Dans quelques années, le pourtour Méditerranéen devrait se doter d’une nouvelle source d’énergie renouvelable (ENR) : l’éolien flottant. 500 éoliennes, imperceptibles depuis la côte, devraient être installées d’ici 2030. L’équivalent en électricité de deux de nos plus puissants réacteurs nucléaires. Alors que la technologie est encore en phase de test, de nombreuses entreprises régionales sont d’ores et déjà dans les starting-blocks.
La semaine dernière, plus de 300 participants, dont 100 venus de l’étranger, les plus grands professionnels dans ce domaine, étaient réunis les 10 et 11 mars au Palais de la Bourse dans le cadre de la troisième édition de la Conférence internationale de l’éolien offshore flottant (EOF). La France porte son regard vers l’avenir. Elle a le second potentiel d’Europe dans le domaine et le pourtour méditerranéen présente des atouts de poids, même si aujourd’hui toutes les installations déjà en place ne sont que des fermes tests.
Et le contexte global est très favorable au développement de l’éolien flottant en Méditerranée comme nous l’explique Michel Sesques, vice-président de la Chambre de Commerce et d’Industrie Marseille Provence (CCIMP) délégué au développement des grandes filières industrielles, “il y a aujourd’hui un alignement des étoiles, politique, économique et industriel”. Selon lui, notre territoire présente tous les atouts à l’élaboration de l’éolien flottant : des vents forts et multiples, un haut niveau de recherche et d’enseignement, un grand port et mais surtout des entreprises très dynamiques implantées sur notre territoire comme Ideol, Eolfi, Nénuphar…
L’avenir est renouvelable
L’éolien offshore classique fonctionne comme le terrestre, les pales et la turbine reposent sur un mât, ici posé sur un pied immergé. L’éolien flottant s’affranchit du pied. Le flotteur résiste aux courants grâce à de puissants câbles reliés au fond marin.
La France reste très majoritairement dépendante de l’industrie nucléaire (77% de la production en 2014). Si celle-ci ne rejette pas de CO2 à proprement parler, elle s’alimente d’uranium et produit des déchets pour le moment impossible à éliminer. De plus, elle tend à devenir moins compétitive niveau prix à cause de la baisse constante du coût des ENR, éolien et solaire en tête.
Le photovoltaïque présente un réel enjeux pour certaines zones du monde. Chez nous, l’attente est moindre. Par rapport à l’éolien, et surtout le flottant, le solaire manque de constance. La pluralité des technologies entraîne également une multitude de prix au mégawattheure, qui va du simple au triple.
Une technologie récente et prometteuse
L’éolien offshore apparaît dans les années 1990 au nord de l’Europe. Des pays comme le Danemark, les Pays-Bas ou la Suède lancent de vastes programmes de valorisation de la technique. Mais ce sont le Royaume Uni et l’Allemagne entament les politiques les plus audacieuses. Lancées dans la course à l’éolien maritime depuis une décennie, les deux nations dominent déjà le classement mondial, devant le pionnier danois. L’accent est mis sur d’immenses installations du plusieurs centaines de turbines.
Preuve en est donc que le développement de la filière ne nécessite pas un demi-siècle, mais bien une volonté concrète. Les acteurs de l’éolien, et du renouvelable en général, se base sur un objectif fixé par l’Etat français pour garantir leurs investissements : une contribution de 32% d’ENR dans le mix énergétique en 2030.
L’EOF offre beaucoup d’avantages par rapport au fixe ou au terrestre (la France est au 8ème rang mondial en la matière). Contrairement au fixe, il ne dépend en rien de la profondeur ou de la qualité des fonds marins. Les éoliennes peuvent être placées au large, elles profitent ainsi d’un vent fort et constant tout en préservant le littoral de la pollution visuelle. Cela préserve également les territoires denses, comme le sud-est, de la pression foncière.
Les entreprises françaises aux avant-postes
A la traîne sur l’éolien maritime fixe, ses côtes en sont dépourvues, la France est aux avant-postes en terme de flottant. La start-up Nénuphar, présente sur le pôle aixois de l’Arbois, doit déployer son premier parc éolien en 2018, au large de Fos-sur-Mer. L’entreprise, dont Areva est actionnaire à hauteur de 10%, a développé un prototype à axe vertical. Il est censé produire davantage que ses concurrents, grâce à une prise au vent de 360 degrés. Cette ferme pilote doit comprendre 13 éoliennes, pour une puissance totale de 30 mégawatts, soit la consommation d’une ville de 50.000 habitants selon Nénuphar.
Du côté de La Ciotat, la société Ideol se concentre sur le flotteur. Leur prototype, adaptable et économique, a déjà fait des émules. Un premier projet commercial a été signé avec la firme japonaise Hitz. Il doit valider la technologie en vue d’équiper les futurs parcs flottants de l’archipel. Ideol va donc mettre à l’essai deux flotteurs, l’un en acier et l’autre en béton. A l’image de l’Allemagne, qui a récemment amorcée le démantèlement de son parc nucléaire, le pays du Soleil-Levant revoit en profondeur sa politique énergétique. Une aubaine pour le secteur des ENR et les innovateurs français.
Seul bémol, le coût. Si l’éolien maritime s’affranchit de la fluctuation des prix du carburant, il demande des ressources d’investissement conséquentes. Selon l’Energy Technologies Institute, un partenariat public-privé britannique dont EDF Energy fait partie, l’EOF deviendrait économiquement compétitive dans dix ans. Un constat partagé par Pierre Parvex, président de la commission offshore de France Énergie Éolienne : “La compétitivité peut être atteinte à moyen terme. Les coûts sont en train de diminuer.”.