Après 20 ans de tergiversations, la dépollution des scories industrielles du littoral Sud de Marseille, dans les calanques, devrait enfin débuter. Les pouvoirs publics souhaitent traiter 20 sites d’ici 2026 pour 14 millions d’euros.

À l’heure où les Calanques sont devenues un parc national protégé, il est difficile d’imaginer qu’il y a deux siècles la société avait décidé, au contraire, de sacrifier cet espace naturel, léguant une complexe dépollution aux générations futures.

En 1810, alors que l’industrie chimique se développe, Napoléon décide par décret d’écarter ces activités polluantes loin des habitants. Les autorités locales marseillaises ciblent alors les calanques, faiblement peuplées, à l’extrême Sud de la Ville. Des usines de soude, de plomb, de soufre s’installent du côté de Saména, des Goudes, Callelongue, Montredon, l’Escalette, Sormiou…

Elles tournent à plein régime durant des décennies, laissant en héritage une pollution chimique lourde. Arsenic, plomb, mercure, cadmium, antimoine… Malgré quelques dépollutions à la marge, les « scories » jonchent toujours le littoral Sud, de la Madrague de Montredon aux Goudes.

La facture a quadruplé en 10 ans

Alors que métaux lourds et autres poisons contaminent la végétation et l’eau par érosion, les nombreux baigneurs, pêcheurs et promeneurs ne semblent pas inquiets. Du côté des pouvoirs publics, voilà 20 ans qu’ils ont pris conscience du problème. En 2005, l’institut de veille sanitaire alertait sur les risques « pour les enfants et les adultes ».

Il a fallu attendre 2012 pour que l’agence de l’environnement, l’Ademe, lance une mission pour traiter ce sujet. Mise en sommeil en 2016, comme le retrace Marsactu, elle n’a abouti à rien. Jusqu’à aujourd’hui. Le dernier conseil municipal de Marseille, fin octobre, semble acter la relance du projet de dépollution.

dépollution, La dépollution du littoral Sud de Marseille coûtera 14 millions d’euros, Made in Marseille
Les plagistes sous le crassier industriel de Legré Mante, à la Madrague de Montredon. Ce site est l’objet d’un projet privé immobilier et de dépollution.

La municipalité a voté sa participation à hauteur de 2 millions d’euros dans ce chantier, soit le double de ce qu’elle devait investir à l’origine. Car, en s’éternisant, l’opération a vu sa facture quadrupler depuis 2015. Elle était alors chiffrée à 3 millions d’euros, contre 14 aujourd’hui. « Mauvaises études au départ, interventions oubliées, augmentation des coûts, notamment des matières premières… », énumère l’adjoint au littoral, Hervé Menchon.

Ainsi, toutes les institutions participantes ont augmenté leur participation. La Métropole Aix-Marseille-Provence investit 1,5 million d’euros, le Département 3,4 millions, et l’État 6,6 millions. Soit 13,5 millions d’euros au total. Restait donc à trouver 500 000 euros, que l’État s’est finalement décidé à financer ces derniers jours, nous confie-t-on du côté de la Ville de Marseille*.

La Région Sud ne souhaite pas participer, estimant que le projet « ne rentre pas dans son cadre d’intervention ». C’est ce que nous confie Hervé Menchon, et ce que précisait la Région à La Marseillaise.

Dépolluer 20 sites d’ici 2026

Le chantier ne doit ainsi débuter entre fin 2024 et 2025 pour se terminer au printemps 2026. Il vise à traiter 20 sites jugés les plus sensibles.

Les méthodes varient selon les zones : excavation pour certaines, confinement par géotextile ou chape de béton pour les autres. « C’est loin d’être la totalité des sites pollués du littoral Sud, estime l’élu municipal. Mais ce sont les sites les plus sensibles et les plus fréquentés ».

Justement, la Ville demande à l’Ademe de prioriser le traitement de la plage de Saména, site qui attire « beaucoup de baigneurs, de fêtes et de barbecues. Une urgence dans l’urgence », juge l’adjoint.

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Il évoque un autre point d’accroche avec l’Ademe : le choix de confiner les scories au niveau du rond-point de Callelongue avec une coque en béton sculptée pour imiter la roche calcaire. « Des questions demeurent sur l’impact carbone de cette solution en béton, son impact sur la flore protégée, sa durabilité face à la montée des eaux et l’érosion, sur l’entretien et la pérennité de cet ouvrage ».

En espérant que ces questions aboutissent rapidement, afin que l’on résolve enfin ce paradoxe : pouvoir se baigner et se promener dans le Parc national des Calanques sans craindre pour sa santé.

* : Mise à jour lundi 30 octobre à 10 h, alors que des sources municipales nous informent que le financement est bouclé.

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