Évasion | La magie des Alpes suisses en trains panoramiques et à crémaillère

Chaque jour, des centaines de milliers de voyageurs sillonnent la Suisse en train. Une fabuleuse opportunité de découvrir les paysages féeriques des différents cantons et vivre au rythme de cette « dolce vita » en version helvétique, délicieusement bucolique et écologique.

Qu’on se le dise ! Réputée pour ses montres, ses banques, ses fromages et autres chocolats, la Suisse est avant tout LE pays des trains. Ils font partie de son ADN et invitent les voyageurs à rejoindre les coins les plus reculés grâce à un maillage de quelque 5 124 km de rails.

C’est d’ailleurs sacrément enthousiasmant de voir ces locomotives tracter des wagons à plus de 3 000 mètres d’altitude, de plonger dans les vallées les plus encaissées et in fine de découvrir des paysages d’une beauté aussi intacte que sauvage d’où émerge invariablement un lac. En sus, les trains helvétiques nous prouvent que la ponctualité du pays n’est pas une légende !

Cerise sur le gâteau, ici, ils ne se contentent pas d’avoir l’un des réseaux ferroviaires les plus denses au monde. Ils possèdent quelques-unes des plus belles « voitures » pour rouler dessus. Parmi ces fleurons, on recense les « panoramiques » à grandes baies vitrées, comme le Bernina Express, le Glacier Express ou le Gotthard Panorama Express, mais aussi les « historiques », à l’image du Centovalli, inauguré il y a tout juste 100 ans après 10 ans d’un chantier chaotique.

Le Swiss Travel Pass (disponible de 3 à 15 jours) invite justement à monter à bord de ces trains mythiques – et même sur un bateau à vapeur sur le lac des Quatre-Cantons – avec l’assurance d’appréhender toute la diversité du pays et d’en prendre plein les mirettes.

Ce n’est pas autre chose que nous avons vécu au départ de Montreux et Vevey, qui ont séduit respectivement Freddie Mercury et Charlie Chaplin, à Saint-Gall, fief de la broderie nationale et d’une abbaye classée à l’Unesco, en passant notamment par Locarno qui nous plonge dans l’ambiance de la Riviera italienne et Lucerne où la reine Victoria avait entraîné l’aristocratie européenne dans son sillage.

Si bien sûr on se voit contraint de passer du français à l’italien et à l’allemand pour échanger avec nos interlocuteurs lors des changements de cantons, le voyage aura pour trait commun l’invitation à baigner dans un environnement et une ambiance engendrant une délicieuse quiétude.

Montreux, le lac vu du ciel

S’étirant le long du lac Léman, Montreux continue de séduire le visiteur à travers la charme désuet de ses hôtels de la fin du XIX^e, celui-là même qui avait fait craquer, en son temps, Freddie Mercury. Et oui, le leader du groupe « Queen » y avait établi ses quartiers et enregistré entre 1979 et 1993 ses plus grands succès.

Niché au cœur du Casino, on peut encore aujourd’hui découvrir ce studio et de nombreux souvenirs, comme des manuscrits originaux de textes de chansons, des instruments et autres tenues de scène.

En embarquant à bord du train à crémaillère, qui vous entraînera aux Rochers de Naye (2 042 mètres) en tout juste 50 minutes, c’est un tout autre univers que vous embrasserez. Au menu : un décor de haute montagne, une vue magnifique sur le lac et les sommets environnants, l’opportunité de randonner sur les différents sentiers et de visiter « La Rambartia » riche de 1 000 espèces alpines, à moins que vous ne préfériez redescendre en ville sur vos pattes. Comptez 2h45 environ !

Locarno, un parfum d’Italie

Avec le lac Majeur en toile de fond et un climat, disons, tempéré par rapport à ses collègues suisses – on peut admirer quelques palmiers – Locarno et ses environs s’imposent comme un site de villégiature par excellence. Ici, tout fleure bon l’Italie… en « version suisse », avec ses ruelles joliment colorées, ses terrasses où l’on se retrouve autour d’un Spritz et bien sûr son lac d’où émergent quelques pépites que l’on investira en bateau. Si on appréciera s’attarder le soir venu à Ascona dont la réputation a depuis longtemps traversé les frontières, difficile de ne pas être bluffé par les îles Brissago.

Ces deux confettis à l’histoire rocambolesque abritent un véritable éden, riche de quelque 2 000 espèces végétales, invitant à un tour du monde des « Méditerranée », aux allures d’ailleurs du jardin du Rayol-Canadel.

La déambulation, forcément parfumée, face aux eaux turquoises scintillant au soleil, est juste magique. On peut la prolonger par une pause gourmande sur la terrasse de la classieuse Villa Emden (isoledibrissago.ti.ch – ouvert jusqu’au 3 novembre).

Le charme de Lucerne

Le trajet pour rejoindre cette cité pittoresque érigée à l’extrémité du lac des Quatre-Cantons assure déjà un époustouflant voyage. Commencé à bord du Gotthard Panorama Express, qui aura notamment traversé un tunnel de 15 kilomètres et proposé un environnement de carte postale, il se poursuivra sur un bateau d’où l’on pourra se laisser aller à la flânerie en contemplant les propriétés « Belles Epoque » qui rivalisent de cachet.

Dès lors, on comprendra aisément les raisons qui ont poussé la reine Victoria à jeter son dévolu et faire de Lucerne l’un de ses lieux de villégiature favoris.

Animée par 80 000 âmes, la ville qui vit pour et par le tourisme, est des plus accueillantes. Au-delà du centre culturel détonnant, imaginé par Jean Nouvel, il suffit de s’attabler à l’une des terrasses dressées au bord de la rivière Reuss, tout à côté des rustiques ponts en bois (dont l’un a été reconstruit à l’identique suite à un incendie), pour s’en convaincre. Et côté festival, la liste est longue comme le bras.

Pilatus, une sacrée expérience

C’est l’attraction incontournable de la région du lac des Quatre-Cantons. Grimper sur le Mont Pilatus, c’est la certitude de faire le plein d’images qui resteront à jamais gravées dans votre mémoire. Et c’est aussi celle de vivre une expérience riche en émotions, que vous optiez pour le téléphérique ou pour le train. Et pourquoi pas expérimenter les deux : la montée par les airs et la descente, sur le chemin de fer à crémaillère le plus raide du monde, avec un déclivité allant jusqu’à 48 %.

Décoiffant… à l’image de la visite du site lui-même situé à « 2 132 mètres au-dessus de la mer » comme l’indique le panneau en suivant la « Galerie du Dragon », en référence à une légende du Moyen âge. Ici, toute la région s’étale à vos pieds et une foule d’activités s’offre à vous. De la randonnée à l’observation des étoiles en passant par celle du lever ou du coucher du soleil et autres (excellentes) expériences culinaires dans l’un des deux hôtels-restaurants aux chambres avec vue, of course ! (pilatus.ch)

Saint-Gall, une pépite de l’Unesco

Son cœur historique est à tomber. Ses façades et ses venelles pavées semblent sorties tout droit de villages érigés en pleine montagne. Quant à ses 111 balcons à encorbellement, plus fastueux les uns que les autres, ils apportent une note incroyablement classieuse à Saint-Gall. Et force est de reconnaître que ces chefs-d’œuvre, conjugués à l’abbaye et à l’ensemble monastique classés à l’Unesco, font de l’ancienne capitale de la broderie un détour à cocher dans tout carnet de voyage.

Imposante avec ses deux tours de style baroque, la cathédrale révèle une décoration inouïe avec notamment des stalles et une grille de chœur d’une grande originalité. Mais c’est incontestablement sa bibliothèque qui s’avère le joyau des lieux. La salle est éblouissante avec ses ornements en style rococo et sa collection de manuscrits, dont certains ont plus de 1000 ans, est en adéquation. Une momie égyptienne de Schepenese, vieille de 2 700 ans et un impressionnant globe terrestre étoffent la découverte (stiftsbezirk.ch).

Le coup de cœur

Chaplin sur ses terres

C’est LE musée de la Riviera vaudoise. Voulu résolument grand public, avec l’ambition de ne trahir ni l’homme ni l’artiste, le musée Chaplin est juste extraordinaire. Aménagé dans le manoir que l’artiste acheta sur les hauteurs de Vevey en 1952 pour en faire sa résidence familiale et y élever ses 8 enfants, il invite dans un premier temps à une expérience immersive à travers les différentes pièces qui regorgent de mobilier, d’objets personnels et de témoignages de la famille.

Puis, après avoir découvert l’homme et la vie de ce grand voyageur, épris d’humanisme et ouvert sur le monde, on rejoint le studio où l’on entame une fabuleuse plongée dans son œuvre.

On découvre les décors et ambiances reconstitués, comme la rue pauvre de Londres où il est né, le salon du barbier juif du « Dictateur », la « cabane » de « La Ruée vers l’Or » qui fait un carton auprès des enfants et autres précieux témoignages, documents, sans parler des statuettes célébrant ses « Oscar ».

À l’évidence un grand moment de bonheur à partager en famille et qui peut se prolonger dans le parc de 5 hectares qui cerne la propriété avec vue sur le Léman (chaplinsworld.com).

Par Sandra Basso