Dans le troisième arrondissement de Marseille, plus pauvre de France, le quartier de Saint-Mauront cumule les immeubles frappés d’arrêtés de péril. C’est ici que la municipalité a décidé de faire une démonstration des actions qu’elle met en place pour lutter contre l’habitat indigne.

Le rendez-vous était donné jeudi 28 octobre à une poignée de journalistes dans le quartier de Saint-Mauront, par le maire de Marseille Benoît Payan, son adjoint à la politique du logement, Patrick Amico, et le maire des 2e et 3e arrondissements, Anthony Krehmeier.

Le premier magistrat de la Ville n’a finalement pu être présent. Contrairement aux journalistes, venus plus nombreux que prévu. Car la question de l’habitat indigne est un sujet central à Marseille. C’était d’ailleurs le but de cette séquence organisée par la majorité municipale : rappeler qu’elle en a fait « une priorité » de son mandat, alors que se rapproche le triste anniversaire des effondrements de la rue d’Aubagne, survenus le 5 novembre 2018.

Concentration d’arrêtés de périls à Saint-Mauront

Ce quartier du troisième arrondissement, le plus pauvre de France, concentre autant la misère que les immeubles en état de grande dégradation. Pour Patrick Amico, « les deux sont liés, en particulier quand le bâti est ancien. C’est la même problématique que l’on retrouve dans l’hyper-centre ».

Il a choisi de s’exprimer sur ce périmètre, à cheval entre les rues du Jet d’Eau et François Barbini, car elles cumulent à elles-deux « 12 immeubles frappés d’arrêtés de péril ». Le maire de secteur en compte « sept sur 100 mètres. Un record », glisse-t-il. Patrick Amico égrène des chiffres à l’échelle de Marseille : 40 000 logements indignes, 800 immeubles frappés d’arrêtés de péril, dont 200 « graves et imminents ».

, La Ville de Marseille fait une démonstration de lutte contre l’habitat dégradé, Made in Marseille
42, rue François Barbini

Se substituer aux propriétaires pour remettre les immeubles en sécurité

Comme celui où nous entrons, au 22-24 rue du Jet d’Eau. « Une ancienne usine de peinture », précise Anthony Krehmeier, « devenue une copropriété. Il y a 12 lots sur les deux immeubles. Un seul des propriétaires habitait ici ». Les derniers résidents ont été évacués en 2021, expliquent les élus.

« La Ville mène les travaux de remise en sécurité qui débutent en novembre », poursuit Patrick Amico. Car c’est pour illustrer la « politique volontariste engagée depuis le début du mandat » qu’il nous a invités ici. Lorsque les propriétaires n’engagent pas ces travaux de remise en sécurité, « nous nous substituons à eux ».

La facture leur est quand-même envoyée, ainsi qu’un signalement au procureur, car cette « mise en danger de la vie d’autrui est passible de poursuites pénales ». Et s’ils ne remboursent pas l’intervention, « la Ville devient propriétaire », explique l’adjoint à la politique du logement.

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48 millions d’euros, 45 recrutements et une direction dédiée

En novembre 2020, une enveloppe de 48 millions d’euros était débloquée sur 4 ans afin de permettre à la Ville d’assurer cette politique active de mise en sécurité des habitats dangereux. « Elle n’est pas définitive et peut être réabondée », précise Patrick Amico, estimant qu’environ « 5 millions d’euros » ont déjà été utilisés en études, signalements ou travaux d’office. 

En plus de la création d’une direction dédiée au logement, « qui n’existait pas », l’élu précise que 45 personnes sont en cours de recrutement pour renforcer ses rangs, et appuyer cette politique de « traitement des immeubles en péril ». Parmi elles, « 20 ont des profils techniques. Des agents de salubrité, dédiés à traiter les signalements, faire les visites, les études, les travaux d’office… »

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Une nouvelle charte du relogement signée « dans les jours qui viennent »

Mais l’habitat indigne « est un tout », selon Patrick Amico. « Il faut aussi reloger les personnes évacuées », rappelle-t-il. Selon lui, la Ville reloge 1 400 personnes, entre appartements temporaires (pour la majorité, 1 000 personnes), appart-hôtel ou foyers. Il estime que les travaux et le relogement représentent « 10 millions d’euros par an. 20 millions ont déjà été engagés depuis un an et demi ».

L’adjoint au logement rappelle par ailleurs que la nouvelle mouture de la charte du relogement, en négociation depuis des mois entre pouvoirs publics et collectifs citoyens, « va être signée dans les jours qui viennent ». Ces derniers étaient inquiets de la tournure que semblait prendre le nouveau document. Selon l’élu, elle présente des « évolutions importantes » en faveur des locataires délogés.

Accompagner le permis de louer d’un encadrement des loyers

« Pour moi, l’habitat indigne est un problème social avant d’être un problème d’immeubles », poursuit-il. Il considère positivement le permis de louer appliqué à Noailles depuis 2019, par la Métropole Aix-Marseille-Provence, via sa compétence sur le logement et l’habitat. Ce dispositif impose des vérifications de qualité d’habitat avant chaque nouveau bail.

Toutefois, avec cette mesure, « on constate une augmentation des loyers ». S’il se dit favorable à l’étendre dans toute la ville, « il faut l’accompagner d’un encadrement des loyers ». Proposition refusée à l’échelon métropolitain selon lui.

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