Pierre Grand-Dufay, entrepreneur et écrivain marseillais nous explique sa vision du monde en 2049 qu’il décrit dans son dernier livre, Le monde de Tim. Une vision qui se veut réaliste, et où Marseille est redevenue une « ville-monde » au cœur des nouvelles technologies.

Pierre Grand-Dufay, chef d’entreprise marseillais à la tête du fonds d’investissement Tertium est un personnage engagé dans la vie économique du territoire. Entre la présidence de la commission Economie-Emploi au sein de la Région Sud, celle de l’Union pour les entreprises des Bouches-du-Rhône et celle du Conseil de prud’hommes de Marseille, il aura investi des fonctions collectives durant 16 ans sur le territoire.

« J’ai donné. Aujourd’hui, mon message passe par les livres », nous a-t-il confié alors qu’il venait présenter son roman d’anticipation Le monde de Tim ( 2018, éditions Pierre-Guillaume de Roux ). Le livre projette le lecteur en 2047, dans un monde où les technologies et l’intelligence artificielle dirigent le quotidien des hommes. Le jeune Tim y apporte un regard bienveillant, et la quête d’un humanisme à retrouver au milieu des machines.

Ce livre est l’aboutissement d’années de recherches, afin de décrire un futur « qui est déjà présent », explique Pierre Grand-Dufay. Sans être technophobe, l’auteur, au cœur de ces questions dans sa vie professionnelle, pose des constats alarmants sur le présent, mais ouvre une vision positive de l’avenir. Avec les bons choix, la technologie pourrait, selon lui, devenir le meilleur ami de l’homme. Un enthousiasme qu’il projette également sur Marseille, que les nouvelles technologies devraient élever à nouveau au rang de « ville-monde ». Entretien.

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Made in Marseille – Décrivez-nous une journée type en 2047

Pierre Grand-Dufay – Je vais vous décrire la journée du père adoptif de Tim, chef d’entreprise à Paris : il est réveillé le matin par sa musique préférée qu’a programmée Esther, son IA (intelligence artificielle) personnelle, en prenant en compte son agenda et ses rendez-vous du jour. Esther a programmé l’allumage des lumières progressif en fonction de son réveil, et envoie Max, le robot ménager, préparer son petit déjeuner préféré. Max a déjà sorti les vêtements du jour qu’il a lavés, repassés, et choisis en fonction du temps et de ses goûts. Il est conduit à son bureau par sa voiture autonome, programmée également par Esther, et peut commencer à travailler en route. En montant au huitième étage, son ascenseur lui annonce que son rendez-vous est déjà arrivé. La lumière de son bureau s’allume seule lorsqu’il rentre, les stores s’inclinent e fonction du soleil, et la température a été automatiquement réglée pour être idéale à son arrivée. Il mène une réunion avec un interlocuteur japonais traduite numériquement et de manière instantanée. Esther sait qu’il aura 45 minutes pour déjeuner et lui a déjà commandé la salade et la boisson qu’il aime. Pas trop lourd car elle sait qu’il a un dîner important avec sa femme le soir même, elle lui dit d’ailleurs d’arrêter de boire car le taux d’alcoolémie des capteurs de sudation atteignent la limite. Elle fait défiler des plats à l’écran et diffuse leur odeur afin qu’il choisisse à la voix. Lorsqu’il rentre chez lui le soir, Max a mis la table, le plat a été commandé et livré, et Esther a vérifié que la bouteille de vin préférée dans la cave est à bonne température.

Ce n’est en rien de la science-fiction, tout cela existe déjà.

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Bientôt des robots humanoïdes dans les banques marseillaises ?

Made in Marseille – Doit-on s’inquiéter de l’intelligence artificielle et des nouvelles technologies ?

Pierre Grand-Dufay – C’est une très grande chance, il ne faut pas en avoir peur. C’est des lignes de codes dans une machine, c’est moins révolutionnaire que la calculatrice, qui n’a pas détruit le monde. C’est un outil électronique algorithmique qui conduit à améliorer nos capacités de réflexion, de production, de communication, d’organisation. Il faut l’utiliser à bon escient. L’IA pour conduire des voitures, c’est la diminution drastique des accidents. Les médecins disent eux-mêmes que quand les IA piloteront les opérations médicales, elles seront plus fiables. L’IA va rendre plus fiable la plupart des activités. Et plus confortable aussi.

Made in Marseille – Pourtant, le petit Tim voit les technologies d’un regard moins positif…

Pierre Grand-Dufay – Le regard de TIM concerne la déshumanisation que peuvent amener les nouvelles technologies. Ça nous touche aujourd’hui. Lorsque vous êtes dans la rue et que vous vous demandez si il fait beau, vous regardez votre smartphone, alors qu’il suffit de lever la tête ! On s’est aliéné avec toutes les fonctions réunies dans un même objet. Si on perd notre smartphone, on ne peut plus rien faire. Est-ce que on va vers l’homme augmenté ? On peut aussi aller vers l’homme diminué, c’est tout le débat posé par Tim.

Made in Marseille – Alors que la robotisation est perçue comme destructrice d’emplois, vous dîtes qu’elle va au contraire en créer ?

Pierre Grand-Dufay – En France oui. Mais c’est vrai que je suis le seul à dire ça. Mais au détriment de l’emploi dans les pays émergents, ce qui pourrait conduire à des vagues migratoires. Nos sociétés sont déjà extrêmement robotisées. De la station essence au supermarché où vous payez directement des machines, jusqu’à la salle de sport où votre prof de gym est un hologramme. La robotisation va s’intensifier en France où nous avons les meilleurs mathématiciens et équipes de recherche et développement. En faisant baisser le coût de la main d’oeuvre qui est toujours le plus élevé dans une entreprise, nous allons assister à un phénomène de « relocalisation » des entreprises en Europe qui seront de nouveau très compétitives. Et même si il y aura besoin de moins de travailleurs, le nombre croissant d’entreprises va compenser cela. L’âge d’or de la France arrive, et avant 2047.


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Made in Marseille – Et vous voyez Marseille tenir une place centrale dans le monde des nouvelles technologies ? 

Pierre Grand-Dufay – Marseille a été le centre du monde quand elle était le carrefour du commerce mondial avec les colonies. Grâce à sa position géographique et le tempérament de commerçants de sa population. Une place qu’elle a perdu depuis.

Mais elle peut redevenir une des principales villes mondiales en matière de nouvelles technologies, grâce à plusieurs facteurs convergents. D’abord les câbles haut-débit qui relient l’Asie et l’Europe par Marseille. On est face à un continent, l’Afrique, avec des leviers de développement et un potentiel de croissance extrêmement importants pour les nouvelles technologies. Il y a aussi ici un écosystème remarquable en matière de recherche et développement, dans l’enseignement avec l’immense université Aix-Marseille, et le nouveaux et nombreux incubateurs. Enfn, c’est une grande ville au bord de la mer, ce qui est très rare dans le paysage des villes mondiales. On a tous les ingrédients pour être une ville technologique de premier plan.

Ce qui nous manque c’est un « objet-monde ». Mais pas quelque chose de touristique. Si on fait, par exemple, du J1, le centre européen de l’intelligence artificielle. Ce serait un vrai facteur de dynamisme, d’attractivité mondiale. La vocation de Marseille n’est pas que touristique, son enjeu est l’attractivité technologique. C’est bien les touristes, mais il faut accueillir une population de startupeurs venus du monde entier. Le basculement de Marseille sur la place mondiale, il se fera par là. 

Je pense que tout le monde est d’accord, en premier lieu les décideurs. La Région qui a autorité en matière économique va dans ce sens, et toutes les autres collectivités aussi. C’est une question de temps, ça va arriver. On y est déjà presque, et ça aurait pu arriver plus tôt.

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