L’humoriste marseillais Redouane Bougheraba va se produire le 22 juin prochain, avec son nouveau one-man-show On m’appelle Orange-Vélodrome, au cœur de l’enceinte mythique. Rencontre.
Survet’ OM-Puma, baskets, c’est au Stade Vélodrome que Redouane Bougheraba nous reçoit. Après Beyoncé, Jul… Lui sera le premier humoriste à régaler les spectateurs avec son bagout et ses sketches impertinents, le 22 juin 2024 dans le temple du football marseillais.
L’enfant du quartier du Panier, qui a tenu pendant quelque temps un cybercafé, rue Sainte, a débuté la scène il y a seulement quelques années. Star du stand-up, l’artiste excelle dans l’art du monologue comique. Une marque de fabrique qui fait de chacune de ses représentations un spectacle unique.
Après le succès de son one-man-show On m’appelle Marseille, Redouane Bougheraba prépare On m’appelle Orange-Vélodrome, pour lequel il promet déjà à ses plus fervents supporters et ceux qui souhaitent le découvrir « un moment historique. On est parti pour faire un beau show, pour que le public passe le meilleur moment de sa vie ».
Vous avez grandi dans le quartier du Panier, à Marseille. Comment était votre enfance ?
C’est l’un des plus vieux quartiers de Marseille. J’ai eu une enfance heureuse dans une famille nombreuse et aimante. J’ai eu une très belle éducation. Sévère, mais on n’a manqué de rien. J’ai toujours eu à manger sur la table, le frigo toujours plein. Dire que je sors des favelas de Marseille, c’est mentir. Mes parents nous ont mis dans de bonnes écoles. J’ai d’ailleurs fait ma scolarité à Colbert, ensuite François-Moisson. J’ai été à l’école catholique Notre-Dame de la Major, rue des Accoules, lycée Victor-Hugo-Saint-Charles et la fac à Colbert et à Aix-en-Provence, en langues. Après je suis parti en Angleterre pendant un an pour apprendre l’anglais. Je suis rentré. J’ai bossé, et j’ai démarré l’humour très, très tard.
Vous avez toujours eu un penchant naturel pour les vannes et la moquerie ?
Oui, oui. Ça a commencé à l’école, en fait, avec des caricatures. Je dessinais mes camarades, ça les faisait beaucoup rire. Ils se les passaient jusqu’à ce que ça arrive aux mains de la prof qui confisquait et qui se mettait à rire parce que la caricature était criante de vérité. C’est la première étape de l’humour, parce que je me suis dit : ‘ah, on peut faire rire les gens. Se faire accepter en faisant des blagues dessinées’. Après, j’ai ajouté de la parole à ces dessins. C’est la continuité de la caricature, charrier, des blagues, le clash, le roast… et ça a toujours fonctionné pour moi.
‘Oh, le Dôme est trop petit, il faut que tu fasses le Vélodrome‘
C’est ce qui vous a donné envie de vous lancer dans une carrière d’humoriste ? Particulièrement dans le stand-up ?
C’est plutôt des proches, des amis, mon frère, qui m’ont dit : ‘tu nous fais beaucoup rire dans la vie, ça serait bien que tu essaies de monter sur scène, que tu te mettes en représentation, parce que t’es en représentation constante. Partout où t’es, tu fais le saltimbanque, ça serait bien que tu gagnes ta vie’ (rires). Du coup, je suis passé professionnel. Et j’ai très bien gagné ma vie. J’en suis ravi.
Vous vous souvenez de votre première scène ? Votre premier sketch ?
Oui. J’ai fait la première partie du spectacle de mon frère pour essayer, au théâtre de l’Antidote (Marseille). Et après j’ai fait la première partie de Grand Corps Malade, à l’Espace Julien. Il a cru en moi alors que je n’étais pas pro. C’était un sketch qui s’appelait Prison Brick, une parodie de la série Prison Break. Et brick, parce que c’est un plat oriental : feuilles de brick, viande hachée, cholestérol (rires).
Et vos premiers pas au Jamel Comedy Club ? Qu’est-ce que cette expérience vous a apporté ?
Ça m’a permis de jouer avec d’autres camarades, faire des rencontres… C’est un passage, pas une destination. J’ai aussi fait le Paname Art Café et plein de comedy clubs à Paris. Tous ces comedy clubs m’ont permis de me renforcer et justement de gagner en expérience.
Pour moi la vraie reconnaissance que j’ai, c’est celle du public, de jouer devant une salle qui affiche complet.
On vous surnomme souvent le « prince du stand-up ». Comment le prenez-vous ?
Quand vous dites « prince », j’ai l’impression d’être Faudel (rires). Comparez-moi à Cheb Khaled, dites-moi le roi ! (rires). Le prince, le vicomte, l’archiduc, n’importe quel titre, je prends.
Je me sens libre. Je me sens heureux. C’est une véritable thérapie pour moi et pour le spectateur.
C’est quand même gratifiant…
C’est gratifiant, mais pour moi la vraie reconnaissance que j’ai, c’est celle du public, de jouer devant une salle qui affiche complet. Je ne cours pas après les distinctions, les titres. Ma satisfaction, c’est de remplir des salles et de les éclater. C’est de jouer devant des gens et de recevoir des messages derrière comme : ‘voilà, je suis malade, j’ai vu vos vidéos sur YouTube, sur Insta, sur Facebook… J’étais hospitalisé, mais maintenant je passe un super bon moment. Ça m’a permis de rendre plus facile mon hospitalisation’. Ce sont des messages comme ça qui me font kiffer. C’est ça qui me met du baume au cœur.
Qu’est-ce que vous ressentez quand vous êtes sur scène ?
Je me sens libre. Je me sens heureux. C’est une véritable thérapie pour moi et pour le spectateur. J’essaie de donner le meilleur de moi et ça passe super vite. Je sais que lorsque je fais rire les gens, ça déclenche une adrénaline en moi qui me fait beaucoup de bien. Donc, je suis toujours à la recherche de cette adrénaline. C’est pour ça que je fais beaucoup de représentations dans l’année.
Comme un sportif de haut niveau ?
Exactement… qui cherche son équilibre.
Et vous faites du sport ?
Je fais un petit peu de padel, à Aix, chez Zizou au Z5. Sinon à Paris, à Casa Padel, ou à Londres des fois. Dès que je peux, en fait.
Je ne vais pas tout vous dire, il faudra venir. Je vous promets des barres de rires.
On ne sait jamais à quoi s’attendre dans vos spectacles, mais pouvez-vous nous en dire un peu plus sur le nouveau one-man-show que vous allez jouer au stade Vélodrome le 22 juin prochain ?
Ce que je vais faire au stade Vélodrome, c’est un spectacle inédit qui s’appelle On m’appelle Orange-Vélodrome. De nouveaux sketches, beaucoup d’improvisation, des guests, des invités, beaucoup de Marseillais… mais je ne vais pas tout vous dire, il faudra venir. Je vous promets des barres de rire. Il y aura une scène centrale avec des écrans géants comme pour mon dernier spectacle On m’appelle Marseille. Je serai comme dans un ring au milieu de l’arène. Et il y aura 60 000 personnes autour de moi. Ça va être un moment historique.
Historique justement, parce que vous êtes le premier humoriste à vous produire au stade Vélodrome. C’était d’ailleurs un rêve pour vous ?
C’est un rêve d’adulte. Parce qu’enfant, je ne me suis jamais projeté, je ne pensais pas qu’un jour je ferais le stade. J’avais des milliers de lieux dans mon esprit. À force de faire de grandes salles, trois Dômes à Marseille, à un moment on m’a dit : ‘oh, le Dôme est trop petit, il faut que tu fasses le Vélodrome‘. On a pris le Vélodrome, et on ne s’est pas trompé, ça se remplit bien, on est parti pour faire un beau show, pour que le public passe le meilleur moment de sa vie.
Comment écrivez-vous vos spectacles ? Est-ce que vous travaillez seul ?
J’écris seul. Je m’inspire beaucoup de la vie de tous les jours. J’ai des voice-notes. Je m’enregistre beaucoup au téléphone et après j’essaie face au public. Pour ce spectacle, je vais être en rodage à Paris dans un petit théâtre pendant 20 soirs, justement pour garder le meilleur et le donner ici au Vélodrome.
Dans vos one-man-shows, vous vous permettez beaucoup de choses. Les Juifs, les Kabyles, les « renois », les « rebeus », les gros, les chauves… Est-ce que vous pensez qu’en 2024 on peut encore et on doit encore savoir rire de tout ?
On doit rire de tout, on peut rire de tout, mais pas avec n’importe qui. L’adage est toujours d’actualité. Les premiers rangs de mon spectacle savent à quoi s’attendre. Ils ont souvent acheté les places un an à l’avance. Du coup, ils viennent pour ça. Moi j’ai eu beaucoup de plaintes, comme quoi j’avais pas vanné des gens au premier rang. ‘Ouais, je me suis mis au premier rang, je suis déçu, tu m’en as pas mis une dans la tête, c’est pas sympa’. Ils attendent ça, ils aiment ça et j’essaie de pas les décevoir.
On ne peut pas trouver plus que la scène. C’est comme l’amour des enfants, on ne peut pas trouver plus. C’est un amour inconditionnel.
Mais ça vous vient tout de suite, comme ça ?
Ouais, c’est du tac au tac, c’est pas calculé, pas prémédité et c’est pour ça que c’est jamais la même chose. Y’a plus de onze heures d’improvisation sur YouTube, c’est jamais les mêmes personnes, jamais les mêmes prénoms. On essaie à chaque fois d’être original et de trouver des trucs comme ça ! (il fait claquer ses doigts).
Après le stade Vélodrome, sur quels projets allez-vous vous concentrer ?
Faire tous les autres stades (rires). Non, on va prendre le virage Sud vers le cinéma, et on reviendra à la scène plus tard.
Un projet est en cours d’ailleurs…
J’ai écrit un rôle. Mon premier rôle dans un film qui s’appelle Délocalisé. C’est l’histoire d’un ouvrier qui travaille dans une usine de matelas qui se retrouve délocalisée en Inde. Il ne veut pas perdre son travail, donc il choisit la politique de reclassement, mais son salaire est indexé en roupies, donc c’est la descente aux enfers. Y’avait Un Indien dans la ville, maintenant c’est un Français en Inde. On tourne en février et ça sort en fin d’année.
Je suis aussi actuellement au cinéma dans le film Les SEGPA au ski [réalisé par ses frères Hakim et Ali, ndlr]. Je joue le rôle de Philippe, un ancien patineur professionnel devenu gardien de patinoire et je suis aussi dans LOL (diffusion à partir du 16 février, aux côtés de Jérôme Commandeur, Audrey Lamy, Alison Wheeler, McFly et Carlito…).
Qu’est-ce qui vous séduit dans le cinéma ?
Le cinéma, ça m’apporte quelque chose de différent. C’est complémentaire. C’est un vrai kiff, parce qu’on joue un personnage, on transmet des émotions à distance à un autre moment. Le spectacle vivant, c’est humain et direct-live. Tu viens, tu prends ton shot d’adrénaline. Le cinéma, tu tournes et tu vas rigoler dans un an dans une salle de cinéma et à travers l’écran tu vas transmettre des émotions. On ne peut pas trouver plus que la scène. C’est comme l’amour des enfants, on ne peut pas trouver plus. C’est un amour inconditionnel.