« Soyons fous, croyons à la politique ». Avec Mad Mars, Olivia Fortin a fait le pari de casser les codes de la politique traditionnelle, faire tomber les barrières entre élus et citoyens, rassembler celles et ceux qui ont envie de faire bouger les lignes à Marseille. Qui est cette cheffe d’entreprise, porte-parole d’un collectif citoyen qui veut peser en 2020 ? « Once Upon a time » in Marseille.
Elle est en retard à notre rendez-vous. Il faut dire qu’Olivia Fortin n’arrête pas de courir. La dynamique cheffe d’entreprise rentre tout juste du Festival de Cannes. Lessivée. Les soirées tapis rouge, strass et paillettes sur la Croisette et les caprices de stars, elle connaît par cœur. Olivia collabore depuis des années avec Sony Pictures, avec lequel elle entretient une solide relation « de confiance et de respect ». Elle fonctionne comme ça Olivia. C’est son moteur. La première fois qu’elle travaille avec ce grand distributeur, « c’était pour faire venir Tom Cruise à Marseille », se souvient-elle.
À Cannes, sa mission, puisqu’elle l’a acceptée, était de coordonner toute la logistique et les équipes autour de la présentation du film « Once Upon a Time in Hollywood », de Quentin Tarantino. Apporter au réalisateur de renom son « cheese-burger saignant à 13h30 tapantes », ce n’est plus vraiment ce qui passionne la directrice de production. « Tout l’intérêt de ce métier c’est de pouvoir échanger, être au contact des gens avec qui je travaille depuis longtemps et encore une fois, j’ai la chance de travailler avec des gens fidèles. »
Olivia Fortin dans Clap ! Politique
D’un tristement célèbre 11 septembre 2001…
Olivia semble être un leader né. Durant son adolescence déjà, cette seule fille au milieu de quatre frères s’impose dans des fonctions de déléguée de classe, et se plaît à organiser des événements en tout genre. Elle sait déjà quelle sera sa voie « avant même de passer le bac ». Un peu d’histoire de l’art, et un BTS en poche, elle se lance dans la vie professionnelle à l’âge de 20 ans, rejoignant une personne à qui elle était seulement allée demander conseil. « Au bout d’une heure, il me dit de lâcher mon job et de venir travailler avec lui ».
Le premier événement de la toute jeune intermittente du spectacle, « c’est un voyage de 450 Américains, avec reconstitution médiévale. On est passé par Bordeaux, le château de Versailles… », résume-t-elle. Un séjour qui s’achève un tristement célèbre 11 septembre 2001. « Ils sont restés 15 jours de plus. Durant cette période, j’ai vécu les choses les plus somptueuses et les plus terribles, parce que tout le monde avait perdu des gens dans cette catastrophe ».
… à un sombre 5 novembre 2018
18 ans plus tard, c’est un autre drame qui la secoue. Celui de la rue d’Aubagne, à Marseille. Quelques semaines après ce 5 novembre 2018, Mad Mars « est mis sur orbite ». Olivia en est l’une des fondatrices et la porte-parole de ce collectif citoyen, dont l’origine remonte en réalité à 2016. Après une rencontre qui va marquer un tournant dans sa vie.
A l’époque celui qui va créer chez elle « un vrai électrochoc », a seulement 14 ans. Son nom : Kader. Un collégien qui, après une intervention de la cheffe d’entreprise dans son établissement scolaire, aspire à réaliser son stage de 3e avec elle. « Le premier jour, il arrive, casquette à l’envers, le signe sur le cœur pour dire bonjour et tout ce qui va avec… et l’après-midi je lui demande ce qu’il veut apprendre au cours de sa semaine et il me répond : « les codes parce qu’à l’école on n’apprend pas ça, et mes parents ne savent pas. Ça m’aidera à trouver du travail ». Je me dis que le gamin, il a tout compris », raconte-t-elle, avec une vive émotion.
Elle prend conscience à cet instant d’une certaine forme d’injustice à laquelle cette jeunesse est confrontée, d’autant plus que les « enfants de certains de mes amis ont la chance de faire leur stage dans des cabinets d’architectes, par exemple. C’est peut-être naïf de dire ça mais quand c’est pas juste on doit le dire ».
A bas les complexes, bonjour Science Po !
Hors de question pour elle de rester les bras croisés. Elle devient l’ambassadrice du dispositif « Viens voir mon taf » qui propose des stages à des élèves de réseaux d’éducation prioritaire. Son désir de « faire bouger les choses » va bien plus loin. La politique, c’est un univers qu’elle a l’habitude de côtoyer au travers des événements qu’elle organise, mais de là à en faire… Cette petite nièce de Pierre Rastoin, ancien maire des 13e-14° arr. de Marseille, se penche sérieusement sur ce qui se passe sur le territoire. Elle tombe sur les interventions de Benoît Payan (PS) sur internet. « Je ne le connaissais pas. J’ai pris contact avec lui et il m’a dit que des personnes comme moi pouvaient être appelées à participer au renouvellement des têtes et des idées ».
Quelques mots suffisent pour que cette jeune quarantenaire pleine de vie mette tous ses complexes au placard, et avec eux, cette idée préconçue que la politique n’est réservée qu’à une élite. Cependant, elle a conscience qu’il faut en connaître les rouages. Alors direction Science Po. Une personnalité exotique au milieu de futurs fonctionnaires, et pourtant l’étudiante décroche son diplôme sur le fonctionnement des collectivités territoriales haut la main. Major de sa promo, elle se nourrit durant cette année d’enseignement de tout ce qui peut lui permettre de « comprendre et mieux appréhender la fonction publique ».
« Comment faire émerger un projet audacieux ? »
Son stage au secrétariat général de la ville de Paris est une révélation supplémentaire. « Ça m’a permis de revenir avec une certitude, une obsession même : si on n’arrive pas à Marseille à avoir une fonction publique en état de marche, on ne fera rien. Je ne pars absolument pas du principe que nos agents sont des fainéants, mais il faut leur donner les capacités d’agir, et ça nécessite une impulsion politique forte ».
Propositions de partenariat avec d’autres villes d’Europe, formations, guides, annuaires… la Ville de Paris dispose, selon elle, d’un grand nombre d’outils « de qualité et d’actualité indispensables pour travailler. Ici, les agents disposent sur leur intranet d’une formation qui date de 2015 et d’un annuaire avec le nom des gens et le numéro de poste sans leur fonction… »
Boostée par cette certitude, il fallait transformer cette envie de faire bouger les lignes « en quelque chose de concret. Comment faire émerger un projet audacieux, moderne et réaliste pour la ville, et qu’il soit à la fois porté par les citoyens et les responsables politiques ? » C’est comme ça qu’est né Mad Mars, « soyons fous, croyons à la politique ! ».
Mad Mars, le trait d’union
L’objectif n’est pas « de faire le rassemblement de la gauche », mais d’être ce trait d’union entre celles et ceux qui partagent « la même envie et les mêmes valeurs d’écologie, d’égalité, de transparence, d’éthique… Et d’une gouvernance qui laisse enfin la place aux citoyens pour permettre à chacun de se réapproprier la ville ». Un collectif inclusif au cœur duquel les compétences multiples se complètent pour construire un projet pour le Marseille de demain. De La France insoumise à La République en marche, en passant par des élus de secteur, le collectif mise sur un échange franc, « persuadé que le temps de la sincérité est venue en politique », confie Olivia.
Poulet, patates et des bonnes blagues
Sa recette pour permettre à tout ce petit monde de se côtoyer : du poulet, des patates et des bonnes blagues. Et avec ça, un objectif sérieux. « On crée un contexte propice et des rapports nouveaux avec les responsables politiques. Un rapport de confiance. C’est une étape préliminaire importante qui laisse la porte ouverte aux élus qui souhaiteront nous rejoindre le moment venu », explique Olivia, dont le mantra n’est autre que le Festin de Babette. L’autre ingrédient dont elle ne peut se passer : « c’est l’amour, et il en faut, nous en avons cruellement besoin ».
Nouvelle étape le 7 juin 2019
Mad Mars va franchir un nouveau palier ce vendredi 7 juin. Une soirée aux Docks des Suds, rythmée par plusieurs temps forts. Le premier, avec la présentation d’un sondage réalisé par la Fondation Jean-Jaurès et l’Ifop en partenariat avec Libé, sur les attentes des Marseillais pour les prochaines municipales par le prisme de l’abstention. Les résultats seront mis en débat public.
Puis, Mad Mars mettra en lumière dix propositions qui émergent de ses soirées pitchs. « Ce n’est pas un programme politique et ce qu’on propose n’est pas exhaustif », précise la porte-parole. « C’est aussi une réponse à ceux qui nous demandent de clarifier notre position. Ces propositions sont des marqueurs de notre colonne vertébrale politique ».
L’objectif de ce rendez-vous est de parler d’idées, de vision… Olivia Fortin se félicite qu’un grand nombre d’élus aient répondu à l’invitation. « Nous avons invité les 101 élus du conseil municipal (…) et c’est déjà une réussite de parvenir à mettre dans une même pièce différentes personnalités pour réfléchir sur la ville de demain ».
Mad Mars, l’objet de tous les désirs
Viendra ensuite le temps de engagements. Ces prochaines semaines, Mad Mars entend consolider « la force qu’on représente avec les 21 signataires de l’appel « S’unir ou subir », et continuer à échanger avec les forces politiques ». La condition de réussite pour le collectif est de devenir l’objet de tous les désirs pour être un acteur incontournable du paysage politique marseillais. « Faire en sorte qu’on soit suffisamment représentatif, important, sexy… être ce creuset dans lequel faire vivre cette union nécessaire ». Et Olivia « peut d’autant mieux en parler » que devenir maire de Marseille ne l’intéresse pas. Mais pourquoi pas un poste d’adjointe en charge de la modernisation de la fonction publique, « pour faire entrer la deuxième ville de France dans une nouvelle ère ».
Olivia Fortin et sa « team » ont fait ce pari fou d’essayer de soigner « les grands brûlés de la politique », pour que « Mad » Mars 2020 soit une date qui marque l’histoire de Marseille.
> Retrouvez notre Clap politique ! vidéo à 18 heures.
j’aimerais avoir davantage de détails Mad Max groupement humain que nous sommes plusieurs à tenter de former de notre côté avec de multiples associations pour lutter contre la fracture sociale qui existe parfois très durement dans cette grande métropole régionale gangrenée par le népotisme, le clientélisme et l’esprit Front National, sans pour autant que l’esprit France insoumise soit correctement appliqué.