Implantée dans les quartiers Nord, la boulangerie solidaire Pain et Partage va ouvrir la première biscuiterie anti-gaspi de Marseille, en recyclant les pains bio non consommés. Un projet à impact social et environnemental. Objectif : commercialiser ces premiers biscuits en forme de Bonne Mère début 2022.
« Ce gisement de pains non consommés, c’est de l’or ». C’est sur cette conviction que Pain et Partage a décidé de lancer la première biscuiterie anti-gaspi de Marseille. Le réseau de boulangeries solidaires Bou’sol, installé dans les quartiers Nord, expérimente depuis déjà quelques mois des recettes gourmandes à base de pain recyclé.
Le pain, rapidement périssable, est l’un des produits les plus gaspillés. Les invendus s’élèveraient à environ 10 % du pain produit, ce qui représente 15 000 tonnes par an. « L’idée est de collecter le pain biologique non consommé, auprès des boulangeries traditionnelles ou de supermarchés, le broyer en une sorte de fine farine de pain, et ainsi de pouvoir la réutiliser pour faire des gâteaux », explique Benjamin Borel, co-responsable de l’association.
50 à 75 % de farine de pain recyclé et jusqu’à 100 % pour les sablés
Une baguette de pain permet la production de 35 biscuits. Cookies, fondants au chocolat…. Toute une gamme de produits a ainsi été définie pour les premiers tests. Aux fourneaux, Éric Barret ne cache d’ailleurs pas son enthousiasme à concocter de nouvelles recettes. Pour la réalisation des cookies et des brownies, par exemple, il s’est inspiré « de la recette d’un meilleur ouvrier de France, chez lequel j’ai travaillé et que j’ai légèrement modifié. J’ai changé la farine à hauteur de 50 % par de la farine de pain », explique le chef pâtissier.
Dans ces versions anti-gaspi, environ 50 à 75 % de la farine traditionnelle est remplacée par de la farine de pain. Parfois plus. « Pour les sablés Bretons, après pas mal d’essais, on est même arrivé à remplacer la farine par 100 % de farine de pain. Ça reste encore bien friable pour ceux qui l’aiment comme ça », sourit Éric, tout en sortant du four des cookies tout chauds. Et d’ajouter : « J’arrive même à passer 50 % de farine de pain pour de la pâte à pizza ».
Lutter contre la précarité alimentaire et favoriser l’insertion professionnelle
Des premiers tests gourmands « concluants », poursuit Benjamin Borel. « L’idée c’est de faire en sorte que ces biscuits puissent être proposés à la restauration collective, mais aussi à toutes les structures qui s’occupent de centres aérés pour qu’elles puissent les proposer aux enfants au lieu de produits industriels ».
Pour la Fondation de France, qui soutient l’initiative, ce projet de biscuiterie « innovant et plein d’avenir », « va avoir un quadruple impact » à Marseille. Social tout d’abord, en favorisant l’insertion professionnelle de personnes en situation d’exclusion et l’insertion professionnelle des femmes. Mais aussi « un impact sur la santé des habitants des quartiers défavorisés et plus spécifiquement pour les personnes en situation de précarité et d’isolement », en favorisant l’accès à une alimentation biologique. Environnemental, naturellement, en luttant contre le gaspillage alimentaire et enfin « local, en créant une nouvelle filière de valorisation de l’artisanat marseillais ». Avec l’espoir « qu’il inspirera beaucoup d’autres initiatives partout en France », ajoute Christelle Nimeskern, déléguée au développement régional, Fondation de France Méditerranée.
Une campagne de dons lancée par Fondation de France pour structurer la filière
Pour commercialiser les biscuits – proposés pour l’instant seulement à la dégustation – Pain et Partage doit désormais structurer cette nouvelle activité. Ainsi, une campagne de dons a été lancée sur le site de la Fondation de France. L’objectif est d’atteindre 20 000 euros pour la réalisation intégrale du projet, afin de concrétiser l’aménagement de l’atelier de pâtisserie au sein de locaux de Pain et Partage. La transformation d’un local de 16 m2 nécessite quelques travaux de mise aux normes.
Grâce à cette somme, l’association pourrait se doter de matériel, tels qu’un « laminoir, un tour pâtissier réfrigéré, des ustensiles… », énumère Benjamin Borel. C’est aussi des achats de matières premières pour lancer, début 2022, une première production de 1 500 biscuits, soit 150 sachets de 10 biscuits de 15 grammes. Et pour faire un clin d’œil à la cité phocéenne, les biscuits ont été imaginés avec la forme de la Bonne Mère.
Une nouvelle activité qui s’inscrit dans l’ambitieux projet « Pastis »
En cette fin d’année, Pain et Partage sélectionne ses partenaires de collecte du pain biologique de qualité. L’heure est aussi à la finalisation des recettes sucrées avant une phase test prévue auprès d’un échantillon de clients. Après quoi, une première « production pilote » de biscuits sera réalisée pour les contributeurs avec également l’ajustement de l’ensemble du processus de production. Pour l’heure, près de 7 000 euros ont été collectés. Des dons provenant des quatre coins de France. Il reste encore un mois pour mettre la main à la pâte.
Cette biscuiterie s’inscrit dans l’ambitieux projet de création d’un pôle alimentaire solidaire territorial et d’innovation sociétale dans les quartiers Nord de Marseille, baptisé « Pastis », que nous vous présentions en mars dernier. Un projet de tiers lieu, qui pourrait voir le jour au sein des anciens abattoirs de Saint-Louis.
A lire aussi