Après le Vaucluse, les Alpes-de-Haute-Provence, Marseille et le Pays Salonnais, c’est autour du Pays d’Aix-en-Provence de se mettre à la monnaie locale provençale, nommée la Roue, avec pour objectif annoncé de développer et favoriser une économie locale qui ne soit pas spéculative et qui permet de financer des projets éthiques.
Découvrez dans ce reportage à quoi sert une monnaie locale et l’histoire de la Roue provençale, mais aussi dans quels commerces locaux l’utiliser.
Une monnaie locale, à quoi ça sert ?
Dès le début des années 1980 et plus particulièrement à partir de 2008, les monnaies locales se sont développées partout dans le monde. La première est vraisemblablement apparue en 1983 à Vancouver, ville à l’époque frappée par la crise économique, afin de favoriser les échanges de biens et de services entre personnes.
Aujourd’hui, il existerait au moins 5000 monnaies locales dans le monde, voire même plus. « Où que ce soit, ce qui a motivé au départ la création de ce type de monnaie est une forme d’insatisfaction des gens à l’égard des systèmes monétaires officiels et des monnaies officielles. À cela ont pu se greffer plus récemment les effets de la crise : les systèmes des banques centrales commencent à devenir aberrants. On crée de la monnaie « en veux-tu, en voilà » pour nous aider à sortir de l’impasse mais on voit que cela ne mène à rien », explique Jean-Pierre Centi, économiste spécialiste des monnaies privées.
Les systèmes de monnaies locales ont émergé sans être totalement détachés des monnaies officielles, d’où leur nom de monnaie complémentaire. En France généralement, la monnaie locale a la même valeur que l’euro. Elle est utilisée par des consommateurs y ayant adhéré chez des commerçants également adhérents de cette monnaie. Ces derniers doivent respecter une charte pour faire partie du réseau et notamment respecter les circuits courts. « Ceux qui utilisent une monnaie locale le font dans un but bien déterminé de promotion de développement de l’économie locale. C’est une motivation forte et louable », souligne Jean-Pierre Centi.
La Roue : la monnaie locale made in Provence gagne du terrain
Parmi les quelques monnaies locales que compte la France, il en existe une qui couvre une grande partie de la Provence, elle se nomme la Roue. Créée dans le Vaucluse en 2011, elle s’est depuis répandue à Marseille, dans les Alpes-de-Haute-Provence et le Pays Salonnais.
Pour pouvoir l’utiliser, un consommateur doit adhérer à l’association gestionnaire de la monnaie locale où il habite et ensuite simplement échanger ses euros contre des roues. Ne lui reste plus alors qu’à utiliser ses roues chez les commerçants adhérents. Et ces derniers ne se limitent pas au domaine alimentaire puisque le réseau compte une grande diversité de secteurs d’activités (services, culture, artisanat, habillement ou encore loisirs).
« L’intérêt d’utiliser la Roue pour les particuliers et les acteurs économiques est un effet label. Les premiers savent que les euros échangés restent dans le réseau et ne partent pas en spéculation. Les seconds gagnent en image et en visibilité car ils appartiennent à un mouvement éthique et participent à la relocalisation de l’économie », met en avant Jean-Pierre Goretta, impulsateur de la Roue dans les Bouches-du-Rhône via l’association SEVE13.
Que deviennent les euros justement échangés contre des roues ? Ils sont déposés dans un fonds de garantie d’une coopérative financière. Cette dernière choisit ensuite de les utiliser pour financer des projets d’économie sociale et solidaire car elle n’utilise que l’argent dont elle dispose. Parmi des exemples de projets éthiques qui peuvent être financés par la Roue : des fermes biologiques ou des épiceries paysannes.
Le Pays d’Aix rejoint l’aventure de la Roue
À la suite de la COP21, l’association Collectif Climat s’est penchée sur la question de créer une monnaie locale dans le Pays d’Aix. Finalement, le collectif a fait le choix d’adhérer à la Roue. « Cela est cohérent car les particuliers et commerçants pourront utiliser leurs roues dans les départements et communes voisines. Nous aurons toutefois une Roue personnalisée pour le Pays d’Aix déjà au niveau des coupures qui auront un verso propre ainsi que sur le choix des adhérents professionnels et des conditions d’adhésion », précise François Hamy, l’un des membres de l’association Monnaie Locale du Pays d’Aix.
Sans le Pays d’Aix, la Roue compte déjà environ 700 adhérents et 300 professionnels et les chiffres sont en constante augmentation. Pour qu’un tel système puisse fonctionner, il faut évidemment des adhérents. « Une monnaie locale est un système qui tourne de lui-même et si peu de personnes sont intéressées, il n’arrivera pas à tourner à ses fins », précise Jean-Pierre Centi.
Pour que les adhérents soient intéressés et investis dans le projet, plusieurs facteurs entrent en jeu. D’abord l’utilité de cette monnaie, à savoir ce que l’argent échangé contre la monnaie locale va permettre de réaliser. Mais également le fait de pouvoir se procurer la monnaie locale facilement faute de quoi, le projet peut tomber à l’eau et la monnaie locale disparaître. Une situation qui s’est déjà produite à plusieurs occasions en France comme dans le monde.
Les acteurs marseillais qui jouent le jeu de la monnaie locale
Ils sont une quarantaine et parmi eux, on retrouve notamment :
- L‘épicerie paysanne d’Adèle sur le boulevard Chave
- Au Grain Près, l’épicerie sans emballage
- Café l’Ecomotive à Saint-Charles
- GreenDeliss, l’écocantine du 4e
- Les Ondines, resto associatif près des Réformés
- Tani Mena, un commerce équitable dans le Panier
- L’équitable café (6e) sur le Cours Julien
- Le Fantastique, restaurant local avec patio verdoyant à deux pas de Castellane
Une présentation pour comprendre les enjeux liés à la monnaie complémentaire réalisée par l’association SEVE13