Le quartier du Panier, connu pour être le plus ancien à Marseille, abrite un trésor caché de tous : les caves de Saint-Sauveur. Des centaines d’années ont été nécessaires pour percer une partie du mystère de ce monument méconnu des touristes et même des Marseillais.

C’est sur la place de Lenche, la plus ancienne de Marseille, que se trouvent les caves Saint-Sauveur. Ou plutôt en dessous. Car d’extérieur, aucun stigmates ou traces ne laissent supposer la présence de vestiges antiques à cet endroit du quartier du Panier.

Saint-Sauveur, À la découverte des caves de Saint-Sauveur, trésor oublié des Marseillais, Made in Marseille
L’agora grecque à l’antiquité

L’hypothèse de vestiges romains longtemps soupçonnée

Ces caves, baptisées « Saint-Sauveur » puisque le couvent des religieuses de Saint-Sauveur se trouvait auparavant au-dessus, ont été signalées pour la première fois par l’historien Louis Antoine de Ruffi au 17ème siècle dans son ouvrage « Histoire de la ville de Marseille » (1696). À l’intérieur, il y fait état de neuf grottes souterraines situées sous l’abbaye des Religieuses de Saint-Sauveur mais au niveau des rues inférieures qui vont vers le port. À cette époque, on ne sait pas à quoi elles servaient mais la présence d’un mortier étanche pour lier les différents blocs laissent penser à Ruffi qu’elles ont pu contenir de l’eau. L’historien suppose alors qu’elles datent de l’époque romaine.

Un siècle plus tard, un autre historien du nom de Jean-Baptiste Grosson se rend dans les caves et fait état de ses découvertes dans son ouvrage « Recueil des antiquités et monuments marseillais qui peuvent intéresser l’histoire et l’art ». On en apprend alors un peu plus sur les caves de Saint-Sauveur. D’abord, les « neuf grottes » de Ruffi sont en réalité sept salles voûtées. Il y voit également d’autres indices qui confirment la présence d’eau anciennement dans le monument notamment un aqueduc. Lui aussi laisse penser qu’elles remonteraient à l’époque romaine.

Un monument classé puis tombé aux oubliettes

Il faut encore attendre un siècle de plus pour que les caves de Saint-Sauveur soit classée monument historique en 1841. Déjà à cette époque, l’édifice a été réduit puisque, après la vente du couvent par les religieuses, deux des salles avaient été détruites, remplacées par des maisons sur la place de Lenche. Si on en apprend plus à cette époque sur les dimensions des salles – dix mètres sur cinq et huit mètres de haut tout de même ! – on ne sait toujours pas à quoi elles ont servi ni de quand elles datent.

S’en suit alors de longues années et décennies où personne ne s’intéresse aux caves de Saint-Sauveur. Pire même, c’est presque comme si elles étaient tombées dans l’oubli. Après la destruction des vieux quartiers de Marseille pendant la Seconde Guerre mondiale où les caves de Saint-Sauveur ont été partiellement démolies, elles ont été comblées de gravats à la reconstruction de cette zone et recouvertes par l’escalier qui mène de la place de Lenche au Vieux-Port. Ce n’est qu’en 1977 qu’une réelle avancée sur l’histoire de ces caves sort à la lumière du jour.

Mystère (presque) résolu

Au cours des années 1970, pendant des travaux destinés à creuser une tranchée pour la pose d’une canalisation d’eau, la voûte des caves est percée et révèle alors d’énorme blocs de calcaire rose. Les mêmes que ceux du Jardin des Vestiges découverts en 1967 à l’occasion de la construction du Centre Bourse avec les mêmes caractéristiques ! La datation des caves peut alors être établie avec certitude : 2ème siècle avant JC, sous l’ère grec et non romaine. D’autres éléments trouvés sur place comme des restes d’amphores et des céramiques confirment cette datation.

S’il est difficile aujourd’hui d’interpréter dans le détail le fonctionnement de ce site, l’interprétation la plus probable de ces caves est qu’elles servaient de citerne pour recueillir les eaux de ruissellement provenant de la butte Saint-Laurent à l’ouest et de la butte des Moulins à l’est. Situées sous le dallage d’une grande place publique, ces caves constituaient une formidable réserve d’eau intramuros qui permettait à la ville de soutenir un long siège sans connaître de pénurie. La configuration du monument confirme même cette hypothèse : les différentes salles permettaient en effet de compartimenter les réserves en cas de fuite et éviter ainsi de perdre toute les quantités.

Pour certains, les caves de Saint-Sauveur font parties des citernes « les plus remarquables du monde antique par leurs dimensions, l’originalité de leur plan et l’emploi audacieux de la voûte ». Malgré cette richesse, beaucoup de Marseillais ignorent encore l’existence d’un tel monument sous leur pied au cœur même d’un des quartiers les plus fréquentés de leur ville.

Par Agathe Perrier

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