La compagnie maritime coopérative Windcoop lance la production de son premier cargo à voiles. Avec ses 91 mètres, il doit pouvoir transporter 210 conteneurs, et assurer la ligne Marseille-Madagascar à partir de 2027.
Cette fois-ci, c’est parti ! Le pari fou va se concrétiser. Après quatre ans de travail et de levées de fonds, la coopérative française Windcoop a passé commande au chantier naval turc RMK Marine. Ce dernier lance la construction d’un porte-conteneurs propulsé à la voile qui transportera des marchandises entre Marseille et Madagascar de manière décarbonée.
Un trois-mâts du futur, estimé à 28,5 millions d’euros. Ce navire innovant mesurera 91 mètres et déploiera 1050 m² de voiles rigides, des « ailes », qui atteindront 62 mètres de haut.
Il devrait se jeter à l’eau d’ici 2027, à Marseille, pour effectuer ses premières liaisons jusqu’à Madagascar, à près de 10 000 kilomètres, au large des côtes africaines, dans l’océan Indien.
Épices, cacao, vanilles, café, textiles… Il pourra charger jusqu’à 210 conteneurs de 20 pieds (EVP), soit environ 2 500 tonnes de marchandises. Et réduire de 65% environ les émissions de CO2 comparé au transport classique (jusqu’à 90% selon le vent).
Anticiper la décarbonation du transport maritime
Il pourra également transporter une dizaine de passagers désireux de voyager à faible impact. Mais ils devront être patients. Le trajet devrait avoisiner un mois, avec une vitesse d’environ 8 nœuds (15 km/h), soit trois fois moins rapide que les navires à moteur, plus proche des 25 nœuds (45 km/h).
La voile reste une solution plus lente et un peu plus chère que les cargos au fioul pour acheminer des marchandises. Mais le projet de Windcoop anticipe la règlementation qui évolue rapidement pour décarboner le transport maritime, responsable de 3% des émissions mondiales.
Le 11 avril, l’Organisation maritime internationale (OMI) a en effet approuvé la réglementation « zéro émission nette », avec un objectif de neutralité carbone à horizon 2050. D’ores et déjà, l’OMI prévoit une réduction de 20 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030 par rapport à 2008 et de 70 % au moins en 2040, ou 80 % si possible.
« L’industrie du shipping va devoir opérer une transition, ils n’ont pas le choix. Si on veut décarboner efficacement la propulsion d’un bateau, à court terme, le vent c’est la seule chose qui le permet de manière très concrète et finalement assez simple », témoigne Nils Joyeux, président de Zéphyr & Borée, société pionnière dans les cargos à voile.
La voile revient à la mode dans la marine marchande
Avec sa compagnie maritime, il fait partie des fondateurs de la société coopérative d’intérêt collectif (Scic) Windcoop. Il a lancé cette aventure avec Matthieu Brunet, président de la marque d’épices Arcadie, désireux de réduire son impact, et Julien Noé, président d’Enercoop, qui développe des projets coopératifs et citoyens d’énergie, de mobilité et de téléphonie.
Car, en plus de mettre l’accent sur sa démarche écologique, la compagnie maritime coopérative met aussi en avant son éthique sociale et financière.
Mais elle est loin d’être la seule à se lancer dans l’aventure de la marine marchande propulsée au vent. On pense évidemment aux bretons chocolatiers de Grain de Sail, et leur voilier cargo qui relie l’Europe et l’Amérique. Ou plus récemment, à Marseille, l’équipe de Bourlingue & Pacotille, qui a créé un réseau de producteurs bio en Méditerranée et ramène leurs produits en voilier. Le transport à la voile semble bien avoir le vent en poupe.