L’Hôtel de Cabre, plus vieille maison de Marseille, va se refaire une beauté. Cet été, sa façade classée aux monuments historiques va être soigneusement restaurée par des experts du patrimoine.
Comme une vieille dame, élégante et chargée d’histoire, elle surveille le Vieux-Port depuis 1535. À l’angle de la rue de la Bonneterie et de la Grande rue (2e), la plus ancienne maison de Marseille, aussi appelée « l’Hôtel de Cabre » ou « la Maison de l’Échevin de Cabre », va être rénovée par un tissu d’experts du patrimoine à partir de cet été.
La restauration d’un tel monument nécessite une enveloppe d’un million d’euros. Soit le même montant que le bâtiment en lui-même, racheté par trois copropriétaires en juin 2023. Ces deux opérations sont gérées par Rise, une filiale du promoteur Real promotion, spécialisée dans le renouvellement urbain.
« Nous avons rencontré la Ville, notamment Éric Mery (conseiller spécial à l’urbanisme) qui a été très vigilant sur la qualité de notre projet », assure le responsable de l’opération Ludovic Herrero. Son agence a confié tout le volet de la restauration à Archigem, un cabinet marseillais spécialisé.
« Redonner du lustre au bâtiment »
La Ville a depuis donné son accord, à l’instar d’autres acteurs publics qui interviennent dans ce type de dossier. Pour cause, la façade du bâtiment, classée aux monuments historiques en 1941, nécessite le plus grand soin. « Des études ont été réalisées sur les pierres par le cabinet Noas. Ils ont fait les relevés en 3D au millimètre près », reprend le promoteur.
Tous les travaux effectués sur la pierre et la menuiserie de l’Hôtel de Cabre devront être échantillonnés puis vérifiés par la Direction régionale des affaires culturelles (Drac). « Nous allons redonner au bâtiment le lustre qu’il mérite », lance confiant Claudio Ceresatto, architecte du cabinet Archigem.
L’intérieur de la maison bourgeoise est, quant à lui, inscrit au titre des monuments historiques. Cette réglementation moins contraignante demande tout de même une rénovation méticuleuse des poutres et des fresques. Les appartements devront subir une rénovation énergétique car ils sont classés en DPE G. La plus mauvaise note de ce diagnostic de performance énergétique, c’est-à-dire qu’il s’agit de véritables passoires thermiques.
Une histoire rocambolesque
Rise a également confié une étude historique à la doctorante en histoire de l’art, Inès Castaldo. Pendant ses recherches, l’experte a d’ailleurs fait une découverte surprenante. Un « prixfait » (ancien acte notarial de travaux) montrant que « le bâtiment n’était en fait que la moitié d’un ensemble de deux maisons autrefois reliées par une passerelle ».
Cette découverte enrichit l’histoire épique de l’Hôtel de Cabre, construit en 1535 par le second consul de Marseille Louis de Cabre. L’édifice de style renaissance, avec ses vitraux et ses gargouilles, est l’un des seuls bâtiments ayant survécu aux destructions des Allemands en 1943 pendant la rafle de Marseille.
Quelques années plus tard, en 1954, la Ville en reconstruction, envisage de détruire l’édifice à cause de son emplacement gênant. Mais sous la pression de notables marseillais, le monument lourd de 650 tonnes sera déplacé de quelques mètres. Puis tourné à 90° pour trouver sa place actuelle. Une prouesse technique !
Conserver la même vocation
En 2021, la plus vieille demeure de Marseille a connu un énième rebondissement avec une mise en vente à 1,2 million d’euros sur Le Bon coin. Mais aujourd’hui, elle semble tirée d’affaire et peut se préparer à passer sous le bistouri.
La vieille dame de 230 m2 conservera la même vocation. Au rez-de-chaussée, elle abritera toujours un salon de coiffure de 50 m2 installé dans les lieux depuis 1999. Les trois étages seront également répartis en quatre appartements : trois de 52 m2 et un de 24 m2.
Les hébergements atypiques resteront du locatif en résidence principale. En effet, c’est une condition imposée par le dispositif de l’État lié aux monuments historiques permettant aux investisseurs de défiscaliser une partie du montant des travaux.
Ces derniers devraient commencer d’ici cet été, pour une livraison de la façade mi-2025. « Nous voulons sélectionner les entreprises spécialisées à la mi-juin », assure Ludovic Herrero. Il est aujourd’hui sous les feux de la rampe, puisqu’il s’apprête à livrer un ancien bâtiment de 26 logements sur le domaine Hippone à Saint-Just (13e).