Le 27 novembre, la Commission nationale d’investiture Les Républicains devra trancher entre Martine Vassal et Bruno Gilles pour porter la liste du parti aux municipales de 2020. Un avant-premier tour pour les candidats qui affûtent leurs arguments pour leur grand oral.

Ils sont sortis de la réunion avec Christian Jacob, mercredi soir, presque bras dessus, bras dessous, avec la ferme intention de ne rien divulguer de leurs discussions. « Un accord a été conclu », dans ce sens, nous a-t-on confié, à l’issue de la rencontre. Et pourtant, il n’aura pas fallu bien longtemps pour que quelques informations filtrent ici et là, sur la teneur de ce rendez-vous, où le patron des Républicains n’a pas réussi à démêler les ambitions des deux candidats à la mairie de Marseille, Martine Vassal et Bruno Gilles.

Au lendemain, de leur entretien de trois heures, auquel assistaient également Renaud Muselier, président de la région Sud et des Régions de France, Jean-Claude Gaudin, maire de Marseille, parlementaires et représentants des comités de soutien, les langues se délient quelque peu.

« Je n’ai qu’une parole, pas deux »

L’ambiance plutôt décontractée du début des échanges aurait ensuite laissé place à un climat un peu plus tendu. Ce n’est pas de cette manière que Martine Vassal a vécu cette tentative de (ré)conciliation, même si elle a refusé de commenter sur le fond. « On a dit que ce qui se dit dans cette pièce reste dans cette pièce. J’ai pris un engagement hier [mercredi], et je n’ai qu’une parole, pas deux », confiait-elle, hier soir aux Voûtes Virgo, entourée de quelques journalistes, avant d’ajouter : « J’ai été ravie de cette réunion, car on a pu se parler ». 

D’ailleurs Bruno Gilles a « essayé de répondre point par point » lors de cette réunion. Sans vouloir griller toutes ses cartouches en vue de la commission d’investiture qui se tiendra le 27 novembre au siège du parti, cela lui a « permis aussi de dire ce que je pensais des sondages ».

« Si les sondages faisaient une élection, on le saurait »,

Le dernier en date, c’est le sondage Ifop, commandé par LR et paru il y a quelques jours. Il teste différents scénarii entre les deux prétendants à l’investiture LR. Quel que soit le scénario, Martine Vassal devance son rival. L’hypothèse selon laquelle la candidate est investie par le parti LR la place à 30% des intentions de vote au premier tour, loin devant Stéphane Ravier, candidat du Rassemblement national.

Dans le cas où Bruno Gilles serait tête de liste LR, il obtiendrait 25% des suffrages (1 point seulement devant le candidat du RN). En cas de maintien des deux dans la course à la mairie de Marseille, Martine Vassal conserve son avance, avec ou sans l’investiture.

À chacun son interprétation des sondages

« Si les sondages faisaient une élection, on le saurait », plaide avec calme Bruno Gilles. « Aujourd’hui, Jean-Noël Guérini serait maire de Marseille, Balladur aurait été président et sans doute une seconde fois Nicolas Sarkozy… »

À quatre mois des municipales, dans une ville où l’on vote par secteur, il prône la prudence. « En mars 2014, le dernier sondage par secteur me donnait 15 points de retard au premier tour sur Marie-Arlette Carlotti (PS) et finalement, je l’ai devancé de 16 points. Le différentiel d’erreur est important, il faut prendre ça avec des pincettes ». Ce qu’il préfère analyser, c’est plutôt « l’évolution de ces sondages ».

Le premier, réalisé par l’association les Amis de Martine Vassal, en juin, (avant sa déclaration de candidature) la place en pole position à 29%, soit 19 points de différence avec Bruno Gilles. « Aujourd’hui, l’écart s’est réduit à 5 points. Il reste encore quelques mois, ce ne sont pas les sondages qui font une élection surtout dans une ville comme Marseille », martèle le candidat.

A contrario, Martine Vassal estime qu’il « faut tirer les conclusions de ces sondages » qui, jusqu’à présent, lui ont toujours donné une longueur d’avance, et tenir compte des cotes de popularité, qui lui sont aussi favorables. Sa présence à la tête de deux importantes institutions n’est pas étrangère à cette notoriété.

Divergences de fond

Si les candidats ne parlent pas « d’inimitié » , d’ailleurs, « on se voit en Be to be, avec Bruno Gilles », ce dernier avance des « problèmes de fond ». Il plaide depuis qu’il est en campagne pour un ticket Bruno Gilles, à la Ville, Martine Vassal à la Métropole.

Dans ce sens, lors de la rencontre à Paris, la proposition d’une double investiture aurait été mise sur la table. « Une solution de consensus, proposée il y a quelque temps par Christian Jacob », confie Bruno Gilles, et qui sera d’ailleurs soumise lors de la CNI.

« C’est frustrant aujourd’hui de ne pas avoir la main pour mettre en œuvre les projets »

Martine Vassal y aurait déjà opposé une fin de non-recevoir. « Dans toutes les villes centres, c’est le maire qui est président d’une intercommunalité, il y a une interaction forte entre la Ville de Marseille et la Métropole, on a besoin d’avoir cette synergie, je vois la limite de l’exercice, c’est frustrant aujourd’hui de ne pas avoir la main pour mettre en œuvre les projets, je ne peux pas les mener de A à Z », nous confiait-elle, il y a quelques semaines.

Par ailleurs, avec les tergiversations relatives à la fusion entre la Métropole et le Département, aujourd’hui reportée à un futur lointain, la logique institutionnelle a poussé Martine Vassal à porter sa candidature à la mairie de Marseille.

Pour Bruno Gilles, « être le maire de Marseille  à plein temps » permet d’instaurer un rapport de force, pour pouvoir « taper du poids sur la table vis-à-vis de la Métropole, quand c’est nécessaire ». 

Mercredi, il se serait vu proposer par sa rivale, le poste de premier adjoint, puis celui de vice-président de la Métropole, ou encore mener la liste aux sénatoriales, que Bruno Gilles conduira – « de fait » – sauf s’il remporte l’élection. « A part ministre, on m’a tout proposé hier », sourit-il.

Quelle nécessité d’une investiture LR ?

Les sondages montrent qu’avec ou sans investiture, Martine Vassal reste la mieux placée pour remporter la ville de Marseille, ce qui pose la question d’un nécessaire adoubement du parti. « J’ai cru en l’UMP, au rassemblement des droites et j’y crois toujours.» En revanche, elle refuse de croire que son inexpérience dans les réseaux parisiens, son statut de femme ou encore que la ligne RPR, canal historique du parti, puisse la pénaliser dans cette course à l’investiture.

« Je n’ai pas fait tout ça pour au dernier moment jeter l’éponge »

Bruno Gilles y attache une importance particulière. Elle revêt pour lui une importance politique, mais aussi historique. Elle est synonyme de reconnaissance de ses « 40 ans de vie politique ». Depuis 1995, il a été 21 fois directeur de campagne pour d’autres candidats, Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy, quatre fois pour les élections municipales de Jean-Claude Gaudin. « J’ai une vraie histoire avec mon parti politique ».

Martine Vassal nourrissait l’espoir d’arriver à régler la situation, « comme à Nice » où Eric Ciotti, député des Alpes-Maritimes renonce au duel fratricide et laisse le champ libre à Christian Estrosi, maire sortant. A Marseille, ce n’est pas cette histoire qui s’écrit. Les deux candidats ne céderont pas. « Je n’ai pas fait tout ça pour au dernier moment jeter l’éponge », martèle le sénateur. Martine Vassal ira.

13 jours pour convaincre

Ils affûtent leurs arguments en vue de leur audition devant la CNI, à la fin du mois. Alors que Jean-Claude Gaudin aurait invité quelques amis sénateurs à dîner, mercredi soir, Bruno Gilles aborde ce rendez-vous comme une élection. Le tour avant le premier tour. Il rencontre « tout le monde », pour faire valoir la légitimité de sa candidature.

Autre stratégie avec Martine Vassal, qui va envoyer des courriers à l’ensemble des membres de la commission nationale pour expliquer ses raisons. Elle a rencontré hier matin, Gérard Larcher, président du Sénat et le sénateur de la Vendée, Bruno Retailleau, membres de la CNI.

Elle se rendra de nouveau à Paris la semaine prochaine, où elle se dit prête si nécessaire pour refaire une réunion, comme le souhaite Renaud Muselier.

Les candidats ont désormais 13 jours pour faire la différence. Bruno Gilles a vu des CNI évoluer très vite. « Le grand oral est important. On est seul et il y a une histoire à raconter ». Lequel sera le plus convainquant ?

La CNI est constituée de 58 personnes. Martine Vassal et Bruno Gilles, tous deux candidats ne votent pas. Elle est composée de députés, sénateurs, d’anciens ministres, d’élus locaux… parmi lesquels Jean-François Copé (ancien président de l’UMP), François Barouin (maire de la ville Troyes, et président de l’Association des maires de France », l’ancienne ministre de l’Intérieur Michèle Alliot-Marie, Eric Ciotti, député des Alpes-Maritimes et président de la CNI… Pour la région, Renaud Muselier, représentant du président des Républicains et Bernard Deflesselles, député de la 9e circonscription des Bouches-du-Rhône. Le jour du vote, les parlementaires s’expriment après quoi, les candidats dont l’ordre de passage est tiré au sort, sont à leur tour auditionnés individuellement. Si les membres de la CNI tombent d’accord, un vote à main levée peut suffire, dans le cas contraire, ce sera une élection à bulletin secret.

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