L’APEC (Association Pour l’Emploi des Cadres), a tenu jeudi 6 avril dernier une table ronde mêlant anciens sportifs de haut niveau et experts de la formation professionnelle. Le but ? Donner des conseils et des retours d’expériences de ces ex-athlètes pour rebondir professionnellement après une carrière sportive et réussir sa reconversion.
C’est à l’Orange Vélodrome, temple du sport marseillais, que la table ronde, organisée dans le cadre de l’opération de parrainage « Sésame Jeune Talents », a eu lieu, pour conclure une journée dédiée aux métiers du sport, en cette année de Capitale Européenne du Sport (MP2017). Charlotte Delrieu, co-fondatrice de Made in Marseille, a animé la discussion pour cerner les choix de vie des invités en fonction de leurs expériences et de leurs émotions éprouvées à des périodes charnières de leur existence. Ils ont ainsi livré différentes manières d’approcher une reconversion professionnelle après le sport qui peut s’appliquer à une reconversion professionnelle dans un champ plus large.
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S(up)port de vie : intégrer les valeurs du sport en entreprise
Pour Vincent Gastine, joueur professionnel de football (OM) reconverti en directeur de magasin Sephora, la formation sportive est une chance. « Le sport m’a formé à la difficulté de la vie, il m’a apporté le respect, l’exigence, le dépassement de soi et beaucoup de qualités de savoir être », confie-t-il. Sophie Domenech-Vintex, ancienne athlète de l’équipe de France d’athlétisme, actuellement directrice des relations clients à l’APEC, appuie son témoignage : « Le sport c’est l’école de la vie. On perd plus qu’on ne gagne. Je m’en sers au quotidien dans mon métier ».
Mohamed Sy, aujourd’hui entraîneur de basket, sa passion-formation initiale, a ainsi beaucoup gagner par sa pratique du sport. Il a vécu sa formation sportive comme une échappatoire : « Le football, puis le basket, m’a permis de m’épanouir, de me libérer des quartiers. Ça m’a donné un nouvel horizon car j’ai rencontré beaucoup de gens de beaucoup de cultures ».
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Se réinventer, c’est du sport !
Alexandre Bressy, qui dirige actuellement plusieurs entreprises qu’il a créées avec sa conjointe après un parcours de joueur professionnel de Handball, intervient sur la manière dont il recrute : « Quand je regarde un CV, je regarde directement la ligne des activités personnelles. Ça me parle plus ». Il confie que les valeurs du sport, évoquées par Vincent Gastine, s’appliquent à la vie en entreprise, et que le sportif s’adapte rapidement. Il se retrouve alors facilement en confiance avec les sportifs qui ont été formés au respect et à l’exigence.
En accord avec les idées de Alexandre Bressy, Arnault Beghin, coach en entreprise pour la reconversion et ancien entraîneur de rugby à 13, conçoit le sportif comme une construction en soi, une ébauche qui doit sans cesse se redessiner en gardant le meilleur à chaque fois. « Le sportif de haut niveau construit son personnage avec ses contraintes et ses avantages, et il lui faut anticiper une transition de ce personnage. Trier le bon du mauvais pour l’adapter au monde de l’entreprise. Le sport c’est comme entreprise car c’est une aventure collective avec de la compétition et des performances ».
Se servir de ses qualités de sportif pour l’avenir
Pour Sébastien Piocelle, ancien joueur professionnel de football à Nîmes reconverti en entraîneur de football puis fondateur d’une entreprise, le sport peut-être tellement prenant dans la vie d’un jeune qu’il en deviendrait sa seule préoccupation. « Quand on est dans le sport, on pense tellement à bien faire, à se dépasser et à ne pas échouer, qu’on a peur de s’attarder sur d’autres activités », précise-t-il. Vincent Gastine évoque alors la difficulté mutuelle de créer des ponts entre le sport et « la vraie vie » selon lui : « Quand on fait du foot sa profession, on est déconnecté de la réalité, on est mis dans une bulle. Le monde du foot est hermétique, il n’accepte pas d’aide extérieure. Il y a un véritable manque d’accompagnement. On a deux vies qui ne s’entremêlent pas. Quand tu t’arrêtes et qu’il faut faire ton CV alors qu’on t’a lavé ton short toute ta vie, c’est dur ! », met en exergue l’ancien sportif.
Sophie Domenech-Vindex et Laurie Skander, ancien joueur professionnel de football devenu par la suite chef des ventes chez Bacardi Martini, proposent tous deux une approche psychologique. Laurie prône ainsi le pouvoir du soutien des proches pour assurer une reconversion et continuer à croire en soi. « C’est la famille qui nous pousse. Si ma famille ne m’avait pas soutenu, je n’en serais pas là aujourd’hui. L’éducation, c’est la chose la plus importante », souligne-t-il. Un soutien sur lequel Sophie Domenech-Vintex conseille aussi de prendre appui. « Le savoir-faire ça s’acquiert, pas le savoir être comme on dit. N’ayez pas peur de parler, de vous confier à quelqu’un, ne restez pas seuls face à votre reconversion ! », alarme-t-elle.
Selon elle, il faut envisager un avenir assez tôt pour que le sportif ne se sente pas perdu et très loin de sa passion dans sa reconversion. Applicable à la reconversion professionnelle en général, elle explique toute l’importance d’anticiper sa reconversion, d’avoir le droit de se tromper tant que l’on sait s’écouter soi. « Il faut comprendre ce qui donne du sens à notre être pour avancer professionnellement », ajoute-t-elle.
Ouvrir les frontières entre le sport et le monde professionnel
Certains sportifs anticipent très vite leur reconversion en déployant d’autres activités en parallèle de la pratique du sport. C’est notamment le cas d’Alexandre Bressy qui, dès l’âge de 18 ans, a travaillé dans une caserne de pompiers tout en suivant sa formation professionnelle de handball. Et si Sébastien Piocelle a le sentiment d’avoir tout donné au football, en n’ayant pas anticipé sa reconversion, il se retrouve à 38 ans, créateur d’une entreprise qui propose des terrains de football mobiles pour permettre à des jeunes des quartiers Nord notamment, de pratiquer le football là où ils ne le pourraient pas. Il témoigne de l’importance des supporters d’un club qui s’investissent à long terme : « Le supporter il faut en prendre soin, c’est le plus fidèle. Jamais blessé, jamais transféré ! ».
Comme Sébastien Piocelle, Laurie Skander, a fondé l’Association des Anciens Footballeur Professionnels pour (se) faire plaisir. Son association met en lien d’anciens footballeurs et des jeunes pour soutenir la cause des enfants malades notamment à l’hôpital de la Timone. « Je veux faire du bien, je veux faire plaisir aux enfants cancéreux, c’est ça qui me fait du bien, qui me fait vibrer et ça leur rend bien ! », conclut-il.
Margot Geay