Les discussions entre Printemps Marseillais et Debout Marseille en vue d’un accord de second tour pour les élections municipales devraient intervenir prochainement. Les deux formations partagent la même volonté de « changer Marseille ».

Le petit couac semble derrière. Le cap, lui, reste inchangé : gagner et transformer Marseille. Et pour avancer dans la même direction, il a fallu remettre « les pendules à l’heure », au sein de Debout Marseille, après les récentes déclarations de Sébastien Barles. Dans un entretien accordé à La Provence, et paru mardi matin, la tête de la liste écologiste et citoyenne annonce son soutien à Michèle Rubirola. Il estime que la candidate du Printemps Marseillais, arrivée en tête au premier tour des municipales (23,44%), « serait une très bonne maire de Marseille ».

Seulement voilà, les propos du candidat à la mairie de Marseille, qui a recueilli 8,10% des suffrages lors de ce premier tour, étaient quelque peu prématurés au goût de ses coéquipiers, « même si ses paroles sont sincères et qu’il s’agit de la vision qu’il porte au sein de notre rassemblement », note Hervé Menchon, tête de liste Debout Marseille dans les 9/10. Car cette intervention n’a pas été concertée. « Nous sommes un rassemblement d’écologistes, de citoyens, de personnes non encartées, d’associatifs… ça n’était pas le reflet de la position de l’ensemble de notre groupe et ne constituait pas la base de négociations », poursuit l’écologiste.

Mises au point et cap sur Marseille

Une expression qui fait désordre, pour une formation qui a tenu sa première conférence de presse sur la thématique « Oxygéner la démocratie ». Et lorsque l’on sait que deux réunions prévues de longue date étaient organisées le soir même [lundi soir, ndlr] : une visio-conférence avec les têtes de liste, suivie du comité de pilotage. « Donc évidemment, nous avons été surpris par la prise de parole de Sébastien Barles », ajoute Christine Juste, tête de liste Debout Marseille dans les 6/8, « alors que nous sommes dans une démarche collégiale, une aventure collective. Nous avons d’ailleurs toujours fait voter tous nos adhérents, nos décisions ont toujours été prises jusqu’alors de manière démocratique », explique-t-elle, avant d’ajouter : « On n’a toujours pas eu la moindre discussion sur les enjeux programmatiques ».

La porte-parole régionale d’Europe Ecologie les Verts va même plus loin : « C’est une évidence que nous allions parler avec les gens du Printemps. Aujourd’hui, Martine Vassal (LR) et Michèle Rubirola peuvent être maire de Marseille. Et comme d’autres candidats, Sébastien Barles ne peut plus y prétendre et redevient une tête de liste de secteur comme les autres ». Après la petite mise au point nécessaire, l’enjeu reste : « changer d’équipe aux commandes de cette ville et la transformer », poursuit-elle, confiante sur la suite des événements.

« Trouver un accord de partenariat respectueux des uns et des autres »

Dans le processus de fusion, les écolos veulent avoir voix au chapitre. « Plus que jamais, il faut arriver à faire ce rassemblement très large », réitère Sébastien Barles. « Pour ce faire, il faut un contrat. C’est ce qu’on a toujours défendu. Sur quoi on se met d’accord ? Qu’est-ce qu’on propose aux Marseillais ? Et trouver un accord de partenariat respectueux des uns et des autres ». Et cela sous-entend la proportionnalité sur les listes fusionnées. « Pour respecter un partenaire, il faut respecter la proportionnalité, c’est d’ailleurs les règles du parlement européen », reprend la tête de liste des 1-7e arrondissements.

Il juge qu’ils doivent être entendus sur le fonctionnement d’une nouvelle administration locale et sur la manière de repenser « les directions des services. C’est essentiel de participer à cette nouvelle majorité, de former un bloc majoritaire autour des priorités ».

Autre volonté : voir certaines propositions être mises en œuvre, à l’instar du revenu de la transition écologique, les plans de reconversion industrielle, le projet de cité des métiers de demain ou encore le fameux « collège du futur ». Une instance parallèle du conseil municipal « qui va gérer le temps long, avec les grands plans de planification écologique, de transition énergétique, de grands plans de déplacements, de grands schémas structurants. Ça ne doit pas être pensé uniquement par les élus qui pensent à leur réélection, mais par des citoyens experts qui sont là pour l’intérêt général », poursuit Sébastien Barles.

Il assure une nouvelle fois que Michèle Rubirola est la personnalité la mieux indiquée pour assurer la fonction de premier magistrat de la deuxième ville de France. « Plus encore dans un contexte de crise sanitaire. Elle est médecin, écologiste… elle peut prendre soin de la ville de Marseille, elle incarne ça ».

Christine Juste trouverait, elle aussi, regrettable l’absence « d’élus écologistes au troisième tour à Marseille. J’ai beau vouloir que la ville soit gagnée, j’aimerais quand même des élus écolos pour la transformer ». Et de préciser : « ce n’est pas que je veuille sauver ma position, mais je préfère m’en référer à des élus écologistes ».

Un désir encore plus ardent de changement

Les négociations sur le fond n’ont pas encore débuté entre ces deux nouvelles formations politiques. Après des rencontres informelles, les discussions vont intervenir sous peu entre ces deux partenaires naturels qui auraient pu faire l’union dès le premier tour. Sans vouloir refaire l’histoire, Jean-Marc Coppola, élu PC et tête de liste dans les 15-16e arrondissements de Marseille, tire les conclusions avec sobriété. « C’est une surprise pour certains que le Printemps arrive en tête. Il est certain que dans des secteurs où nous ne sommes pas arrivés en tête, cette dynamique a manqué, c’est évident. Si je prends le 15-16 que je connais le mieux, sans une liste EELV, la donne aurait été différente, mais cela fait aussi partie de ce mode électoral où, au premier tour, on choisit, et au second on élimine », explique l’élu, qui a enregistré 19,16% des suffrages.

Ce rapprochement sans surprise est annonciateur d’un « résultat positif, car au-delà de gagner, ce qui compte c’est d’apporter des réponses et des perspectives aux Marseillais. Cette volonté de changement ne s’est pas estompée avec la crise sanitaire, bien au contraire. Et nous allons encore plus travailler à ce désir de changement très fort ». L’exemple du rétropédalage récent sur la réouverture des écoles est pour lui une nouvelle illustration de la « mauvaise gestion de cette ville. On avait prévenu ! Ça fait tourner en bourrique les familles, les personnels… Cela fait partie des changements qu’il faut mettre en place sur la façon de pratiquer la politique, en écoutant les Marseillais, en les associant », poursuit-il. Question programme, le candidat reconnaît, par ailleurs, qu’il ne devrait pas y avoir « de points de blocages insurmontables qui feraient capoter » l’union.

« C’est autour du Printemps Marseillais que s’opère le rassemblement »

Même discours du côté de Benoît Payan. Pour l’élu PS, arrivé en tête dans le 2/3e arrondissements (25,99%) : « Dès le début de cette grande aventure, nous avons porté ce grand rassemblement comme une condition nécessaire à la victoire. Cette ville a besoin de changer, et pour changer on doit se rassembler. Et on a toujours souhaité le faire avec nos amis d’Europe Ecologie Les Verts. On aurait aimé que cela se fasse avant le premier tour. C’est maintenant ».

Dont acte. L’élu veut laisser le temps « aux amis d’EELV » pour prendre leur décision. « Je veux respecter ce temps, mais je sais que c’est avec eux et celles et ceux qui veulent changer la ville qu’on va réussir. C’est un signal, c’est bien la preuve que c’est autour du Printemps Marseillais que s’opère le rassemblement et que va se faire cette dynamique. Pour les Marseillais qui nous ont mis en tête du premier tour de l’élection municipale, on porte une vision d’avenir et de changement pour cette ville. »

Préserver le débat démocratique

Pour les deux mouvements, dans la perspective d’un second tour fin juin, la santé reste la priorité, même si la démocratie doit s’exprimer. Jean-Marc Coppola est plus favorable à jouer les deux tours à l’automne, et avance comme d’autres candidats les difficultés liées aux conditions de campagne dans ce contexte de crise sanitaire. « Aujourd’hui, il y a une crise sanitaire, des effets traumatiques et psychologiques sérieux, une crise sociale, une crise alimentaire encore plus forte, et je doute que la démocratie gagne en se précipitant comme ça. D’autant plus que les conditions de la campagne ne sont pas les mêmes que si nous étions dans une situation normale. On ne peut pas faire de porte à porte, de distributions de tracts, de rassemblements, de débats. Là aussi ceux qui seront privés, par la rupture numérique, d’un certain nombre d’accès aux réseaux sociaux vont être privés du débat démocratique. Je comprends que l’on veuille tourner le page, mais si on veut un vrai débat démocratique, de confrontation, il faut le temps, les moyens et les conditions pour le faire. Et c’est ça qui m’anime ».


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