Le plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI) a une nouvelle fois essuyé les critiques à l’occasion du dernier conseil métropolitain de l’année, mais néanmoins été adopté à la majorité.

Et de 28 ! Depuis l’arrêt du PLUI, en juillet 2018, c’est la 28e fois que le document de planification est délibéré. 27 fois dans les 18 communes concernées, dans les mairies de secteur et en conseil de territoire la semaine dernière. Et ce jeudi 19 décembre, à l’occasion du dernier conseil métropolitain de l’année.

Pour la majorité, le PLUI s’impose comme un projet politique, « dans le bon sens du terme », a insisté Laure-Agnès Caradec, vice-présidente de la Métropole, dans la mesure « où il a été élaboré avec les 18 maires aux tendances politiques différentes ».

« Je ne peux me satisfaire de ce plan pour la ville »

Si le PLUI vise à harmoniser les règles d’urbanisme en un document unique, dessinant une vision territoriale pour les 15 ans à venir, force est de constater qu’il ne fait toujours pas l’unanimité dans l’hémicycle métropolitain, surtout quand il s’agit de Marseille. « Je ne peux me satisfaire de ce plan pour la ville », a déclaré Florence Masse (PS). « Il ne recueille pas l’adhésion des Marseillais, des voix se soulèvent tous les jours », comme celles des habitants venus manifester en ouverture de la séance.

L’élue a énoncé ses griefs, regrettant que le PLUI « n’intègre pas de dispositions fortes », plus favorables à la santé, à la qualité de l’air, à la préservation des espaces, à un équilibre dans sa densification… « Rien n’est acté sur les secteurs pour la trame verte et bleue en zone AU [en attente d’urbanisation, ndlr] qui sont autant de réserves de chasse pour les aménageurs et les promoteurs mais que vous comptabilisez dans les milliers d’hectares d’espaces verts en pleine terre, comme pour vous donner bonne conscience ».

Le logement social toujours au coeur du débat

En conformité avec son dernier vote en conseil municipal, puis en conseil de territoire, Florence Masse s’est prononcée contre. Même vote pour Christian Pellicani (PC) qui, lui, est revenu sur la définition du terme « concertation », teintée « d’indifférence » vis-à-vis des citoyens, sur l’insuffisance des propositions en matière de logement social et de mixité sociale… (le seuil du PLU de la ville était de 30% de HLM pour toute opération d’au moins 120 logements. Après avis de la commission, il a été abaissé à 80 logements (30%).

« Le PLUI n’apporte toujours pas de réponses suffisantes aux enjeux actuels : la mixité sociale, la rénovation énergétique des logements, la pollution de l’air… et les réponses aux enjeux de demain, changement climatique, transition énergétique », a jugé Anne-Claudius Petit (UDI), alors que PLUI aurait pu dessiner une ville plus résiliente, plus durable et surtout plus agréable à vivre ».

La conseillère métropolitaine, également vice-présidente de la commission croissance verte, transition énergétique, énergie et déchets, à la Région Sud, regrette aussi la date du vote, empêchant le document de se voir imposer les règles proposées dans le Sradett, (schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires) en vigueur depuis octobre et qui, selon elle, répond à un certain nombre de ces enjeux.

La campagne municipale s’invite dans l’hémicycle  

Pas mieux, pour le marcheur Stéphane Mari qui a dénoncé une vision de la ville de Marseille tournée vers la spéculation immobilière « au lieu de bâtir un territoire durable », et des objectifs de construction pas encore assez ambitieux. Et d’ajouter : « Votre majorité à une conception de l’aménagement de la ville, la République en marche en a une autre. Yvon Berland, candidat à la mairie de Marseille, aura très prochainement l’occasion d’expliquer aux Marseillais son projet basé sur la transformation de la ville durable », signifiant qu’il vote contre.

Des propos qui ont immédiatement fait réagir le maire de Cassis, Danielle Milon : « Tous les candidats susceptibles d’être maires ont le droit de faire campagne ici ? », a-t-elle interrogé. « Non, c’est même un motif d’inéligibilité ! », a précisé la présidente de la Métropole, cédant la parole, Frédéric Guiniéri, porteur du PLUI sur le Pays d’Aix.

L’alerte du monde économique face à un urbanisme trop contraignant

Le maire de Puyloubier a mis en avant une crainte de la Chambre de commerce et d’industrie exprimée dans un courrier adressé à l’ensemble des maires. Son objet : le projet du PLUI, « une menace pour l’avenir de notre aéroport et le développement de notre territoire ».

La CCIMP avait donné un avis défavorable sur le projet en raison du classement en zone agricole de 20 ha de réserves économiques à l’ouest de l’aéroport de Marseille Provence; et s’interroge sur l’opportunité du changement d’affectation de cet espace en zone agricole qui hypothèquerait les perspectives de développement de l’aéroport.

Les représentants de la chambre dans leur restitution des 15 propositions aux candidats ont d’ailleurs alerté sur le fait que l’urbanisme était trop contraignant. « Ces terrains ne sont aujourd’hui pas ouverts à un projet quelconque », a souligné le maire. « Dans le cadre du PLUI, l’autre alternative serait un classement en zone d’urbanisation future réglementée ou qui nécessite un projet et une enquête publique. Aujourd’hui, nous ouvrons librement pour l’avenir un projet à l’aéroport, et en votant le PLUI Marseille Provence sans être de ce territoire-là, ce n’est pas qu’on ne voit pas l’avenir de notre territoire, mais c’est en pleine connaissance de cause ».

D’autant que le maire de Marignane et le directeur de l’aéroport « sont complètement en accord », assure Jean Montagnac, président du conseil de territoire Marseille-Provence, avant de céder la parole à Laure-Agnès Caradec, pour la dernière mise au point.

Levée des réserves et recommandations

A ceux qui se sont plaints du manque de concertation, elle a fait état des différentes étapes du processus enclenché depuis quatre ans, des 32 réunions publiques et des 19 commissaires enquêteurs qui ont rendu un « rapport favorable à l’unanimité de la commission d’enquête avec des réserves et des recommandations qui ont toutes été levées dans le document soumis à l’approbation » des élus ce jeudi.

Pour Laure-Agnès Caradec, le PLUI n’a pas été fait « dans l’indifférence ». Il a été construit « dans le respect du développement et de la préservation du territoire ». Concernant la trame verte et bleue, le PLUI « protège plus de 99% de cœur de nature et plus de 90% des axes de déplacements, de la faune identifiée par l’état initial de l’environnent ».

Une réduction générale des zones d’extension à l’urbanisation

Elle a rappelé que la priorité avait été donnée aux zones agricoles, avec une augmentation du nombre d’hectares ; une réduction générale des zones d’extension à l’urbanisation ainsi que des droits à construire en zones de frange (densification à 10% des zones urbaines de Marseille) ou encore un renforcement du pourcentage de pleine terre sur 8700 hectares à Marseille, soit 64% de la zone urbaine marseillaise.

Quant à l’étalement urbain, « il se fait en fonction d’une logique urbanisme-transports ». Pour répondre aux critiques sur les équipements publics, elle a choisi d’évoquer le cas de la nouvelle école Ruffi*. Laure-Agnès Caradec a déclaré que cet établissement accueillera 254 élèves des écoles actuelles environnantes et du parc habité qui comptent 25% de logements sociaux.

Le PLUI adopté, après le contrôle de légalité de la part de l’Etat et les ultimes mesures de publicité réglementaires, le PLUi sera opposable et rendu public, fin janvier 2020 « car c’est un document vivant ».


*La contestation s’était élevée contre une délibération du conseil municipal du 25 novembre dernier sur la sectorisation des écoles, indiquant que les élèves du quartier devront rester dans leurs préfabriqués, alors qu’un nouvel établissement ouvrira ses portes à la rentrée prochaine, à seulement quelques centaines de mètres de leur école. 

>Retrouvez l’ensemble des rapports et les conclusions d’enquêtes publiques ici 

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