Malgré les crises politiques et économiques, le préfet de région Christophe Mirmand se dit « serein » sur la poursuite du plan Marseille en grand. Il décrypte la complexité de pilotage et de financement de ce projet hors-norme.
Une crise politique nationale historique, un président de la République dans la tourmente, un ministre des Finances démissionnaire qui vise 25 milliards d’économies cette année en pointant les collectivités locales… Dans ce contexte, le plan Marseille en grand et ses 5 milliards d’euros pour les transports, le logement, les écoles et la sécurité est-il en danger ?
Localement, certains élus s’inquiètent de la tournure du plan lancé en grande pompe par Emmanuel Macron en 2021. La ministre marseillaise Sabrina Agresti-Roubache, qui était dédiée à ce plan, est à ce jour démissionnaire. Sans oublier que, depuis juillet, le gouvernement insiste pour faire 25 milliards d’euros d’économies en 2024. Il cible notamment les dépenses des collectivités territoriales.
Désormais, l’exécutif doit se renouveler sous la houlette du nouveau Premier ministre Michel Barnier. Mais « on n’est pas aujourd’hui dans une phase de réexamen des engagements des uns et des autres », estime le préfet Christophe Mirmand, épaulé depuis janvier par la sous-préfète déléguée à Marseille en grand, Virginie Avérous.
Toutefois, le représentant de l’État n’évacue pas totalement cette hypothèse : « Peut-être que le nouveau gouvernement voudra que l’on procède ainsi et que l’on fasse un balayage de la totalité du plan. Mais aujourd’hui, ce n’est pas le cas […] il n’y a pas de mise entre parenthèses », insiste-t-il. Ajoutant : « à date ».
Absence de pilotage : « je récuse pour ma part cette vision »
Malgré les nombreuses visites du chef de l’État et de ses ministres, un logo officiel et une page dédiée sur le site du gouvernement, il faut se rappeler d’une chose : aucun document ne contractualise ce plan entre l’État et les collectivités territoriales.
Une situation que pointe sévèrement la Cour des comptes, comme le décrypte Marsactu. Alors, ce grand plan est-il une annonce dépourvue d’engagement, sans réelle structure de pilotage ? « Je récuse pour ma part cette vision », insiste le préfet.
« Je donne acte qu’il n’y a pas de document de synthèse, contractuel, conventionnel […], qui aurait permis de regrouper l’ensemble des axes de ce plan. Il y a néanmoins des engagements pris, revus régulièrement, validés par les cabinets. Notamment celui du Président de la République. Ils permettent d’en assurer la traçabilité, le suivi et la bonne mise en œuvre ».
Logement, rénovation urbaine, transports, écoles, sécurité, cinéma… Christophe Mirmand reconnaît que ce plan « protéiforme » peut être difficile à décrypter. Pour autant, il a donné naissance à des structures fortes qui engagent l’État et les collectivités territoriales autour de projets clairs.
Comme la Société publique des écoles de Marseille pour le bâti scolaire, la société publique locale d’aménagement d’intérêt national (Spla-in) pour le logement. Concernant les transports, le groupement d’intérêt public (GIP) doit réunir tous les acteurs fin septembre.
L’argent attend les projets ?
Et du côté des financements ? Au lieu d’une enveloppe globale « Marseille en grand », l’État multiplie ses aides, entre « des engagements de long terme dans des infrastructures lourdes », ou des aides rapides sur des actions précises. En utilisant souvent plusieurs tuyaux pour arroser un même arbre.
Sur les écoles, par exemple, 250 millions d’euros de subventions directes sont inscrites dans la loi de finances, donc « sanctuarisés ». Mais des enveloppes supplémentaires viennent de divers organismes d’État pour les chantiers scolaires. Comme les 65 millions d’euros de l’Agence nationale de rénovation urbaine (ANRU). « Une ingénierie financière complexe », admet Christophe Mirmand.
Il rappelle ainsi que l’État a déjà engagé « près de 300 millions d’euros » pour les écoles, sur les 400 prévus dans Marseille en grand. Pour les transports, sur les 500 millions d’aides directes pour 15 projets, « l’État a déjà notifié 250 millions de subventions à la Métropole ».
Et il reste donc « des fonds disponibles » à utiliser. Pour le préfet, la balle est dans le camp des collectivités. C’est à elles de présenter des projets « mûrs » pour débloquer les crédits de l’État. En effet, « Bercy » n’aime pas beaucoup les autorisations d’engagement dites « dormantes ». L’impatient ministère de l’économie peut donc finir par les flécher ailleurs. Pareil pour l’ANRU qui pose une deadline en juin 2026 pour les projets de rénovation urbaine de Marseille.
« Ça fait partie de ma feuille de route d’être serein »
Un comité de pilotage doit être organisé d’ici mi-octobre. Il permettra « de mettre toutes les collectivités autour de la table. Et de refaire un point sur les engagements », précise Christophe Mirmand.
« C’est mon rôle, ça fait partie de ma feuille de route, d’être serein », conclut le premier intéressé.