Qui sera le prochain maire de Marseille samedi 4 juillet ? Michèle Rubirola ? Martine Vassal ? Ou un autre candidat ? Les tractations ont débuté en vue d’un troisième tour à suspense.
Rien n’est encore joué pour la désignation du prochain maire de Marseille. Si le Printemps Marseillais est bien arrivé en tête ce 28 juin, à l’échelle de la ville, avec 38,28% des voix, la liste d’union de la gauche et des écologistes, emmenée par Michèle Rubirola, n’a obtenu qu’une majorité relative en nombre de sièges.
42 sièges de conseillers municipaux sur 101 pour le Printemps Marseillais contre 39 pour la LR Martine Vassal. Soit trois voix d’écart seulement.
Un scrutin suspendu au choix de 11 élus des listes minoritaires
C’est au sein de l’hémicycle municipal, à l’occasion d’un troisième tour que sera désigné le ou la prochain(e) maire de Marseille. Dans le cadre de la loi PLM (Paris – Lyon – Marseille), qui date de 1982, ce sont les conseillers nouvellement élus qui désignent à bulletin secret leur édile, à l’occasion de la séance d’installation du conseil municipal, qui doit se tenir ce samedi 4 juillet.
« Ce second tour n’a pas permis de dégager de véritable majorité pour désigner clairement mon successeur à la tête de notre ville, a déclaré Jean-Claude Gaudin, dimanche 28, à l’issue des résultats définitifs. Beaucoup dépendra du choix que feront les onze élus des listes minoritaires d’hier, entre la poursuite du développement de la ville et le repliement vers les errements du passé et le déclin ».
En vue de ce nouveau scrutin, à bulletin secret, les tractations en coulisses ont naturellement commencé pour former des alliances. Samia Ghali, qui a conservé sa mairie dans les 15-16e, détient une partie des clés du scrutin. Disposant de 8 voix, elle est la plus courtisée à gauche comme à droite. « Samia Ghali est une femme de gauche, une sénatrice apparentée PS. Elle a été très silencieuse durant la période de l’entre-deux tours, maintenant on attend qu’elle s’exprime et qu’elle se positionne, mais je pense qu’elle ne peut pas se porter complice de la droite », nous confiait, aujourd’hui, Olivia Fortin, qui a battu Martine Vassal dans le 6-8e.
Samia Ghali : « en dehors des appareils politiques »
Même discours du côté du socialiste Benoît Payan, qui s’est imposé dans le 2e secteur : « Qui peut imaginer que Samia Ghali donne les clés de la ville à la droite qu’elle a combattue pendant 25 ans ? Qui peut imaginer que Samia Ghali fasse vivre et survivre le système opéré par Jean-Claude Gaudin ? », a-t-il déclaré, sur France Bleu Provence.
Vers qui les précieuses voix se porteront ? Sachant que le Printemps Marseillais a décidé de maintenir sa liste face à elle dans le 8e secteur, avec Jean-Marc Coppola. En l’absence d’accord dans l’entre-deux-tours, estimant que l’ambition de Samia Ghali de rester sénatrice était plus forte que celle d’être maire de secteur, le communiste avait déclaré à son propos qu’elle apparaît comme une candidate de « confusion », avec un profil plutôt « macron-compatible ».
A contrario, dans ce secteur, le candidat de Martine Vassal, Moussa Maaskri, avait fait le choix de retirer sa liste. « Nous sommes en effet totalement déterminés à ne pas laisser le moindre risque de voir le Front national l’emporter dans les 15e et 16e arrondissements. Alors que sa candidate pointe à quelques longueurs de la liste arrivée en tête au premier tour, le très haut niveau d’abstention du premier tour peut nous faire craindre un score très différent lors de l’organisation du second. C’est donc un choix de raison que j’ai décidé de faire afin que les élus d’extrême droite n’entachent plus Marseille et ne polluent plus les débats du conseil municipal », avait déclaré l’acteur marseillais.
De son côté, Samia Ghali souhaitait mener son aventure seule, préférant conserver son statut de « femme libre ». A ce titre, la sénatrice n’a pas non plus répondu favorablement au « pacte de raison » proposé par Renaud Muselier, dans l’entre-deux-tours face à la gauche. D’ailleurs, Samia Ghali exprimait au soir du second tour, que sa victoire revêt une « saveur particulière, car elle s’est construite en dehors des appareils politiques et souvent seule contre tous ».
Samia Ghali est en position de faiseuse de reine. Et si à gauche personne n’ose croire que ses voix pourraient aller à Martine Vassal, la perspective des sénatoriales en septembre prochain pourrait changer la donne. Pour briguer un nouveau mandat de sénatrice, Samia Ghali devra compter sur un électorat de droite, qui constitue une grande part des grands électeurs du territoire.
Dans ce contexte, l’hypothèse d’un vote à gauche les deux premiers tours de l’élection du maire, et d’un vote à droite au troisième n’est pas à exclure…
Lionel Royer-Perreaut, Guy Teissier… les sauveurs de la droite marseillaise ?
Dans cette optique et avec ce faible écart de voix entre le Printemps Marseillais et Les Républicains, la droite veut croire en ses chances de renverser la tendance au sein de l’hémicycle municipal ce samedi 4 juillet. Mais avec qui comme capitaine ? Martine Vassal ?
Bruno Gilles (DVD) avec lequel aucun accord n’a pas été possible en vue du second tour, juge cette perspective peu séduisante. Lui, prône une « candidature de l’apaisement », que la présidente du Département des Bouches-du-Rhône, ne peut selon lui pas incarner. Bruno Gilles dispose de trois voix pour ce troisième tour, qu’il n’offrira donc pas à Martine Vassal si elle se présente. Sa candidate dans le 2e secteur, Lisette Narducci, devrait se ranger à sa décision.
Si aucune décision n’est arrêtée pour Bruno Gilles, avant le second tour, les discussions avaient eu lieu avec certains des colistiers de la candidate LR. « On peut imaginer une gouvernance très marquée, comme une gouvernance apaisée, où chacun serait obligé de s’occuper d’un domaine de compétence dans lequel il se sent le mieux », expliquait le sénateur dans notre entretien de l’entre-deux-tours. « Demain, cela ne me gêne pas de travailler avec Lionel Royer-Perreaut ou Guy Teissier, par exemple, sur des domaines régaliens (sécurité, économie, gestion de la ville..) et avec certains – pas avec tous – écologistes que j’appellerais “compatibles” de parler d’environnement, d’aménagement de la ville… »
Ces dernières heures, le nom de Lionel Royer-Perreaut (LR) est revenu à plusieurs reprises. Le candidat s’est largement imposé dans le 5e secteur, avec 43,52 %, en conservant sa mairie. Dans un tweet, Renaud Muselier, président de la Région Sud y va même de son commentaire.
À #Marseille, le rassemblement doit être la priorité et il faut dégager une majorité – soit @Vassal2020 peut réussir l’unité, soit quelqu’un doit le faire : seul @lionelrp2020 sort incontestablement vainqueur de ce scrutin ! #Municipales2020 pic.twitter.com/XBpWm7nYrw
— Renaud Muselier (@RenaudMuselier) June 29, 2020
Intervention de Nicolas Sarkozy
Pour Renaud Muselier, celui ou celle qui deviendra maire, sera celui qui a la « capacité de fédérer autour d’un projet, et d’unir, de façon à dégager une majorité, qui aujourd’hui est relative et qui pose des problèmes pour la suite. Si Martine Vassal arrive à faire ça, eh bien c’est très bien. Si elle n’y arrive pas, il faut qu’à droite, on puisse trouver une solution. Il y a un homme fort qui se dégage, c’est Royer-Perreaut, maire du 9-10, qui est élu dans un secteur qui n’a été entaché qu’aucune tricherie, et peut-être aussi susceptible de fédérer. Martine Vassal a perdu dans un secteur qui est normalement imperdable. Est-ce qu’elle a la légitimité pour porter les choses derrière ? Oui, si elle rassemble ».
Lionel Royer-Perreaut, « celui qui devra être élu sera celui qui crée l’unité et le rassemblement, peu importe qui. Monsieur Teissier, Lionel Royer-Perreaut, Martine Vassal, ce n’est pas le sujet. Il faut être fédérateur et rassembler pour 6 ans. La ville est en ébullition ».
Parmi les potentiels candidats à l’élection du maire, le député LR Guy Teissier. L’ancien maire des 9-10 se pose aussi en potentiel « recours », si Martine Vassal décidait de renoncer, a-t-il déclaré à l’AFP. Si son nom est également évoqué, ce n’est pas un hasard. En tant que doyen des élus, c’est lui qui présidera la séance du conseil municipal d’installation. Si aucun candidat ne recueille 51 voix ou plus, les élus devront à nouveau revoter. Lors de ce troisième vote c’est le candidat qui aura recueilli le plus de voix qui sera élu. En cas d’égalité, c’est le plus âgé des candidats qui sera désigné…
Un scénario qui semble faire rêver Guy Teissier qui n’a jamais caché son désir d’être maire de Marseille. « J’ai l’expérience, j’ai présidé la communauté urbaine, je suis le plus écologiste avec la fondation du parc national des Calanques, j’ai eu beaucoup de succès électoraux ».
Les négociations sont également impactées en raison de l’enquête préliminaire ouverte il y a 15 jours sur les soupçons de fraude aux procurations, chez Les Républicains. Dans ce cadre, dans la matinée, Julien Ravier (LR), fraîchement réélu à la mairie du 11-12e, a été entendu par les enquêteurs de la brigade financière de la Police judiciaire et sa mairie perquisitionnée. L’enquête, qui suit son cours, avait mené au sein d’un Ehpad de Saint-Barnabé (12e) où des procurations douteuses auraient été établies pour plusieurs personnes âgées par des proches collaborateurs de Julien Ravier.
Dans les hautes sphères, Nicolas Sarkozy, continue de jouer les médiateurs. L’ancien président de la République pourrait s’exprimer sur la question politique marseillaise dans les prochains jours. Tout comme Christian Jacob, le chef du parti.
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