade de « projet à l’étude », ne nécessite aucune « opposition de principe ».
A Paris et à Strasbourg, les salles de shoot auraient permis de réduire les injections de drogue et de limiter certains dangers. Selon la Mairie de Paris, depuis l’ouverture en 2017 d’une salle près de la gare du Nord (10e arr.), le bilan global est positif, avec 165 passages par jour en moyenne. Un deuxième dispositif a été inauguré à Strasbourg peu après, même constat : un bilan « exemplaire » selon les responsables de cette salle, et la vie du quartier n’a pas été si bousculée.