Depuis le 3 juillet, le Mucem propose de découvrir l’exposition « Paradis naturistes » qui plonge les visiteurs dans l’univers du naturisme et de ses communautés à travers plus de 600 œuvres muséales et objets privés.
C’est la première fois en France qu’une exposition de cette ampleur est consacrée à l’histoire du naturisme. Le Mucem propose une plongée dans cet univers sur 500 m2 d’espace dédié, scénographié par l’agence Trafik. « On a tous des préjugés à ce sujet, on souhaitait les retirer de la tête des visiteurs, » explique Pierre-Olivier Costa, le président du musée.
Six commissaires d’exposition ont travaillé durant trois ans sur ce projet social d’ampleur en allant à la rencontre de nombreuses communautés naturistes. Ils ont ainsi pu rassembler des photographies, des revues, des peintures, des objets du quotidien… autant de pièces à découvrir provenant d’archives privées et publiques françaises et suisses. De nombreuses maquettes, sculptures et formats vidéos illustrent également ce projet d’envergure.
Lorsque le visiteur entre dans la salle du rez-de-chaussée, il découvre un glossaire, une carte référençant les camps naturistes de France ainsi qu’un mur de revues consacrées au sujet. Un mystérieux rideau, orné d’un immense soleil noir et blanc, le sépare du reste de l’exposition. Quand on le tire, c’est un espace non cloisonné qui accueille le public, offrant ainsi un aperçu de l’ensemble de la visite.
« Le naturisme, c’est aussi une façon de penser »
Le thème de l’exposition peut sembler surprenant et faire sourire. Il a en réalité permis une véritable réflexion sociologique et anthropologique sur la naissance de cette pratique populaire et son évolution dans le temps. « Après le Covid, nous avons remarqué une résurgence des questionnements sur notre rapport au corps et à la nature. Certains ont ainsi modifié leurs habitudes de vie. Le naturisme, ce n’est pas juste une façon de se dévêtir, mais aussi une façon de penser. Le Mucem est un musée de société, nous avions donc envie d’aborder ces thématiques du rapport au corps, » étaye le président.
« Paradis naturiste » a été pensé en trois sections : Aux sources du naturisme, Les naturismes en communautés et Les nudités contemporaines. Le parcours suit chronologiquement l’histoire de cette pratique depuis son étymologie en 1768, dans les écrits du médecin Théophile de Bordeu, jusqu’à la construction de communautés organisés et la naissance de lieux dédiés.
Si à l’origine cette pratique s’accompagne d’une vision hygiéniste, prônant le retour à la nature et le végétarisme, la pratique se démocratise et touche la classe populaire en 1936 grâce aux congés payés. « Le Front Populaire avait permis à un certain nombre de personnes, bénéficiant des congés payés, de se rendre dans des campings en pratiquant la nudité. Un certain naturisme populaire est né et malgré des interdits, ils allaient pratiquer dans des clubs structurés », décrit Bernard Andrieu, philosophe et professeur au sein de l’institut des sciences du sport et de la santé de l’université Paris Cité.
« Marseille, capitale du naturisme »
Cinq focus sur des thématiques, telles que le Music Hall ou le Bronzage, ponctuent également l’exposition. L’un d’eux est consacré à la cité phocéenne. Les Naturistes de Provence est une association créée en 1930 à Marseille. Elle est l’une des premières du genre en France.
« La mairie de Marseille accepte que les membres de cette communauté se regroupent sur l’Île de Ratonneau à l’hôpital Caroline. La documentation sur cette période est en majorité fournie par les communautés internationales, et notamment des Suisses », explique Amélie Lavin, conservatrice en chef au Mucem. Un numéro spécial datant de 1930, de la revue suisse Die neue Zeit, titre même « Marseille, capitale du naturisme ».
L’ultime section de ce voyage au « Paradis des naturistes » questionne les Nudités contemporaines. Être nus dans l’espace public est un geste considéré comme délétère et assimilé à de l’exhibitionnisme sexuel. Certains naturistes militent donc pour obtenir le droit d’être nus dans des espaces publics de la vie quotidienne, tel que des lieux culturels.
L’exposition propose donc une ouverture sur le corps, utilisé comme outil politique. La richesse des archives et les nombreux textes explicatifs permettent une réelle immersion pour les visiteurs, loin des clichés. Rendez-vous au Mucem jusqu’au 9 décembre pour découvrir l’univers méconnu du naturisme.
Du mercredi 3 juillet 2024 au lundi 9 décembre 2024
Mucem – Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée
1 Esplanade du J4, 13002 Marseille
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