La Ville de Marseille compte sur une modification du Plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi) pour corriger une situation caractérisée par un fort déficit en logement (très) social, notamment dans le centre-ville de la cité phocéenne.
« Nous avons un véritable plan de relance des logements sociaux à engager à Marseille ». Patrick Amico pèse ses mots. Égrenant quelques chiffres clés, l’adjoint en charge de la politique du logement et de la lutte contre lʼhabitat indigne dépeint une situation toujours à flux tendu dans la cité phocéenne.
« À Marseille, 40 000 demandes de logements sociaux sont non-satisfaites, sans compter 40 000 logements indignes [en 2015, le rapport Nicol a donné des premières estimations comptant 40 000 logements indignes à Marseille, soit une part de 9,5% en France, ndlr] qui entraînent des problématiques de relogement ».
2 500 logements par an
La Ville ne possède que peu de marges de manœuvre, la Métropole étant compétente en matière de politique locale de l’habitat. Avec cette modification du Plan local d’urbanisme intercommunal, la municipalité marseillaise veut faire bouger les lignes sur la question du logement social. « L’État nous a demandé de produire 2 500 logements par an dans les trois ans à venir. En 2020, il y a eu 620 agréments de logements sociaux », avance Patrick Amico.
Le PLUi impose des servitudes de mixité sociale à partir de 80 logements. « C’est extrêmement élevé dans une ville où une bonne partie du territoire ne permet pas la construction de logements sociaux, comme dans les quartiers de la politique de la ville (QPV). Il y a un besoin, mais le règlement est tel que les dérogations ne sont pas attribuées pour ces réalisations ».
30% de logements sociaux dans toute opération de moins de 30 logements
Ainsi, l’une des mesures phares est l’abaissement du seuil « à 30 logements par opération (contre 80 actuellement) et 2 000 m2 de surface de plancher ». Sur cette base, toute opération devra comprendre « 30% de logements sociaux par opération, avec un taux de PLAI (logement très social) d’au minimum 25%, car c’est le taux auquel nous devons arriver en 2025, et nous en sommes très très loin aujourd’hui ».
En l’absence d’un PLH métropolitain (programme local de l’habitat) l’abaissement du seuil vise d’autres objectifs. C’est une manière de retrouver un équilibre dans la production de logement social sur le territoire car, selon Patrick Amico, la précédente majorité « a produit énormément de PLS (prêt locatif social) ces dernières d’années, créant un déséquilibre flagrant entre le PLS et le PLAI [logements attribués aux locataires de très grande précarité, ndlr] ».
« Une meilleure ventilation de ce logement social »
Selon les projections de la Ville, un seuil à 30 logements aurait permis la production de « 2 613 logements ces trois dernières années », souligne Patrick Amico, contre 872 construits entre 2018 et 2020. « Pour nous, il était important dès cette première décision, d’abaisser drastiquement le seuil de logements sociaux, pour avoir un impact majeur sur une meilleure production, mais surtout une meilleure ventilation de ce logement social, estime l’adjointe à l’urbanisme. Baisser la taille des opérations à partir desquelles il devient obligatoire de faire du logement social permet de refaire du logement social en centre-ville », ajoute Mathilde Chaboche, adjointe à l’urbanisme.
Le centre-ville enregistre 24% de logements sociaux. 46% dans les quartiers Nord. « On peut très rarement avoir des programmes de 80 logements en centre-ville en raison de la rareté de grands terrains fonciers, mais on peut avoir des opérations à 30 logements et 2 000 m2 de surface de plancher en centre-ville », poursuit Mathilde Chaboche.
L’élue avance que le seuil actuel permet à la plupart des opérations d’échapper à l’obligation. Elle dit ne « plus compter le nombre de demandes de programmes de promoteurs à 75-79 logements. C’est pourquoi nous avons décidé de croiser deux seuils les 30 logements et les 2 5000 m2 de plancher ce qui limite les contournements ».
Reconversion d’immeubles municipaux en logements sociaux ?
D’ores et déjà, elle annonce que la prochaine modification du PLUi – la Ville en prévoit une par an « ira plus loin sur la base d’une étude fine portant notamment sur le zonage, secteur par secteur, pour rattraper le déficit en logement social au cas par cas, s’adapter aux configurations foncières des arrondissements ».
Pour les élus de la majorité, la production de logement social doit être « le fruit d’opérations menées par les bailleurs sociaux, soit, conduites par les promoteurs dans le cadre des opérations globales qu’ils mèneront, mais nous ferons en sorte de leur donner les règles du jeu bien en amont », annonce Patrick Amico.
Le parc immobilier municipal – en cours d’audit – pourra aussi « à terme faire l’objet d’opération de logements sociaux. Nous envisageons de voir avec les bailleurs sociaux pour réhabiliter un certain nombre d’immeubles », poursuit l’adjoint sans, à ce stade, livrer de chiffres.
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