Malgré la crise sanitaire qui pèse encore sur de nombreuses entreprises, le président de la Chambre de commerce et d’industrie Aix-Marseille-Provence, Jean-Luc Chauvin, réaffirme sa conviction que cette période doit être propice à de nouvelles opportunités économiques. Autonomie, résilience, énergie décarbonée… Une vision qui s’inscrit dans la stratégie du plan France 2030.
Faire de la crise sanitaire une opportunité de transformation des entreprises, d’accélération des transitions, tout en s’appuyant sur les nombreux atouts du territoire. C’est ce qui résume la vision de Jean-Luc Chauvin, président de la Chambre de commerce et d’industrie Aix-Marseille-Provence (CCIAMP), pour 2022 et les années à venir. « C’est une période qui nous encourage à nous réinventer, à profiter de ce moment pour modifier notre manière de produire, de concevoir notre économie. Il nous faut avoir de l’audace. Oser profiter de cette crise pour changer les choses ».
Le défi est de taille dans un contexte sanitaire qui pèse toujours « comme une épée de Damoclès » sur l’économie et les entreprises. Certains secteurs continuent de souffrir de la pandémie, au premier rang desquels, les professionnels de la restauration, le tourisme, l’événementiel, la culture… ou encore les commerces de manière générale, pas même aidés par les soldes d’hiver boudés des consommateurs. « Malgré tout cela, la plupart de nos entreprises ont fait preuve d’adaptation et de résilience dans un contexte marqué par d’incessants stop-and-go, depuis maintenant deux ans pratiquement », souligne Jean-Luc Chauvin.
Entre reprise et freins économiques
Selon les derniers chiffres de l’Insee, publiés vendredi 28 janvier, la croissance française a atteint 7 % en 2021. Un record depuis plus de 50 ans. « Un rebond spectaculaire », selon la formule employée par le ministre de l’Économie Bruno Le Maire pour qualifier la croissance du PIB français au cours de l’année dernière.
Les aides apportées par l’État avec le fameux « quoi qu’il en coûte », les programmes du Plan de relance et le redémarrage, malgré tout, des activités, grâce à la vaccination « ont permis à beaucoup d’entreprises de renouer avec un carnet de commandes encourageant », note Jean-Luc Chauvin; tandis que dans le même temps certaines entreprises s’interrogent sur la manière de rembourser leur Prêt garanti par l’État (PGE). « Il ne faudrait pas que les aides d’hier deviennent les boulets de demain », insiste le président, qui plaide pour un étalement des versements.
Sans oublier la hausse du prix de l’énergie, des transports ou encore des matières premières en particulier dans l’industrie, le BTP ou le commerce de gros. « Les entreprises nous font savoir que les coûts des emballages ont bondi de 30 %, celui du papier de 40 % et le prix moyen du coût du transport de marchandises en conteneurs, en fonction des secteurs d’activités et de la distance, peut atteindre jusqu’à 350 % d’augmentation », détaille le président de la CCIAMP. Face à ces surcoûts, des chaînes de production vont même être stoppées dans les prochaines semaines.
« Notre territoire ne manque pas d’atouts »
Malgré ce tableau en demi-teinte, pour Jean-Luc Chauvin c’est « une période qui ouvre de nouvelles opportunités ». Un discours qu’il tenait déjà l’année dernière. « Mais j’en suis encore plus convaincu aujourd’hui. La crise sanitaire peut et doit être une chance à saisir pour nos entreprises, notre territoire et notre pays », exprime celui qui est à la tête des CCI Métropolitaines (réseau de 17 CCI de Métropoles françaises).
Le changement de modèle passe par la reconsidération des chaînes de valeur des entreprises en misant sur la production de proximité et l’achat local. « C’est également le moment d’innover plus fortement et d’investir de nouveaux marchés », à l’image des filières de valorisation des déchets et de récupération, pour faire face à la pénurie de produits neufs.
Côté numérique, profiter de la position de Marseille, désormais 7e hub Internet mondial (avec l’ambition de rejoindre le top 5 d’ici deux ans), pour développer une filière d’utilisation des données. « La création de valeur est sur l’utilisation des données ». S’appuyer sur cette « terre d’innovation » qu’est le territoire, première région au monde en nombre d’awards décernés à l’occasion du dernier CES de Las Vegas, notamment dans le domaine des cleantech.
Développer l’énergie décarbonée est aussi l’un des enjeux majeurs. « Il va falloir entrer de plain-pied dans le sujet de l’hydrogène » pour lequel il prône d’autres expérimentations, à l’image du démonstrateur Power to Gas, baptisé « Jupiter 1000 », installé sur la plateforme Piicto (plateforme industrielle et d’innovation Caban Tonkin) qui utilise de l’électricité non consommée pour produire de l’hydrogène par électrolyse de l’eau. « Dans tous ces domaines, notre territoire ne manque pas d’atouts, mais ce n’est pas suffisant. Il faut les utiliser à leur juste valeur et répondre présent ».
Capter les fonds de France 2030
La CCIAMP entend ainsi continuer à le faire, particulièrement en décryptant les appels à projets et à manifestations d’intérêt toujours en cours de France relance. Mais surtout dans le cadre de France 2030, qui lui succède, ce vaste programme de 34 milliards d’euros annoncé par Emmanuel Macron en octobre dernier pour faire du pays « une grande nation d’innovation ». Climat, économie, autonomie industrielle, production d’énergie, décarbonation, mondialisation… Ce plan vise à répondre aux problématiques complexes qui se présentent à nous dans les années et les décennies à venir.
Le programme France 2030 va, par exemple, soutenir l’industrialisation de procédés de recyclage des plastiques. Un appel à projets sur le recyclage chimique ou enzymatique des plastiques vient d’ailleurs d’être lancé.
« Le plan de relance ‘Territoires d’industries’ a démontré notre capacité à nous positionner sur des sujets d’avenir », affirme Jean-Luc Chauvin. Le département des Bouches-du-Rhône a d’ailleurs particulièrement bénéficié du volet compétitivité industrielle avec 216 entreprises lauréates pour 105 millions d’euros en 2021, dont 64 millions au titre de la résilience et de la relocalisation.
L’un des rôles de la CCI sera d’aider les entreprises à se rassembler pour « répondre ensemble à ces appels à projets ». Le fameux « jouer collectif », leitmotiv de Jean-Luc Chauvin, pour permettre au territoire « de capter le maximum de ces fonds pour aider nos entreprises à prendre un coup d’avance ».