Après la polémique sur une possible vente aux enchères d’œuvres du patrimoine de la CCI Aix-Marseille-Provence, son président Jean-Luc Chauvin s’est voulu rassurant. Il affirme même lancer une stratégie pour créer un Musée de la marine à Marseille.
Une conférence de presse aux allures d’explications de texte mercredi 23 mars après-midi pour Jean-Luc Chauvin, président de la Chambre de commerce et d’industrie Aix-Marseille-Provence (CCIAMP). Elle fait suite à la polémique déclenchée le 1er mars par les révélations de La Marseillaise. Le journal expliquait que l’institution lançait un appel d’offres en vue de désigner un commissaire priseur pour procéder à l’estimation de 187 œuvres de sa collection autour de l’histoire de l’industrie et de la marine à Marseille.
L’article a soulevé l’indignation d’associations, de citoyens et d’historiens, pointant la dilapidation prévue de ce patrimoine que les Marseillais n’ont déjà pas, ou peu, la possibilité d’admirer. La Ville et la Région ont également déploré ce projet. C’est plus de 20 jours plus tard que la CCI a fini par s’exprimer sur le sujet, laissant la thèse de la vente aux enchères de ces pièces faire son chemin, que le président du conseil régional, Renaud Muselier, juge illégale dans un courrier adressé au président de la chambre consulaire.
Or, ce n’est pas l’objectif si l’on en croit Jean-Luc Chauvin, il s’agit avant tout « d’estimer ces œuvres, et donc notre patrimoine ». Pourquoi ces 187-là, précisément ? « Car ce sont celles pour lesquelles nous avons la certitude de la propriété, avec des titres d’acquisition ou de commande ».
Le président de la CCI a même avancé une thèse contraire aux polémiques, à savoir que cette estimation s’inscrit dans une démarche lancée il y a plusieurs années autour d’un objectif : « la création d’un Musée de la marine à Marseille ».
Création d’un comité du patrimoine
Un projet que la chambre consulaire ne peut plus porter suite « à loi Pacte qui nous empêche de mettre nos ressources publiques à autre chose que l’accompagnement des entreprises. C’est devenu impossible juridiquement ». Et financièrement, toujours selon lui, puisque les ressources sont passées « de 52 millions d’euros en 2010 à 13,7 millions d’euros en 2022 ».
Or, la CCI entend tout de même porter ce projet de musée de la marine, et rappelle la collection colossale (voir encadré) accumulée par la plus vieille institution du type en France (créée en 1599). Pour ce faire, elle a développé « une stratégie en quatre actions », raconte Jean-Luc Chauvin.
D’abord, la création d’un « comité du patrimoine » de l’institution « qui sera acté le 28 avril lors de l’assemblée générale ». 7 personnalités sont déjà citées pour le diriger, parmi lesquelles l’ancien conservateur du patrimoine de la CCI, Patrick Boulanger, ou le porteur du projet Marseille capitale européenne de la mer, Patrick Fancello.
Ce comité « arbitrera la stratégie » concernant les œuvres et aura en charge leur conservation. Pour cela, un « fonds de dotation ouvert à toutes les entreprises » sera lancé. La troisième étape consiste en « l’évaluation de nos œuvres » et du patrimoine, dont le fameux appel d’offres en vue de désigner un commissaire priseur était le premier acte, selon le président de l’institution.
• 11 867 peintures, gravures, estampes
• 1 300 objets coloniaux
• 1 128 objets historiques divers
• 60 000 photos dont 30 000 numérisées
• 30 000 tirages et négatifs de photographies ou plaques de verre dont 18 500 numérisées
• 5 100 affiches publicitaires
• 80 000 ouvrages, 4 kilomètres linéaires d’archives
• 361 planches actions et titres
• 2 200 médailles et jetons
Le Musée de la marine dans le futur « Port Center » de la Joliette ?
Enfin, la dernière étape doit être « l’émergence d’une solution pérenne » pour la conservation et la valorisation du patrimoine « avec un Musée de la mer », explique Jean-Luc Chauvin. Étant donné l’impossibilité juridique pour la CCI de porter un tel projet, le président entend créer un groupement d’intéret public (GIP), comme son homologue de Lyon l’a fait pour le Musée des Tissus. Une entité qui permettrait à toutes les collectivités « et l’État » de le financer et l’exploiter. L’appel est lancé.
Mais où trouver des milliers de mètres carrés nécessaires à un Musée de la marine ? La logique se tourne vers le Grand port maritime de Marseille (GPMM). Il prévoit de créer un « Port Center » [dont nous vous parlions il y a quelques semaines] de 28 000 m² à la place de son siège actuel de la Joliette. Le président de la CCI considère ce futur lieu comme « une belle opportunité ».
Reste à savoir si les potentiels partenaires publics suivront et si les entreprises investiront dans le fonds de dotation. Car Jean-Luc Chauvin n’a pas écarté définitivement l’hypothèse d’une vente d’une partie de la collection qu’il suspend à la réussite du projet. « Ça reste une possibilité que, j’espère, on évitera ». Il est loin d’être le seul.