En 2021, Quentin Bichi n’a que 25 ans mais déjà l’envie d’entreprendre. Après avoir été confronté au casse-tête de trouver un stage ou une alternance, le jeune Marseillais décide avec son frère Arnaud de fonder la start-up Linkpick.
Linkpick est une plateforme qui aide les étudiants à se connecter avec les écoles et les entreprises, dans tous les secteurs d’activité, et qui facilite la gestion administrative pour les structures partenaires. Quatre ans après son lancement, le succès est au rendez-vous. La plateforme a déjà permis à près de 20 000 jeunes d’entrer dans le monde du travail.
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Est-ce difficile aujourd’hui pour un jeune en formation de s’insérer dans le monde du travail ?
Oui, on constate que les jeunes ont de plus en plus de difficultés à décrocher des stages et des alternances. La situation s’est encore aggravée cette année. L’alternance représentait environ un million de contrats en 2024. On devrait péniblement atteindre les 800 000 en 2025, alors qu’il y a environ 3 millions de demandeurs. Ça laisse l’opportunité à moins d’un jeune sur trois de pouvoir se former.
Recruter un jeune en alternance coûte-t-il trop cher ?
Pas forcément. La plupart des entreprises bénéficient d’avantages fiscaux et sociaux importants pour encourager le recours à l’alternance. C’est aussi un levier intéressant pour former des collaborateurs à moindre coût. Un contrat en CDD ou CDI qui n’est pas concluant peut entraîner 30 à 100 000 euros de pertes. Il vaut mieux s’engager avec un stagiaire ou un alternant que l’on va pouvoir accompagner, en misant sur le fait qu’il sera complètement opérationnel au bout de 12 mois et deviendra une véritable valeur ajoutée pour l’entreprise.
Qu’est-ce que Linkpick propose de plus que les autres ?
On a aujourd’hui près de 2 000 plateformes en France pour rechercher un stage ou une alternance. On a accès à tellement d’informations qu’on ne sait plus où la chercher. Linkpick simplifie la vie des étudiants en leur permettant de trouver à la fois leur école et une entreprise, depuis l’entrée au lycée jusqu’au Bac+5, dans tous les domaines d’activité. Mais la mise en relation, ce n’est en réalité que 20% du processus du recrutement. Il faut aussi savoir rédiger une fiche de poste, un contrat, le gérer administrativement… Avec Linkpick, on centralise la totalité des fonctionnalités à la fois pour les écoles, les jeunes et les entreprises. C’est quelque chose qui ne se fait nulle part ailleurs. On se distingue également par nos prix accessibles pour la mise en avant des offres d’emploi. On peut même dire qu’on a “cassé le marché” en termes de pricing.
Comment peut-on s’inscrire ?
C’est gratuit pour les étudiants. Mais quand ils s’inscrivent, on s’assure de la cohérence de leur profil digitalisé. Si celui-ci n’est pas complété, on ne le référence pas car la personne n’est pas dans la capacité de postuler à une offre d’emploi. Quant aux écoles et aux entreprises, à qui on propose des abonnements sur mesure, on vérifie aussi les informations renseignées pour chacune des structures. Notre priorité, ce n’est pas de faire du volume, c’est de garantir la qualité pour les 150 000 étudiants, 4 500 entreprises et 250 écoles, comme Aix Marseille Université, qui nous ont déjà rejoints.
Vous avez également lancé un dispositif nommé Linkpick Impact. De quoi s’agit-il ?
Avec Linkpick Impact, on se bat pour une éducation de qualité pour tous. Il y a des mécènes qui travaillent à nos côtés, comme France Travail, Veolia et le Crédit Agricole Alpes Provence. Dans la Région Sud, ce dispositif accompagne et parraine des établissements qui vont aider des jeunes en décrochage à se réinsérer et se réorienter professionnellement. Et pas uniquement dans les quartiers prioritaires de la ville ou dans les zones rurales. Je pense que tous ensemble on peut réussir à terme à faire un million, deux millions, voire trois millions de contrats d’apprentissage chaque année. Mais ça passera peut-être par un allègement des cotisations pour ces entreprises qui font l’effort d’accompagner la jeunesse.
Cette jeunesse révolutionnera-t-elle le monde de l’entreprise ?
Bientôt, sur le marché du travail, nous allons avoir plus de personnes issues de la Génération Z (nées entre 1997 et 2012) que de baby boomers (nées entre 1946 et 1964). On va sans doute assister à un bouleversement existentiel et social, avec cette Génération Z qui a des attentes très importantes en termes d’engagement social, sociétal et écologique et les chefs d’entreprise qui ont parfois plus de 60 ans et qui ont d’autres préoccupations en tête. Il y a aussi l’intelligence artificielle et la robotisation qui vont bousculer les choses. Mais je ne crois pas que les métiers vont se perdre, ils vont surtout se transformer. Il ne faut pas avoir peur, les entreprises vont continuer à avoir besoin de main d’œuvre.
Quelle est ton ambition pour ces prochaines années ?
On est né à Marseille mais on s’est étendu dans les Bouches-du-Rhône, puis la région Sud et le territoire national. L’objectif désormais, c’est de pouvoir accompagner un million d’étudiants et référencer plus de 5 000 établissements de formation et 50 000 entreprises chaque année à partir de 2027. On va aussi travailler à améliorer la plateforme, notamment avec ce qu’on appelle le “matching affinitaire” dans le domaine de l’IA. Cela va nous permettre de proposer une orientation encore plus pertinente, au plus près des aspirations des jeunes en formation.
Quels conseils donnerais-tu à un jeune qui veut se lancer comme toi dans l’entrepreneuriat ?
En France, ce n’est pas facile de trouver de l’investissement privé, contrairement à certains pays anglo-saxons. En revanche, il y a une facilité à trouver des financements publics. Avec mon frère, quand on s’est lancé, on a eu la chance de pouvoir bénéficier de la bourse French Tech et on a participé à des concours pour décrocher d’autres aides financières. Au fur et à mesure, on a réussi à lever 100 000 euros. Il faut évidemment beaucoup travailler mais c’est un objectif qui est réalisable. L’essentiel, c’est d’être méthodologique, rigoureux et résilient. Si on y croit, il n’y a pas de raison que ça ne marche pas.
 
 
				 
