La ministre de la Culture, Rachida Dati, annonce vouloir classer « monument historique » plus de 50 sites à Marseille dans les deux prochaines années. Pour Notre-Dame de la Garde, le Diocèse est encore incertain.

« Il y quelque chose qui me surprend beaucoup, lance la ministre de la Culture, Rachida Dati, en visite à Marseille ce jeudi 16 janvier. C’est le faible nombre de monuments considérés officiellement comme des ‘monuments historiques’. Et donc des monuments protégés ».

Pour appuyer ses propos, la ministre sort des chiffres et des comparaisons édifiantes. « En 2022, Marseille comptait 93 Monuments historiques. On est très loin derrière Bordeaux, qui en compte 384, de Lyon qui en compte 241, ou de Toulouse et Strasbourg, qui en comptent 232. C’est encore moitié moins par rapport à Aix-en-Provence ».

De quoi surprendre, pour la plus vieille ville de France, aujourd’hui deuxième plus importante du pays. « La conclusion est simple : Marseille est une ville sous-protégée », pose Rachida Dati.

classer, Du bunker de l’Estaque à la Bonne Mère, l’État veut classer 50 sites marseillais, Made in Marseille
Rachida Dati en visite à la Major, dont elle souhaite élargir le périmètre de protection.

Protéger plus de 50 monuments en deux ans

Avant d’annoncer l’objectif dans son viseur : « doubler à long terme le nombre de monuments historiques » de la commune. Et à court terme ? « Sur les deux prochaines années, plus de 50 monuments seront proposés à la protection ».

51, exactement, si on se fie à la liste communiquée (voir encadré). Elle compte une majorité de biens municipaux, proposés par la Ville.

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Le palais du Pharo n’est pas classé monument historique. © Mathieu Grapeloup

Le Diocèse n’a pas pris sa décision pour Notre-Dame de la Garde

Et la ministre d’égrener des monuments incontournables et remarquables de Marseille qui ont étonnamment échappé a une inscription ou à un classement. « Le palais du Pharo face à la mer […] et certains grands châteaux comme la campagne Pastré […] Et puis je pense, évidemment, à Notre-Dame de la Garde. Car que serait la ville sans la Bonne Mère ? ».

En effet, la basilique qui surplombe la commune, symbole iconique de la cité phocéenne, ne fait l’objet d’aucune protection. Excepté pour des reliques classées monuments historiques au titre « objet ». Propriété du Diocèse, ce dernier n’a jamais jugé que la basilique nécessitait ce statut.

Certains l’interprètent comme la liberté de gérer le site sans contrainte. Quoiqu’il en soit, l’institution religieuse ne semble pas avoir besoin des deniers publics pour entretenir son édifice. En témoigne le succès de l’appel aux dons et le lancement de la grande restauration de la statue de la Bonne Mère en février.

Malgré la proposition du gouvernement, le Diocèse de Marseille reste indécis. Il précise « qu’aucune décision n’a encore été prise. Soit pour accepter la proposition d’inscription de Notre-Dame de la Garde, soit pour la décliner ». L’institution « remercie » toutefois l’État « de sa disponibilité pour contribuer à la sauvegarde de ce monument emblématique ».

Focus sur des monuments dont le classement attire l’attention

Parmi les 51 sites et édifices marseillais que liste le gouvernement pour les protéger au titre des monuments historiques, certains peuvent retenir l’attention. Comme la Maison de Pierre Puget, rue de Rome, « témoignage important de l’architecture du 17e siècle », rappelle Rachida Dati.

Ou, du côté de l’Estaque, le bunker, dit « batterie Fenouil ». Un des derniers vestiges du « mur de la Méditerranée » qu’avait érigé l’armée allemande fin 1942 contre un éventuel débarquement par le Sud de la France.

Nous notons également que l’Église d’Arenc figure dans la liste. Cette dernière, propriété du Département, fait l’objet d’un feuilleton interminable depuis des années, et son avenir est incertain. Dégradée, dangereuse, tous les projets de réhabilitation, de revente ou de reconversion sont jusqu’à présent tombés à l’eau. En devenant « monument historique », elle pourrait être sauvée.

Enfin, le ministère de la Culture souhaite également protéger la cheminée rampante de l’ancienne usine Legré-Mante. Ce long boyau servait à évacuer les fumées de la fabrique de plomb jusqu’en haut de la colline. Pour rappel, le projet immobilier et de dépollution contesté de cette friche privée du littoral Sud est englué dans une procédure de justice. À cette heure, il est difficile de déterminer si un classement interfèrera.

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L’église d’Arenc

La liste des édifices marseillais que le gouvernement souhaite protéger

Au-delà de la reconnaissance patrimoniale et de l’attractivité que confère le titre « monument historique », il permet aussi de protéger l’édifice. Des règles encadrent l’obligation d’entretien, la préservation esthétique et architecturale. Le titre entraîne également une aide financière publique et une défiscalisation des travaux pour sa restauration.

Deux niveaux de protection existent : l’inscription, considérée comme une reconnaissance régionale, et le classement, plutôt valorisé à l’échelle nationale. Pour ce dernier, les aides financières comme les règles de protection sont plus importantes.

« Les édifices  inscrits au titre des monuments historiques, en attente de classement ou extension de classement » :

  • Hôtel de Pesciolini, extension (privé), passage
  • Ensemble cathédral Sainte-Marie-Majeure, extension (État, MCC)
  • Église des Chartreux (Ville)
  • Fontaine Cantini (Ville)
  • Fontaine des Danaïdes (Ville)
  • Fontaine Estrangin (Ville)
  • Musée Grobet-Labadie (Ville)
  • Mazargues War Cemetery (État, Ministère des Armées, CWGC),
  • Basilique du Sacré-Cœur du Prado (Ville)
  • Domaine Borély (Ville)
  • École nationale de danse (Ville)
  • Église Saint-Ferréol-Les-Augustins (Ville)
  • Escalier d’accès à la gare Saint-Charles (Métropole/Ville)
  • Monument aux Mobiles des Bouches-du-Rhône (Ville)
  • Palais de la Bourse (CCI)

« Les édifices à protéger » :

  • Basilique Notre-Dame de la Garde (Diocèse)
  • Chapelle Saint-Etienne au Frioul et digue de Berry du Port Dieudonné (Ville)
  • Chapelle Saint-Joseph-du-Cabot (Ville)
  • Église de la Trinite/La Palud (Ville)
  • Église Notre-Dame-du-Mont (6e) (Ville)
  • Église Saint-André Séon (15e)  (Ville)
  • Église Saint-Barnabé (12e) (Ville)
  • Église Saint-Lazare (1er) (Ville)
  • Église Saint-Martin d’Arenc (3e) (Département)
  • Cathédrale arménienne (privé)
  • Centre Notre-Dame du Roucas (label ACR) (privé)
  • Chapelle de l’immeuble Le Saint-Georges (privé)
  • Église orthodoxe grecque de la Dormition de la Mère de Dieu
  • Colonne de l’Immaculée Conception (1er) (privé)
  • Monument aux aéronautes Capazza et Fondere (5e) (Ville)
  • Monument des Rapatriés (la pale d’hélice de César) (7e) (Ville)
  • Obélisque de Mazargues (9e) (Ville)
  • Palais du Pharo (Ville)
  • Maison de Pierre Puget
  • Bastide Saint-Joseph et parc du Grand Séminaire, mairie des 13-14 (Ville)
  • Château dit campagne Pastré et son parc (8e) (Ville)
  • Caserne des Marins-Pompiers (3e) (Ville)
  • Cimetière Saint-Pierre (crématorium et crypte du souvenir) (5e) (Ville)
  • Cité des Associations (ancien syndicat du bâtiment) (1er) (Ville)
  • Citerne des Moulins (2e) (Ville)
  • Halle Puget (1er) (Ville)
  • Jardin de la Colline Puget (7e) (Ville)
  • Parc Chanot (grilles, Palais des Arts, Grand Palais, monument a Edmond Rostand, jardin d’enfants avec théâtre des marionnettes, buvette et lac de la Sirène) (8e) (Ville)
  • Piscine Tournesol de la Martine (15e) (Ville)
  • Villa Gastaud (8e) (privé)
  • Cheminée rampante de l’ancienne usine Legre-Mante (8e) (privé)
  • Lycée Montgrand, extension (Région)
  • Lycée Thiers (Région)
  • Église Saint-Philippe (6e), en attente visite complète (Ville)
  • Tour des Catalans (7e), attente diagnostic patrimonial en cours (Ville)
  • Batterie Fenouil a l’Estaque (15e) (privé)
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