Food-court méditerranéen, restaurant d’application, ressourcerie… La grande cheffe Meryem Cherkaoui, accompagnée des fondateurs du République, investit l’ancienne bijouterie Piery sur la Canebière pour y lancer la Maison de la Méditerranée. Découverte d’un projet qui place les femmes et l’inclusion sociale au cœur.
C’est un concept original. Le premier grand projet à impact, marquant le renouveau de la Canebière. Le chef Sébastien Richard (Le République) associé à la cheffe Meryem Cherkaoui (La Maison du Gourmet) ont décroché l’appel à projets lancé par la Ville de Marseille pour investir les locaux de l’ancienne bijouterie Piery sur la Canebière, et y créer la Maison de la Méditerranée.
Symbole de la dévitalisation commerciale de l’artère centrale de Marseille, cette enseigne historique de la Canebière avait fermé ses portes en 2021. Dans le cadre de sa politique de reconquête de cette voie mythique marseillaise et de la diversification des activités commerciales, la municipalité était parvenue à une collaboration inédite avec le propriétaire des lieux, Joseph Malka.
Le deal ? La municipalité a signé un bail de six mois, renouvelable une fois, et pourra choisir le futur commerce. Un appel à projets a ainsi été lancé le 24 mai 2022 pour trouver un nouveau locataire. L’adjointe au commerce Rebecca Bernardi estimait d’ailleurs le site idéal pour y voir s’implanter une activité de restauration.
La Ville a tranché en faveur de la création de la Maison de la Méditerranée. Les fondateurs du restaurant solidaire Le République et la célèbre cheffe marocaine Meryem Cherkaoui ont imaginé un lieu de partage autour de recettes traditionnelles et familiales du bassin méditerranéen dans un établissement entièrement éco-conçu et dédié à 100% à l’emploi des femmes via l’insertion professionnelle. Un projet qui porte « les marqueurs forts de la ville », estime Rebecca Bernardi.
Deux étages pour un voyage culinaire en Méditerranée
Si le projet a enthousiasmé le service commerce, « il a surtout séduit le propriétaire, ajoute l’élue. Cette donnée-là est très importante dans l’année qui vient de s’écouler, avec les nombreuses visites qui ont eu lieu. On est évidemment très content, car c’est tout ce qu’on espérait avec ce restaurant inclusif, ouvert sur le monde, sur l’environnement, avec à sa tête une femme formidable avec une très belle carrière, très généreuse et qui a furieusement envie d’être sur la Canebière ».
Les 600 m2 seront répartis en deux parties. Le rez-de-chaussée avec sa terrasse de 140 m2 d’une centaine de places sera dédié à un food-court méditerranéen. Cet espace proposera un voyage sur les rives de la Méditerranée, autour d’une cuisine simple et familiale, iodée et végétale. « En bas, on envisage de faire du snacking, sur-place et à emporter, avec plusieurs offres et un ticket moyen de 7 à 18 euros, nous explique le chef Sébastien Richard. Ce sera bon enfant pour que les gens puissent se servir et partager ».
La cuisine sera non seulement élaborée avec des produits exclusivement du terroir local, mais aussi par une équipe uniquement composée de femmes, dont 50% en parcours d’insertion. « D’ailleurs, j’aimerais qu’on puisse les voir travailler en cuisine, et qu’on puisse faire, par exemple, un plat libanais le lundi, marocain le mardi… Tout tournera autour de la Méditerranée », du rez-de-chaussée à l’étage où devrait prendre place une brasserie de plus haut standing d’une capacité de 40 places.
Ici, dans un espace plus intimiste, germe l’idée de lancer un concept autour du couscous haut-de-gamme, « mais on réfléchit pourquoi pas à l’idée de faire des tapas méditerranéens », nous glisse avec le sourire Meryem Cherkaoui. C’est elle qui sera aux manettes de cet établissement novateur. Pour incarner ce projet, et comme un trait d’union avec la Méditerranée, travailler avec la grande cheffe marocaine était une évidence pour les fondateurs du République.
Une figure de la gastronomie méditerranéenne aux commandes
Très impliquée sur le bassin méditerranéen, Meryem Cherkaoui a fait ses classes à l’Institut Paul Bocuse, d’où elle est sortie diplômée. La cheffe est passée dans de prestigieux palaces français (Majestic à Cannes, au Crillon à Paris…) avant d’ouvrir en 2002, au cœur de Casablanca, « La Maison du Gourmet ».
Depuis plus de dix ans, la cheffe s’est surtout consacrée à la formation et au consulting auprès d’autres établissements et pour accompagner des projets qui font sens en lien avec ses valeurs. « C’est une activité pour laquelle je voyage énormément en un mois. Le désir de poser mes valises entre le Maroc et la France s’est fait sentir, et j’aime beaucoup Marseille », nous confie-t-elle.
Entrepreneuse dans l’âme, et par nature animée par le goût du risque, c’est « un nouveau challenge » qu’elle s’apprête à relever. « Et c’est super », se réjouit-elle. Discrète, elle entend sublimer et faire rayonner une cuisine méditerranéenne aux multiples accents, mais veut avant tout mettre en lumière celles qui vont cuisiner et animer le lieu. « C’est ce qui m’importe. J’aime transmettre, c’est ce qui me nourrit chaque jour ».
Ouverture envisagée en décembre 2023
Désormais, cette fan de décoration va s’employer à donner aux locaux un cachet particulier, sa « petite touche » forcément, s’inspirant de ses racines et de cette Méditerranée qu’elle souhaite « plurielle ». Dans une démarche engagée, la cuisine comme l’aménagement de l’espace visent la réduction des déchets et de l’impact carbone.
L’établissement sera équipé avec du mobilier reconditionné et transformé qui sera également en vente au sein de la Maison de la Méditerranée. Une ressourcerie devrait voir le jour au premier étage, opérée par Evolio (groupe La Varappe). L’association développe des espaces de réemploi pour chiner des objets insolites ou des créations réalisées par des salariés en insertion de la ressourcerie Le Dirigeable à Aubagne. La recyclerie se veut comme un lieu d’inspiration à l’image des courants artistiques et inspirants des diversités méditerranéennes, où chacun pourra réaliser un achat éco-responsable.
La Maison sera également une « Safe Place » permettant de mettre à l’abri les femmes en cas d’harcèlement de rue.
La Maison de la Méditerranée va permettre la création d’une trentaine de postes, dont 22 au food-court, et une dizaine répartis entre la ressourcerie et le restaurant. Avec près de 8 millions de passages par an devant le local, 14 500 montées et descentes par jour à l’arrêt de Tram Canebière / Capucins, l’établissement mise sur 300 passages par jour au cœur du food-court du rez-de-chaussée.
« Je pense que j’aurai beaucoup d’émotion le jour de son ouverture, parce qu’il va se passer quelque chose à partir de cet établissement plein d’humanité et d’amour, ajoute Rebecca Bernardi. Il symbolise ce que représente la ville, cette ville-monde, et sur la Canebière qui plus est, qu’on ne souhaite ni maquiller, ni transformer, mais qu’elle reste elle-même ». Ouverture envisagée en décembre 2023.