La jeune start-up aixoise Cearitis dévoile au Consumer Electronics Show (CES) de Las Vegas sa solution innovante de biocontrôle pour protéger les oliviers des ravageurs. Une technologie unique qui utilise les mécanismes sensoriels présents dans la nature et évite ainsi le recours aux pesticides.
L’olivier est un arbre chargé de symboles forts : longévité, espérance, paix, force… Réputé éternel, il n’est pourtant pas épargné par les mouches des fruits. Instinctivement attirés par les molécules naturelles émises, ces ravageurs y déposent leurs œufs. Le développement larvaire à l’intérieur du fruit accélère sa maturation, modifie sa composition et altère toutes ses propriétés organoleptiques. Résultat ? Le fruit ne peut être ni transformé ni commercialisé.
Ce fléau, Marion Canale et Solena Canale Parola le connaissent bien. Les deux jeunes femmes, petites filles d’oléiculteurs, ont assisté en direct aux ravages causés par ces insectes. En créant la start-up Cearitis en mars 2020, les cousines et associées ont décidé de chercher la parade à ce phénomène naturel. C’est au Technopôle de l’Arbois, à Aix-en-Provence, que la jeune pousse a trouvé un « parfait écosystème de travail avec l’accompagnement stratégique nécessaire » pour développer son système de piégeage innovant qui lutte contre les ravageurs et leur plante hôte en mimant le système naturel entre l’arbre et le ravageur.
Répulsion et attraction : un piège unique qui fait mouche
Développé à l’issue de 5 années de recherche et développement (R&D) et breveté, Cearitis a conçu un dispositif de biocontrôle « Push&Pull ». « Ce qui veut dire répulsion et attraction. On utilise tout simplement des odeurs répulsives. En les pulvérisant sur les cultures, on obtient une barrière anti-ravageur, qui agit comme un leurre auprès des femelles pondeuses. En plus, on a mis au point un système « attractif », qui, lui, s’installe à l’extérieur des parcelles, pour attirer les insectes déviés », explique Marion. Ingénieure en biotechnologie, elle a commencé à travailler sur la problématique de la mouche de l’olive dans le cadre de ses études.
Cette technologie est unique à plus d’un titre : d’abord grâce aux matières actives utilisées, car la stratégie de lutte de Cearitis utilise les mécanismes sensoriels présents dans la nature pour en faire un leurre efficace. « C’est nous qui avons identifié les odeurs attractives et répulsives utilisées, et nous avons conçu des produits finis à partir de ça. Personne encore ne le fait », explique Solena, experte en marketing et communication, en charge de l’aspect commercial.
Le piège « Pira » se compose d’une solution répulsive mimant le jus de ponte du ravageur, afin de faire croire à ses congénères que le fruit est déjà occupé. Et une solution attractive composée de kairomones, présente dans les arbres hôte, attire le ravageur en dehors des parcelles. Des systèmes techniques autonomes les diffusent.
Autre spécificité : la combinaison des deux sur le terrain avec l’application de cette technologie sur une parcelle agricole, « parce que mettre en place des choses qui fonctionnent en laboratoire c’est une chose, mais que le système soit utilisé par des agriculteurs en est une autre », poursuit la jeune patronne.
Commercialisation d’ici à 2023 et nouveaux marchés
Le système a été testé sur trois parcelles d’oliviers aux Baux de Provence, dans les Bouches-du-Rhône. « Les bénéfices sont nombreux pour les agriculteurs », estiment les fondatrices. Cette solution protège la totalité de la parcelle, tout en ayant une empreinte environnementale nulle. Elle réduit ainsi les pertes de récoltes et le temps de travail des utilisateurs. « Les substances sont naturelles, elles n’altèrent pas la biodiversité, et 75% des composants de nos systèmes sont made in France ».
Auréolé d’un CES Innovation Award 2020, catégorie durabilité, écoconception et énergie intelligente, le piège Pira sera présenté lors du Consumer Electronic Show à Las Vegas du 5 au 8 janvier 2022. Une opportunité pour le duo de « développer Cearitis, car on espère y faire de belles rencontres. On travaille sur plusieurs leads (pistes) de distribution, commerciaux et de communication », ajoute Solena.
Parallèlement, elles ont lancé une levée de fonds auprès d’investisseurs et notamment de business angels pour, entre autres, homologuer leur solution et la commercialiser d’ici à fin 2023. « Même si on fait du biocontrôle et que nos substances sont naturelles, le produit doit être déclaré à la Commission européenne ».
Même si l’oléiculture reste leur premier marché, Marion et Solena aimeraient appliquer cette même technologie sur d’autres cultures. « On vise la cerise, les agrumes et d’autres fruits à noyau ».