Depuis trois générations, la famille Luciani perpétue l’art de la torréfaction artisanale dans son atelier du quartier Saint-Just dans le 13e arrondissement de Marseille.

Chaque matin, du lundi au vendredi, les arômes envoûtants du café fraîchement torréfié embaument l’air aux environs du boulevard Alphonse Moutte, dans le 13e arrondissement. Derrière la discrète façade carrelée du numéro 6 se cache la plus ancienne brûlerie artisanale de Marseille encore en activité.

Voilà trois générations que le café coule dans les veines de la famille Luciani. En 1965, Pierre Luciani, surnommé Babòne (grand-père en corse), réparateur de machines à café, rachète la Maison Escudier, une entreprise de torréfaction fondée en 1863.

En effet, le second empire et les années d’avant-guerre marquent l’apogée de l’industrie à Marseille. Les grains de café vert sont alors transportés de par le monde jusqu’au Vieux-Port, d’où ils sont acheminés vers les quelque 80 ateliers de torréfaction que compte alors la cité phocéenne.

« Le café, j’ai baigné dedans depuis tout petit », se souvient André Luciani, le fils de Pierre, qui a repris les rênes de l’entreprise familiale en 1986. D’abord formé à l’entretien des machines à café, il se souvient des étés passés à donner un coup de main pour les livraisons en mobylette.

Son fils cadet, Jean-Baptiste, a rejoint l’aventure il y a six ans. Ensemble, ils perpétuent la passion du bon café. Mais surtout, un savoir-faire et une production artisanale, qui privilégie la qualité à la quantité.

« Produire mieux plutôt que de produire plus »

L’entreprise a fait de cette philosophie son credo, inscrit fièrement sur un mur de la cour intérieure de l’atelier et sur les paquets de café : « C’est parce que je me sens responsable des produits que vous consommez que j’ai choisi de produire mieux plutôt que de produire plus », aime à répéter André Luciani.

À gauche du petit atelier, une imposante machine rouge vif de la marque Vittoria chauffe les grains de café vert à 200 degrés, jusqu’à obtenir une teinte marron claire, la fameuse « robe de moine ». « La même qu’à Milan, où les cafés sont moins foncés que dans le Sud de l’Italie », précise André.

Chaque étape du processus est minutieusement supervisée par Frédéric Vahanian, torréfacteur chevronné depuis trente ans. Dès que les grains atteignent la bonne couleur, il ouvre la porte du four en fonte pour les relâcher dans le bac de refroidissement. Ils passent ensuite par un épierreur, puis sont stockés dans des silos pendant deux à trois jours pour « dégazer » et révéler pleinement leurs parfums.

café, Vidéo | Dans les coulisses du plus ancien atelier de torréfaction de Marseille, Made in Marseille Le torréfacteur Frédéric Vahanian vérifie la couleur des grains de café

L’Impérial, un mélange emblématique

Le café est torréfié à la commande, à raison de 80 tonnes par an environ, avant d’être livré en circuit court dans des épiceries fines, bars, hôtels et restaurants. « Comme nous n’avons pas de stock, il y a un délai très bref entre la fabrication et la vente du produit au client, explique André Luciani. Vous avez donc une fraîcheur essentielle pour faire ressortir les meilleurs arômes du café ».

Les différents mélanges et grains d’origines pures sont également vendus sur place, au détail, dans leurs emballages striés de bandes blanches et or. André Luciani revendique sa préférence pour « les cafés arabica d’Amérique centrale, pour leur goût doux et mielleux ».

C’est par ailleurs un café 100% arabica qui est devenu, au fil des années, le mélange emblématique de la marque. Fleuri et fruité, l‘Impérial, créé par Pierre Luciani en 1960, est notamment dégusté à la table du Petit Nice Passedat.

café, Vidéo | Dans les coulisses du plus ancien atelier de torréfaction de Marseille, Made in Marseille

La relève

En charge du développement commercial de la marque, son petit-fils Jean-Baptiste, 25 ans, ne cherche pas à moderniser l’entreprise. Mais plutôt à « adapter le savoir-faire et l’image, à l’attente des clients et des enjeux d’aujourd’hui », en conciliant « écologie et artisanat » avec « de la réactivité et des prix intéressants ».

« Aujourd’hui, on arrive à avoir du volume tout en étant artisanaux, se réjouit-il. C’est la période actuelle qui veut que tout le monde s’intéresse aux artisans. Tout le monde a envie que le produit qu’il consomme soit fait pas loin de chez soi. Ça, ça nous a aidés énormément aussi ».

Si la marque, élevée au rang d’institution locale, a su s’adapter aux exigences contemporaines, c’est car elle prône, depuis sa création, une éthique dans l’élaboration d’un produit de qualité, à contre-sens de l’esprit de sur-consommation qui régnait il y a encore vingt ou trente ans.

« Je n’ai pas honte d’avoir gagné moins d’argent que mes confrères, appuie André Luciani, parce que moi, je ne supportais pas de mettre un mauvais produit. J’ai été élevé comme ça : on allait chez le bon boucher, chez le bon boulanger, et on achetait le bon café aussi ».

« Quand on a son nom sur un produit qu’on fait, il y a un lien particulier qui se crée, conclut-il. Donc, je suis ravi que ça continue ! ».

Informations pratiques

Café Luciani
6 boulevard Alphonse Moutte, Marseille (3e)
Ouvert du lundi au vendredi de 8h30 à 12h30

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