Il y a un mois, Made in Marseille vous montrait un aperçu de la future rocade L2. Outre le processus de construction titanesque, le projet se démarque par son volet artistique. La Société de la Rocade L2 et l’association Planète Émergences ont invité des artistes d’horizons divers à peindre les différentes entrées et sorties de la nouvelle autoroute. Au programme, mélange des styles pour un art urbain toujours plus ouvert.
Jace – demi échangeur de Saint-Julien
Graffeur réunionnais d’origine havraise, Jace est le créateur des Gouzous. Ces petits bonshommes sans visage ornent les rues du monde entier. Jace est habitué des commandes institutionnelles, mais il tient à rester fidèle au côté anonyme du street art : “Je vis entre deux espaces de création, la légalité et le clandestin”.
Son oeuvre est la plus grande fresque d’Europe réalisée par un artiste seul. Le spectateur a l’impression d’être immergé dans un immense aquarium. Il est bien sûr fait référence à l’omniprésente Méditerranée mais également aux grands bassins de la Société des eaux de Marseille métropole (SEMM), situés à proximité.
Dire – sortie la Parette sud
Né dans le Val-de-Marne, à Créteil, Dire a grandi à Aix. Son oeuvre est une déclaration d’amour et un hommage à son équipe, le Crew 132, qui vient de fêter ses vingt ans. Ce sont d’ailleurs ses membres qui ont réalisé la fresque avec et sous la supervision de Dire. Pour marquer le coup, des caractères monumentaux : “132” et “CXXXII” ainsi que les portraits des membres du crew. Les fourmis géantes pour symboliser les automobilistes qui grouillent et s’entassent sur la future rocade. Un portrait de femme pour illustrer la côté féminin de son travail.
L’Outsider – échangeur des Faïenciers
“Le but est de redécouvrir un espace à travers une peinture. Par un principe d’anamorphose, agrandir les murs en n’en formant plus q’un.” Yann Le Berre alias L’Outsider a choisi les rapports géométriques et les couleurs vives pour illustrer son propos. Il a également laissé une place prépondérante au béton : “J’ai choisi d’intégrer le béton à la fresque comme élément esthétique. C’est une matériel froid, mais charmant.”.
YZ & Maksim – demi échangeur des Caillols
YZ (prononcé eyes comme les yeux en anglais) alias Yseult débute à peine son oeuvre. L’artiste veut illustrer le temps qui passe, la vie et la mort. Aux côtés de personnages angéliques, elle compte inscrire une citation de Léonard de Vinci : “comme une journée bien remplie nous donne un bon sommeil, une vie bien vécue nous mène à une mort paisible.”
Les PM et Lartmada – sortie Faïenciers sud
PM est un des crews emblématiques du graffiti marseillais. Lartmada, qui compte des PM dans ses rangs, est un collectif issu de l’univers du graffiti. A mettre au crédit de Lartmada, la réhabilitation de la rue Pastoret, au cours Julien et nombres d’autres œuvres d’envergure. Le collectif organise aussi des ateliers graffiti pour les jeunes des quartiers populaires (Noailles, Campagne Lévêque…).
Les artistes ont voulu mettre en avant l’héritage grec de la cité phocéenne, mais aussi son futur avec le thème galactique. C’est l’oeuvre qui comporte le plus de lettrages, comme s’en réjouit Rish alias Xavier : “Ce qui nous a plus c’est qu’on nous appelle pour du graffiti et non pour une fresque. On peut montrer des lettrages qu’on peut faire quand on a le temps de les faire.” En effet, ces grandes signatures sont souvent exécutées dans la précipitation au bord des autoroutes. De l’aveu même des artistes, les écritures sont difficilement déchiffrables mais l’intérêt est ailleurs. Il est ici question de véritable calligraphie contemporaine.
Noyps & Veter – entrée La Parette
Originaires des quartiers Nord, ils ont commencé comme beaucoup à pratiquer leur art dans l’illégalité. Même s’ils ne renient pas cet aspect, les deux potes ont d’autres cordes à leur arc. Ils ont notamment réalisé une fresque de 500 m2 au centre d’entraînement de l’OM, la Commanderie.
Chaque artiste a choisi un mur. Ils ont tous les deux joué sur la proximité avec le cimetière Saint Pierre. Noyps a peint un gorille qui perd sa peau au fur et à mesure, jusqu’à la disparition, pour illustrer notre déliquescence commune. Veter, au style grandement inspiré par le tatouage, a lui choisi la voie de la célébration de l’au-delà : la fête des morts. Il a utilisé des objets forts du tatouage, tel que le crâne mexicain.
Moscato – poste d’électricité à forte tension d’Air Bel
Originaire de Marseille, Stéphane Moscato vient du pochoir et la ville lui fournit ses motifs d’inspiration. Avant de peindre, il a organisé un atelier avec des jeunes d’Air Bel, âgés de 6 à 16 ans. Pour ouvrir leurs esprits à l’art mais aussi pour présenter sa démarche au quartier.
Son oeuvre met en scène Varian Fry, un journaliste américain qui a aidé de nombreux artistes et intellectuels persécutés à fuir l’Europe au début des années 1940. Moscato représente un Fry imaginé en colosse à tête de lion. Sur une autre façade, il peint un portrait réaliste et reprend les derniers mots d’une lettre du journaliste, qui comprennent sa signature. Un graffiti d’époque, en somme : “l’écriture a été faite pour les minots, pour qu’ils puissent se renseigner sur le personnage”.
Seth – échangeur de Frais-Vallon
Seth alias Julien Malland est parisien, personne n’est parfait ! Il se fait un nom dans le XXe arrondissement de la capitale grâce à ses personnages. Après des études à l’École nationale des arts décoratifs, il parcourt le monde à partir de 2003 à la rencontre d’artistes de culture urbaine.
Il vient à peine de commencer son oeuvre. Il s’inspire de la proximité avec l’école de Frais-Vallon : des enfants sont en marche, tels des ombres. Vers où ? La sortie. L’artiste reprend à son compte et change le sens de la sortie d’autoroute. Il décrit l’idée de mouvement.