L’annonce du second tour des élections municipales le 28 juin a naturellement relancé la campagne. Sur un autre rythme et dans d’autres conditions, les tractations ont (re)commencé. L’idée d’une coalition avancée par Renaud Muselier, autour de Martine Vassal, et allant de Bruno Gilles à Samia Ghali, agite les observateurs.

« Le premier tour des municipales paraît tellement lointain qu’il est un peu étrange de revoir sa tête sur ces panneaux à travers la ville. Je remercie en tout cas les habitants du boulevard Baille de m’avoir sympathiquement épargné, même si je n’en tire aucune conclusion politique ». Ce tweet assorti d’un émoticone clin d’oeil, de Mathieu Grapeloup, candidat LREM dans les 4-5 arrondissements de Marseille, est révélateur.

Les affiches ont vieilli, jaunies par le temps, émiettées par la pluie. Sur certaines, on ne distingue plus le visage des candidats. Seuls quelques couleurs et les mots d’un slogan donnent un indice de la personnalité politique qui s’affichait alors en grand format. Le temps d’un entre-deux tours traditionnel s’est étendu, traversé par une crise sanitaire, économique et sociale sans précédent. Suspendue durant deux mois, la campagne s’est naturellement relancée après que le gouvernement a fixé la date du second tour au 28 juin prochain.

Le « pacte de raison » de Muselier vivement critiqué

Les discussions entre formations politiques, loin d’être restées confinées, vont se renforcer et s’affirmer dans les prochains jours pour trouver des accords. Dans ce paysage, le Printemps marseillais qui a créé la surprise en arrivant en tête au premier tour (23,44%) constitue une menace pour la droite qui veut conserver sa main mise sur la ville.

Pour lui barrer la route, chez Les Républicains, Renaud Muselier a récemment appelé à la constitution d’un « pacte de raison ». Dans les colonnes de La Provence, le président de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur, appelle à ce que dans chaque secteur de la ville, ceux qui sont arrivés derrière au premier tour fusionnent ou se retirent au profit de celui ou celle qui est arrivé(e) en tête. « Il faut bien avoir conscience que personne ne peut gagner seul (…) Je m’investirai dans la campagne et soutiendrai donc tous ceux qui sont arrivés en tête au premier tour », déclare-t-il à nos confrères.

Un « pacte » à faire ratifier par les candidats de Martine Vassal, Bruno Gilles, Yvon Berland, Samia Ghali et même les Verts « si certains le souhaitent ». Si sur le papier, cette large coalition pourrait largement battre le Printemps Marseillais, elle est loin de faire l’unanimité.

Et le moins que l’on puisse dire, c’est que cette idée ne séduit pas du tout Debout Marseille, qui a immédiatement opposé une fin de non-recevoir.

« Le président de la région Sud perd le Nord »

Les candidats de la liste écologistes et citoyennes estiment même que le « président de la région Sud perd le Nord ». Dans un communiqué de presse, l’ensemble des candidats de secteur jugent que ce « pacte de raison autour de l’héritière », est une « combine de déraison (…) Cet héritage politique incarné par madame Vassal était encore récemment fustigé par monsieur Muselier qui n’avait pas de mots assez durs pour le qualifier de gestion publique incompétente et d’immobilisme.
 D’ailleurs, il y a encore quelques semaines, il déclarait publiquement que c’était de la folie d’élire madame Vassal qu’il présentait comme l’héritière d’un système défaillant ».

La boussole écologique de Debout Marseille ! n’indique qu’une seule orientation : changer la gouvernance de la ville et transformer Marseille. Une ambition partagée avec leurs copains du Printemps marseillais. Le rapprochement est en marche entre les deux formations, même si les écologistes ne ferment la porte à aucune discussion.


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Et les stratégies d’avant confinement, ne seront peut-être plus celles du déconfinement. Dans le 13/14e arrondissement, fief du candidat RN, Stéphane Ravier (33,49%), les cartes pourraient une nouvelle fois être rebattues.

Pour rappel, la liste du Printemps Marseillais, menée Jérémy Bacchi et celle de Julien Rossi, pour Samia Ghali, avaient décidé de se retirer pour faire barrage à l’extrême-droite. Une décision d’ailleurs saluée par Martine Vassal, et qui plaçait son candidat David Galtier (LR) arrivé troisième au premier tour (18,22%), en position de favori pour barrer la route à Stéphane Ravier.


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« Un aveu de faiblesse » pour la droite

Même si rien n’est arrêté, la pertinence de ce retrait est aujourd’hui remise en cause. Julien Rossi aurait émis le souhait de se maintenir. Le candidat Bacchi pourrait-il revenir dans la course ? Pour l’heure, le secrétaire départemental du PCF13 se refuse à tout commentaire, et continue de croire à ce fameux printemps marseillais, même si l’été sera déjà bien avancé fin juin.

À ce titre, les récentes déclarations de Renaud Muselier sonnent pour lui comme « un aveu de faiblesse de la part de la droite, qui sent un véritable danger de perdre la ville. La droite cherche par tous les moyens à se rassembler malgré tous les coups qui ont été portés par les uns et les autres au premier tour. Je ne sais pas si on est au début ou au bout des tentatives de rassemblement des droites. Il est évident que si nous n’avions pas fait la démonstration que nous ne pouvions pas gagner la ville, ce genre de propos n’auraient pas existé, donc c’est une invitation à poursuivre dans notre dynamique ».

Bruno Gilles : pas de « pacte » avec Martine Vassal

Et les espoirs du président de régions de France risquent d’être déçus, car Bruno Gilles n’a aucune intention de sceller un quelconque « pacte », du moins avec Martine Vassal. Les mots à l’encontre de la présidente de la Métropole Aix-Marseille Provence à l’issue du premier tour du scrutin retentissent toujours comme un petit refrain. D’autant que l’élection marseillaise se joue toujours par secteur. Même si les deux figures féminines Michèle Rubirola et Martine Vassal, arrivent respectivement en première et deuxième position, il ne s’agit « pas d’un scrutin présidentiel », affirme le sénateur, qui ne compte pas suivre l’expression « circulez y’a rien à voir ». Bien au contraire. Le candidat ex-LR est dans la logique de se maintenir, là où il le peut.

Et sur ce point d’ailleurs, il est très clair : « si toute la journée, on dit qu’il faut stopper la gauche, l’extrême gauche et Mélenchon, commençons par nous positionner pour les battre, dans les secteurs où ils ont des têtes de listes symboliques, souligne-t-il. Mais je n’entends pas un mot là-dessus. Pas un mot sur le 2-3e et pire sur le 4-5 », où Michèle Rubirola est arrivée en tête (37,38%) devant Bruno Gilles (22,11%). Ici, tout le monde aurait dû faire la queue pour venir me filer un coup de main, mais là personne ne parle de ce secteur, comme s’il n’existait pas sur la carte électorale ».

Lui verrait plutôt un retrait de la LR Solange Biaggi, arrivée en troisième position dans le 2e secteur (16,46%) derrière l’élu socialiste Benoît Payan du Printemps marseillais (25,99%) et Lisette Narducci (16,71%) sa candidate, d’autant que les discussions dans ce secteur, entre Maliza Saïd Soihili (Berland 2020) 8,26% et Alain Lhôte, (Marseille avant tout » (10%) vont bon train et pourrait déboucher sur un accord prochain, sauf revirement. La candidate Biaggi, elle, n’a semble-t-il pas l’intention de retirer sa candidature.

Sans compromis satisfaisants avec le Printemps Marseillais, des Verts-compatibles pourraient aussi se rallier au candidat.

Martine Vassal et ses candidats, quant à eux, sont arrivés devant leurs alliés potentiels dans les 1-7 (en ballotage défavorable face au Printemps marseillaise), dans les 6-8, 9-10, 11-12 et 13-14. La candidate LR, qui a toujours tendu la main à Bruno Gilles, n’a exprimé jusqu’ici seulement sa position sur la tenue du second.

« Charivaris politiciens et les jeux d’appareils »

Quant à Yvon Berland, La République en marche, il « a missionné des discussions avec les acteurs – l’exception du FN – susceptibles de diriger notre ville et notre métropole pour les six années à venir. Si des points de divergence nous séparent incontestablement, nous devrons néanmoins trouver une plateforme commune visant à répondre aux attentes des Marseillaises et des Marseillais. Il ne s’agira pas, ce faisant, de donner un blanc-seing à tel ou tel mouvement ou personnalité politiques, mais plutôt de faire peser nos ambitions de transformation politique et nos valeurs de progressisme, de probité et de transparence au sein de la future majorité municipale », exprime l’ancien président d’Aix-Marseille Université.

Son projet n’a pas rencontré « le succès escompté faute de temps notamment », avance-t-il. Il avait rassemblé 7,88% des suffrages. Samedi soir, à l’heure de la rédaction du communiqué de presse, pour indiquer sa position en vue du second tour, il affirmait qu’aucune discussion n’avait « été engagée et, a fortiori, aucun accord n’a été scellé. L’avenir de Marseille m’est trop important pour tomber dans les charivaris politiciens et les jeux d’appareils d’un autre temps dont nos concitoyens sont las ».

Le silence de la Madone

Quant à Samia Ghali, dans la réserve depuis le début de la crise sanitaire, hormis sur des questions nationales liées à la crise sanitaire du Covid-19, elle a décidé de ne pas s’exprimer sur le sujet « pour l’instant ». Mais elle aura besoin d’alliés pour le second tour.

Les premières signatures de fusion de listes devraient intervenir dans les prochains jours. La date de clôture du dépôt des listes définitives devrait être fixée au 2 juin.

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