Le président français Emmanuel Macron et le premier ministre indien Narendra Modi ont fait escale à la tour CMA CGM, dominant le port de Marseille, ce 12 février. Les deux hommes d’État ont relancé les discussions autour du projet d’une route commerciale entre l’Inde et l’Europe.
Ce n’est que quelques heures avant leur arrivée que les équipes de CMA CGM ont confirmé la venue du premier ministre indien Narendra Modi, accompagné par le président français Emmanuel Macron, au siège l’armateur mondial marseillais.
Mais tout était prêt à temps, ce 12 février en milieu de matinée, pour accueillir les deux hommes d’État. Un tapis rouge, les drapeaux des deux nations, et des stickers de « bienvenue » en français, anglais et hindi, collés à l’entrée.
Après une visite au cimetière militaire de Mazargues où reposent des combattants indiens de la Première guerre mondiale, puis de l’inauguration du nouveau consulat d’Inde sur l’avenue du Prado, le seul en France métropolitaine, Narendra Modi et Emmanuel Macron sont montés au 12e étage de la tour de verre, pour découvrir le « fleet center ».
Cette tour de contrôle arbore une large carte du monde surveillée 24h sur 24. Des milliers de points de couleur représentent la localisation en temps réel des flottes du monde entier. Dans cet océan de navires, le groupe CMA CGM garde un œil sur les 660 porte-conteneurs qu’il opère. « On peut anticiper la météo pour proposer des routes alternatives », explique Christine Cabau Woehrel, directrice des opérations.
Une route terrestre et maritime entre l’Inde et l’Europe
L’enjeu de cette étape au siège de l’armateur concerne surtout la potentielle relance du corridor économique Inde-Moyen-Orient-Europe (IMEC), voulu par l’ancien président des États-Unis, Joe Biden, au cours du G20 de New Delhi en septembre 2023, notamment pour contourner les attaques des Houtis yéménites en mer rouge.
Ce projet de route terrestre et maritime vise à faciliter les échanges de marchandises, d’énergie, de données numériques par câbles sous-marins entre l’Inde et l’Europe. Devant le premier ministre indien, Rodolphe Saadé, président directeur général de CMA CGM, déploie le tracé de cette ligne longue de 4 800 kilomètres.
Elle offrirait ainsi une liaison par la mer entre l’Inde et la péninsule arabique. Puis une voie ferroviaire traversant l’Arabie saoudite jusqu’à la Jordanie. La route raccorderait ensuite le port d’Haïfa en Israël, avant de reprendre la voie maritime jusqu’aux ports européens du Pirée en Grèce, de Messine en Italie, et de Marseille.
« Marseille pourrait être le point d’entrée du marché européen »
L’IMEC permettrait ainsi de « raccourcir les délais entre l’Inde et l’Europe du nord de une à deux semaines », affirme Christine Cabau Woehrel. Mais aussi un « moyen de diversifier les routes maritimes » qui passent par le Canal de Suez et le Cap de Bonne-Espérance, au large de l’Afrique du Sud.
L’experte connaît bien ces enjeux en tant qu’ancienne présidente du directoire du port de Marseille-Fos. L’Inde est d’ailleurs le 6e client du GPMM aujourd’hui.
Emmanuel Macron insiste donc sur « la pertinence du projet IMEC ». Avant d’ajouter que « Marseille pourrait clairement être le point d’entrée de tout le marché européen ». Le président de la République a même proposé d’organiser rapidement le « forum économique sur l’Imec » en France.
CMA CGM place ses pions
De son côté, CMA CGM profite de cette visite présidentielle pour démontrer son « rôle clé », étant à la fois un acteur mondial du transport maritime, avec ses hubs portuaires, et de la logistique par voie terrestre avec sa filiale CEVA Logistics. Le groupe pourrait faciliter la mise en place d’un tel projet chiffré à 480 milliards d’euros d’investissement.
« Un réseau de ports secs implantés le long du tracé ferroviaire de l’IMEC bénéficiera de l’expertise logistique du groupe renforçant ainsi la projection stratégique et économique de ce corridor », argue CMA CGM.
Le mastodonte marseillais qui emploie 17 000 collaborateurs en Inde – et assure 11,5% des parts de marché sur le transport maritime (3e place) – compte également continuer à y développer sa présence. « Nous sommes intéressés pour construire des bateaux en Inde », a témoigné Rodolphe Saadé.
Photo de UNE : crédit CMA CGM