Après 25 ans de règne de Jean-Claude Gaudin, la gauche et les écologistes s’imposent dans la deuxième ville de France, emmenés par le Printemps Marseillais. Dans un contexte d’abstention record, l’issue du scrutin pour le troisième tour, à savoir l’élection du maire, reste incertaine.

C’est tout un symbole. À droite depuis 25 ans, ce 28 juin 2020, les Marseillais ont placé le Printemps Marseillais en tête des suffrages, confortant ainsi la dynamique impulsée lors du premier tour le 15 mars dernier. Avec 38,28% des voix Michèle Rubirola, du Printemps Marseillais s’impose devant la LR Martine Vassal avec 30,75% soit 14 091 voix d’écart.

Devant la permanence de Martine Vassal, rue Paradis, l’heure n’était pas à la fête en début de soirée. « C’est une catastrophe, la droite marseillaise est en lambeau ». Quelques militants, la mine défaite, refont le match de ces dernières semaines, confiant « que c’était extrêmement difficile pour Martine Vassal ». 

Le fief historique de la droite passe l’arme à gauche

Comme dans d’autres villes de France, Marseille a été entraînée par une vague verte et printanière. Cette large coalition de gauche, qui réunit le parti socialiste jusqu’aux insoumis, en passant par les écologistes, qui ont rallié l’alliance dans l’entre-deux-tours, remporte quatre secteurs sur huit, dont le fief historique de la droite, le 6-8e.

Dans ce bastion, Olivia Fortin, co-fondatrice du collectif Mad Mars, novice en politique arrive en tête avec 41,78% devant la présidente de la Métropole, Martine Vassal, qui totalise avec 39,16%. Un secteur où Jean-Claude Gaudin avait été élu en 2014 dès le premier tour, avec 50,07% (21 527 voix)

Le Printemps Marseillais gagne quatre secteurs sur huit

Devant le QG du Printemps Marseillais, l’ambiance est toute autre. La musique entraîne les militants dans la danse. « C’est une surprise incroyable et une joie intense », confie une Marseillaise, un large sourire aux lèvres, encore sous le coup de la surprise, alors que les résultats définitifs commencent à tomber.

Dans le camp du Printemps Marseillais encore, Sophie Camard (LFI) et suppléante de Jean-Luc Mélenchon, gagne, sans surprise, dans le premier secteur, (58,01%), face à la LR Sabine Bernasconi, avec 31,37%. La maire actuelle formait un binôme avec le chef d’entreprise Alain Gargani.

Avec 46,28% des voix, le socialiste Benoît Payan s’empare de la mairie du deuxième secteur, à la faveur d’une triangulaire qui l’opposait à Lisette Narducci (Ensemble pour Marseille avec Bruno Gilles), Solange Biaggi (Une volonté pour Marseille avec Martine Vassal) et Jeanne Marti (Avec Stéphane Ravier, retrouvons Marseille).

Dans le 3e secteur, la candidate du Printemps Marseillais à la Mairie de Marseille, Michèle Rubirola n’a pas fait mentir les derniers sondages. L’écologiste s’impose, elle aussi, largement avec un écrasant 56,99% devant Bruno Gilles, candidat DVD (28,88%).

Le sénateur des Bouches-du-Rhône qui a enchaîné quatre mandats consécutifs dans les 4-5e arrondissements, a pris acte de sa défaite, dans la soirée, adressant toutes ses félicitations à sa rivale, ainsi qu’à Benoît Payan. « Nous avons mené une campagne digne et courageuse (…) Il y a toujours une fin et la fin mes chers amis, c’est ce soir», a t-il déclaré très ému, après 22 mois de campagne, depuis sa permanence.

Le général David Galtier fait chuter le frontiste Stéphane Ravier

Retour à la permanence de Martine Vassal, où quelques candidats arrivent les uns après les autres, à l’instar de Lionel Royer-Perreaut. Le maire actuel conserve sa mairie du 9-10e avec 43,52% des voix devançant Aïcha Sif du Printemps Marseillais avec 35,18% et la frontiste Eléanor Bez (21,29%).

Puis David Galtier. Son arrivée dans un bureau à l’abri des regards est saluée par de courts applaudissements. Et pour cause, le général Galtier, candidat de Martine Vassal, réussit le pari de ravir sa mairie Stéphane Ravier dans les 13-14e, avec 50,98% des voix contre 49,02%. Dans ce secteur, pour faire barrage au Rassemblement national, la liste menée par Jérémy Bacchi, secrétaire général du PCF13, et candidat du Printemps Marseillais, avait décidé de retirer sa candidature.

La mairie du 11-12e reste à droite… de justesse. Julien Ravier, candidat LR sauve in extremis le sixième secteur avec 35,37% des suffrages, avec un peu plus d’un point seulement de différence avec Yannick Ohanessian du Printemps Marseillais (34,10%).

Les jeux ne sont pas faits

Avec trois secteurs remportés, Martine Vassal est loin d’avoir dit son dernier mot. À l’heure des résultats définitifs, depuis sa permanence et entourée de quelques-uns de ses candidats, elle déclare : « ce soir, je n’ai pas perdu. Ce soir, il n’y a pas de majorité à Marseille, ce soir, il n’y a pas de maire de Marseille », dénonçant au passage l’attitude d’un autre candidat, sans le nommer, à savoir Yvon Berland, candidat de La République en marche, qui a décidé de maintenir sa candidature dans ce secteur.

Avec le sourire, la candidate a salué les « belles victoires » de David Galtier, Julien Ravier, Lionel Royer-Perreaut, donnant également rendez-vous pour l’élection du maire le vendredi 3 juillet.

Pour l’entrepreneur Stéphane Soto qui secondait Solange Biaggi, « beaucoup de choses sont encore possibles », pour le troisième tour, même s’il se dit déçu du résultat. « Évidemment, nous allons jouer notre carte. C’est un vrai message envoyé par les Marseillais qu’il faut comprendre, un besoin de renouvellement certes, mais je pense que tout le monde est d’accord pour dire que cette campagne n’avait rien de normal. Elle a été singulière, longue et violente, douloureuse parfois, pour ma part dans le 2-3, mais j’ai vécu une aventure extraordinaire, avec l’équipe et au contact des Marseillais ».

Pour le maire LR de Marseille qui s’apprête à tirer sa révérence, le score de sa famille politique résulte du « choix des leaders nationaux de La République En Marche et de M. Berland de se maintenir dans les 6ème et 8ème arrondissements ont permis à la Gauche de l’emporter dans ce secteur. Avec 1,5 % des suffrages sur l’ensemble de la ville, ils ont délibérément pris le risque en effet de faire basculer Marseille à Gauche », a-t-il déclaré.

« Rien n’est toutefois encore joué pour la désignation du futur maire de Marseille par le Conseil municipal à la fin de la semaine prochaine. Beaucoup dépendra du choix que feront les onze élus des listes minoritaires d’hier entre la poursuite du développement de la ville et le repliement vers les errements du passé et le déclin ».

Car en effet, en raison du vote par secteur, si le Printemps Marseillais s’est imposé au soir du second tour, l’écart avec Les Républicains n’est que de trois sièges seulement : 42 conseillers municipaux pour le Printemps Marseillais contre 39 pour Les Républicains.

Samia Ghali arbitre du troisième tour

Dans ce contexte, c’est d’abord vers Samia Ghali que tous les regards se tournent. Dans les 15-16e, la candidate ex-PS conserve sa mairie de secteur avec 38,16,% des voix, devant Jean-Marc Coppola du Printemps Marseillais (35,23%) et Sophie Grech du Rassemblement national (26,59%). « Une victoire » qui « comble » la candidate de Marseille avant tout. « Les quartiers nords ont exprimé leur choix, a-t-elle indiqué dans un communiqué de presse. Ils ont fait la démonstration de leur maturité et de leur conscience politique. Je suis fière de ce que nous avons fait ensemble ».

La sénatrice Samia Ghali jouera un rôle déterminant dans ce troisième tour des élections municipales. Avec huit conseillers municipaux, elle est dans la position d’arbitrer. Vers qui ses précieuses voix se porteront le vendredi 3 juillet prochain ? Elle qui exprime au soir de ce second tour, que cette victoire revêt une « saveur particulière, car elle s’est construite en dehors des appareils politiques et souvent seul contre tous ».

D’ores et déjà, Bruno Gilles, avec trois élus, a annoncé qu’il ne voterait pas pour le Printemps Marseillais lors de ce scrutin à bulletin secret. Il s’abstiendra aussi si Martine Vassal reste candidate à la Mairie de Marseille, souhaitant une « candidature apaisante ».

Quid des voix du Rassemblement national, avec 9 postes au sein de l’hémicycle municipal ? mais qui devrait la jouer solo. Verdict dans quelques jours…

Le taux de participation définitif à Marseille pour ce second tour des municipales est assez faible avec seulement 35,25% mais il est plus élevé que lors du premier tour puisque ce dernier était de 32,76 %.

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