À la tête de l’Office de tourisme depuis un an, la Ville de Marseille fait du tourisme responsable le fil conducteur de sa feuille de route 2024-2030. Ce document reste timoré pour l’opposition qui fustige la nouvelle organisation.
Après avoir présenté sa nouvelle stratégie économique fin 2023, la municipalité pose les jalons de sa feuille de route touristique pour 2024-2030, dont quelques orientations ont été présentées, vendredi 16 février, au conseil municipal.
En mars 2023, la Ville de Marseille a récupéré la gestion de l’Office de Tourisme, grâce à la loi de décentralisation 3DS (Différenciation, décentralisation, déconcentration et simplification), désormais présidé par le maire Benoît Payan (DVG), son adjoint à l’économie et au tourisme durable, Laurent Lhardit (PS) étant président délégué.
En un an d’exercice, les élus du Printemps marseillais, en mandat jusqu’en 2026, se sont attachés à écrire une nouvelle stratégie pour les six ans à venir. Fruit d’une « vaste concertation » avec les acteurs du secteur, ce document veut « placer les Marseillais au centre », nous affirme Laurent Lhardit.
Pour l’adjoint à l’économie, les habitants sont « les premiers consommateurs », car ils réalisent « 50% du PIB touristique ». L’Assemblée Citoyenne du Futur a été sollicitée par la mairie pour réfléchir à l’élaboration d’un pass pour rendre accessibles les activités de loisirs à tous les marseillais en 2024.
Lisser la sur-fréquentation
C’est aussi eux qui subissent « les effets néfastes de la sur-fréquentation ». Ces dernières années, particulièrement après les confinements de la crise sanitaire, la cité phocéenne a vu son nombre de visiteurs exploser pour atteindre 5 millions de touristes, sans qu’il n’y ait pour autant d’indicateurs précis chiffrés.
Outre son climat, l’une des raisons de son attractivité, souvent pointée du doigt, reste les escales des bateaux de croisières, qui ont atteint des records en 2023 avec 2.5 millions de croisiéristes à Marseille.
Cette sur-fréquentation a poussé la Ville à réfléchir à d’autres modèles touristiques « plus responsables » avec l’ambition de proposer une expérience plus qualitative aux touristes comme aux Marseillais.
Mieux répartir le tourisme l’espace
En ce sens, la municipalité souhaite travailler en « désaisonnalisant » le tourisme d’une part et répartissant mieux les flux touristiques sur la ville. L’ensemble des mairies de secteurs ont été associées à « la création d’une carte pour recenser toute l’offre touristique ». Les fêtes de quartiers relancées par un appel à projets de la Ville illustrent aussi cette volonté de répartir les visiteurs et faire découvrir des noyaux villageois marseillais et leurs arts de vivre.
Si la Ville compte sur les événements annuels, elle mise aussi sur le tourisme d’affaires. En 2022, ce secteur a engendré environ 457 millions d’euros de retombées économiques directes et indirectes pour la ville de Marseille, dont 63% en congrès et 37% en événements d’entreprises – hors salons (source Bureau des Congrès, OTLCM).
À ce titre, « le parc Chanot est un outil indispensable très bien placé », soutient Laurent Lhardit, alors que le contrat – déjà plusieurs fois prolongé – qui lie la Ville à la Safim, gestionnaire du site, arrive à son terme en 2025. À terme, l’équipe municipale projette de requalifier complètement le parc Chanot. En attendant, une nouvelle délégation de service publique (DSP) sera lancée l’année prochaine.
Du changement au conseil d’administration
Étaler le tourisme vise à réduire les pics de fréquentation et leurs impacts. Mais il faut, en parallèle, travailler sur les moyens de déplacements. « Trop de touristes arrivent en voiture dans la ville », pointe l’adjoint socialiste, qui a d’ailleurs tenu à associer la SNCF dans « un comité de développement » en cours de création.
Ce comité – qui devait initialement voir le jour en octobre – était une promesse du Printemps marseillais pour « travailler sur des dossiers particuliers » comme l’offre du tourisme d’affaires ou la mobilité. Selon l’adjoint, des professionnels du secteurs y seront associés, comme l’union des métiers de l’industrie et de l’hôtellerie (UMIH) ou la Chambre de commerce et d’industrie Aix-Marseille-Provence (CCIAMP).
Avant la reprise de l’Office du tourisme par la Ville, ces professionnels siégeaient au comité de direction. Mais la mairie de gauche a souhaité « changer les statuts de l’office » afin de « reprendre la main ».
En plus de 11 élus municipaux, dont l’adjoint à la Culture, Jean-Marc Coppola (PC), et l’adjoint aux Finances, Joël Canicave (PS), une élue métropolitaine, Danièle Milon, la présidente de Provence Tourisme, deux experts du secteur ont également été intégrés au comité d’administration : le président des résidences Léo Lagrange, Frédéric Rosmini, et l’ancien président de l’OT, Marc Thépot.
L’opposition fustige la stratégie de la Ville
Pour autant, la feuille de route ne convainc par l’opposition, notamment Lionel-Royer Perreaut qui lance au sein de l’hémicycle municipal : « Quelle déception ! Un rapport stratégique à 6 ans qui s’avère être une addition de plates intentions ». Le député (Renaissance) des Bouches-du-Rhône regrette que la stratégie soit « repliée sur la seule ville de Marseille ».
Alain Gargani, élu d’opposition et président de la Confédération des petites et moyennes entreprises de la région Sud, fustige pour sa part ce changement de statuts qui a « écarté les professionnels » de l’Office du tourisme. Le chef d’entreprise « encourage » la Ville « à retravailler avec la CCI et l’UMIH ».
De son côté, Marc Thépot insiste sur sa « légitimé » à représenter les professionnels du secteur, fort de « plus de 30 ans d’expérience en hôtellerie ».