Le projet Vasco 2, inédit en Europe, s’est installé à Fos sur Mer depuis septembre 2016. Son but ? Valoriser les fumées industrielles de façon biologique pour produire des microalgues destinées à la chimie verte, notamment la production de biocarburant. Surtout, ce procédé permet de réduire les émissions de CO2 et de gaz à effet de serre dans l’atmosphère.
La zone industrialo-portuaire (ZIP) de Fos s’étend sur 10 000 hectares où au fil du temps se sont installées de nombreuses industries. C’est d’ailleurs dans cette zone que les industries présentes auparavant dans les Calanques de Marseille ont été déplacées, notamment pour que les Marseillais ne souffrent plus de leur présence et de leurs émissions de fumées.
Ces fumées justement sont depuis quelques années au centre d’un projet de recherche. Baptisé VASCO 1, cette étude avait été menée afin d’établir une liste de pistes pour valoriser le CO2 qu’elles contiennent dans le but de réduire les émissions de gaz à effet de serre dans l’atmosphère. De cette phase de recherche est ressortie l’idée de créer un système capable d’aspirer ces fumées pour créer des microalgues qui par la suite pourront être réutilisées notamment pour produire des biocarburants. Ce système se nomme lui VASCO 2 et est en test depuis septembre dernier sur un site de Fos.
Un allié pour rendre service à l’environnement
Là où le procédé est inédit en Europe, c’est parce qu’il permet la valorisation des fumées industrielles sans prétraitement. Les fumées sont aspirées telles quelles par une colonne à dépression connectée à un bassin qui contient de l’eau de mer. Dans ces fumées, sont notamment contenus du CO2 et des oxydes d’azote (Nox). Combinés à la présence naturelle du soleil dans notre région, ils constituent les trois éléments dont les microalgues ont besoin pour se développer.
Ces microalgues seront ensuite récoltées et centrifugées pour leur enlever le maximum d’eau. On obtient alors du biobrut, l’équivalent du pétrole brut, qui comme ce dernier va être raffiné, dans les mêmes conditions, pour obtenir du biocarburant. Toutefois, rien n’est sûr quant à ce dernier point. « On est en démonstration actuellement et la production de biocarburant n’est pas sûre. Les algues pourront alors être utilisées autrement, comme en tant que farine pour servir de nourriture aux poissons d’élevage ou dans des cosmétiques, ce qui se fait déjà. Les microalgues rendent avant tout ici service à l’environnement », tient à souligner Bertrand Barrut, Directeur R&D chez Coldep, startup qui conçoit la colonne à dépression.
Pour le moment, un bassin de 10 m² est en fonctionnement sur le site de l’entreprise KemOne qui produit principalement du chlore et de la soude. Un autre, de 160 m² est installé et sera bientôt mis en marche. Deux autres sites, ArcelorMittal et Solamat-Merex, vont également chacun accueillir un bassin de 10 m² au printemps 2017. Leurs fumées n’étant pas constituées des mêmes éléments, cela va permettre une comparaison des compositions des microalgues obtenues.
Une industrialisation aux alentours de 2030 ?
Le procédé est également en expérimentation depuis la fin de l’hiver 2015 sur un site de Palavas-les-Flots (34) dans des conditions toutefois différentes puisque les microalgues sont conçues à partir de CO2 pur. Les tests à Fos vont permettre d’étudier le système en milieu réel jusqu’à la fin de l’année 2018. D’ici là, plusieurs paramètres seront étudiés : la dissolution des fumées dans l’eau des bassins, la composition des microalgues récoltées et la transformation de cette biomasse en biobrut. Le raffinage de ce biobrut sera également comparé avec celui utilisé pour les pétroles conventionnels.
À l’issue de cette phase et si les résultats sont bons, un démonstrateur de taille industrielle sera mis en place, dernière étape avant une production à grande échelle prévue aux alentours de 2030. Pour que la production à grande échelle soit possible, une évaluation économique, sociale et environnementale et une analyse du cycle de vie seront réalisées dans la perspective de la structuration d’une véritable filière d’écologie industrielle.
« L’idée de demain est d’avoir beaucoup plus de bassins mais avec des structures derrière pour que tout le reste des opérations se fasse sur place. Ce n’est pas le cas actuellement pour la phase de transformation par exemple. Ce système est la pierre angulaire du « mieux transformer » mais il faut que tout soit étudié et en place pour l’accueillir », met en avant Michaël Parra, coordinateur du projet VASCO2.
La question environnementale au cœur de l’action
Si le système a pour but de réduire les émissions de gaz à effet de serre, en fonctionnant et donc en utilisant de l’électricité, il va lui-même en produire. « L’étude environnementale va notamment permettre de savoir si le bilan carbone est intéressant, à savoir si le procédé rejette moins de CO2 qu’il n’en consomme. Elle va également servir à étudier les nuisances des microalgues », explique Michaël Parra.
Dans tous les cas, le coordinateur du projet l’assure : « VASCO 2 sera un succès ». Car, selon lui, même si l’objectif de produire des biocarburants n’est pas atteint, le système aura toujours des effets bénéfiques pour l’environnement et comme but principal de réduire les émissions de CO2.