Depuis le début de la crise sanitaire, le président de la République, Emmanuel Macron, multiplie les déplacements. Il s’est rendu, ce jeudi, à l’IHU Méditerranée Infection à Marseille. Didier Raoult lui a dévoilé en exclusivité les résultats de son étude sur l’utilisation de l’hydroxychloroquine.
C’était une visite surprise et surtout à l’abri des regards. Sans aucun média. Après sa matinée passée à hôpital universitaire Bicêtre près de Paris, à la rencontre des chercheurs qui planchent aussi sur le coronavirus, le chef de l’Etat a décidé de faire une escale à Marseille. Emmanuel Macron est arrivé en convoi, un peu avant 16 heures à l’IHU Méditerranée Infection, pour s’entretenir avec le professeur Didier Raoult. Une visite de plus de trois heures.
Coup de com’ ou volonté de se faire sa propre opinion sur les travaux de Didier Raoult ? Le déplacement d’Emmanuel Macron entre dans le cadre des consultations menées auprès des experts, avant son allocution prévue lundi, peu après 20 heures. La quatrième en moins d’un mois.
🔴🇫🇷 Les premières images de la rencontre entre Macron et le professeur Raoult ! pic.twitter.com/CjKdwhXX8s
— En Cause (@EnCausee) April 9, 2020
Le président de la République ne pouvait, par ailleurs, rester sourd au phénomène marseillais et au travail effectué par les équipes à l’IHU, depuis le début de l’épidémie. Entre 800 et 1.000 personnes se présentent, chaque jour, devant l’IHU pour se faire dépister par les équipes du professeur Raoult.
Au total, 2.284 personnes ont déjà été traitées et plus de 60.000 tests ont été réalisés depuis le début de l’épidémie. Une manière aussi pour le Président de montrer qu’il n’écarte aucune piste et qu’il s’intéresse à toutes les recherches, dont celles controversées du professeur Raoult; et au passage de clarifier les choses, après le couac des décrets sur l’administration de la chloroquine.
Le 23 mars, le ministre de la Santé Olivier Véran avait annoncé la prise d’un arrêté encadrant l’utilisation de la chloroquine, avant un rétropédalage.
Raoult présente ses résultats à Macron
Depuis le début de la crise sanitaire, l’infectiologue marseillais défend contre vents et marées, l’utilisation de l’hydroxychloroquine en combinaison avec l’antibiotique azythromicine, pour soigner le Covid-19. Il échange d’ailleurs régulièrement avec le chef de l’Etat par téléphone ou messages.
Alors que le coronavirus a fait plus de 10 000 morts en France, l’infectiologue a annoncé, hier, dans son bulletin vidéo, avoir obtenu des résultats concluants, lors d’une étude menée sur 1 000 patients.
Il a réservé l’exclusivité de son étude au président. Sur les 1 061 patients passés par ses services, la guérison virologique a été obtenue chez 973 patients en 10 jours (près de 92%). La nouvelle étude a été publiée dans la soirée, en anglais, sur le site pré-prints de l’IHU « La combinaison HCQ-AZ, lorsqu’elle est démarrée immédiatement après le diagnostic, est un traitement sûr et efficace pour Covid-19, avec un taux de mortalité de 0,5%, chez les patients âgés. Il évite l’aggravation et élimine la persistance et la contagiosité du virus dans la plupart des cas». (voir encadré).
Une visite qui divise
Reste que s’il a gagné la bataille de l’opinion, son protocole divise le monde scientifique. Beaucoup prônent la prudence et estiment que la méthodologie prévaut sur le nombre de personnes testées pour conclure à l’efficacité d’un traitement.
Dans l’entourage du Président, cette rencontre divise. En coulisse, le professeur Raoult dispose d’un soutien de poids en la personne de Brigitte Macron, favorable à cette visite. Si l’Elysée a précisé qu’elle n’avait pas valeur de caution, elle est vécue comme un signal fort par la profession médicale.
Une pétition « #NePerdonsPlusDeTemps » lancée par l’ex-ministre de la Santé Philippe Douste-Blazy, demandant à assouplir les possibilités de prescription de la chloroquine a dépassé les 450 000 signatures.
Le président de la Région Sud, Renaud Muselier, également médecin, a réagi à la visite d’Emmanuel Macron, déclarant que « c’est une très bonne nouvelle », remerciant le chef de l’Etat de s’être déplacé. « C’est une marque de reconnaissance de l’Etat pour ce grand médecin mais c’est aussi la démonstration qu’Emmanuel Macron sait écouter. »
« A Marseille, les statistiques semblent plaider en faveur de cette méthode »
6,73 décès pour 100 000 habitants dans les Bouches-du-Rhône, contre 32 en Ile-de-France, 18 en Corse et 13 dans le Rhône, avec une moyenne nationale de 9,98. « A Marseille, les statistiques semblent plaider en faveur de cette méthode qui apporte une réponse médicale et psychologique, la seule valable avec le confinement pour éradiquer l’épidémie, estime Renaud Muselier. « 2,5% des Marseillais ont est été testés, ce qui en fait la population la plus testée du monde. »
Pour le président de la Région Sud, « la visite du Président de la République doit faire taire tous les indécis ! Cet événement saura, je l’espère, ramener la science et la médecine là où elle aurait toujours dû être : aux côtés des malades. La décision politique primera toujours sur le verbiage. Nous sommes face à une urgence et les Français attendent de nous des solutions médicales, sanitaires et économiques concrètes. Pour moi l’heure ne sera jamais à la polémique mais à l’action, personne ne doit rester au bord du chemin ! » déclare-t-il dans un communiqué de presse.
« On fait une médecine de guerre, il faut être proactifs »
Interrogée sur BFM TV, Martine Vassal, la présidente (LR) du Département des Bouches-du-Rhône, touchée par le Covid-19, défend également la méthode Raoult. « Aujourd’hui, on est en guerre contre ce virus, quand on est en guerre, on fait une médecine de guerre, il faut être proactifs. Il faut que l’on soit en avance. Avec ce virus, on a jusqu’à présent en retard. En retard sur tout. Donc aujourd’hui, on doit être en avance: mettons des masques à tout le monde, dépistons de façon massive, faisons des tests de sérologie pour que l’on puisse sortir de cette crise le plus vite possible ».
Valérie Boyer s’interroge, quant à elle, sur les raisons de cette visite. « J’espère que l’on va aboutir à une forme de respect parce qu’aujourd’hui, les malades n’ont pas de parcours de soin », a estimé la députée LR, elle-même soignée avec le protocole de Didier Raoult. Elle a également déclaré ne pas comprendre pourquoi le protocole de l’infectiologue n’est pas testé dans le cadre de l’essai clinique européen Discovery (lire par ailleurs)
Christian Estrosi, maire de Nice, a déclaré de son côté, que le président de la République a raison de prendre l’avis du professeur Raoult et se déplacer dans son laboratoire. « C’est la marque d’un chef et c’est ce qu’on attend d’un chef de guerre, être capable d’arbitrer en allant se rendre compte par lui-même des réalités sur le terrain ».
Les députés LREM des Bouches-du-Rhône Cathy Racon-Bouzon et Saïd Ahamada, plaident aussi pour un dépistage massif.
Avec @saidahamada, nous appelons à un dépistage massif de la population française. Le président @EmmanuelMacron marque son intérêt pour toutes les recherches sur le #COVID2019, en rencontrant @raoult_didier . Le protocole mis en place par l’@IHU_Marseille fait figure de modèle. pic.twitter.com/8Mm48DXnld
— Cathy RACON BOUZON (@RaconCathy) April 9, 2020