La marque marseillaise Espigas fait fabriquer depuis quatre ans des « alpargatas », une sorte d’espadrilles portée initialement par les cowboys argentins. Cette année, elle s’est lancé le pari de concevoir toute la production à Marseille et de la confier à des personnes en situation de handicap qu’elle prend d’abord le soin de former. Rencontre avec Bérengère Perret, l’une de ses fondatrices.
Un voyage de l’autre côté de l’Atlantique à la découverte des cultures étrangères marque forcément une vie sur le plan personnel. Dans le cas de Bérengère et Olivier Perret, partis en famille pendant un an sur le continent américain, c’est même leur vie professionnelle qui a été chamboulée. Leur rencontre avec les « gauchos », des gardiens de troupeau dans les plaines argentines, leur fait découvrir des chaussures un peu particulières qu’ils adoptent immédiatement : les alpargatas. De retour en France, l’enthousiasme est partagé par leurs proches.
Bérengère et Olivier décident alors de lancer leur marque d’alpargatas, cousines en quelques sortes des traditionnelles espadrilles, sous le nom d’Espigas. Leur première unité de fabrication se trouve dans la banlieue de Buenos Aires, en Argentine. « On s’est vite rendu compte de problèmes de qualité qui ne paraissaient pas importants pour les Argentins, mais qui l’étaient pour nous. On a donc changé d’unité de production et nous sommes allés en Chine. Mais produire à distance ne nous satisfait pas », met en avant Bérengère Perret. En cause : la distance et les difficultés que cela engendre, notamment en termes d’acheminement, et le manque de souplesse sur la production.
« On n’a trouvé aucune usine en France capable de fabriquer nos chaussures à un coût raisonnable, donc on a appris à les fabriquer nous-même ! Et maintenant, nous apprenons ce savoir-faire à des personnes d’un ESAT de Marseille (établissement et service d’aide par le travail, ndlr) avec l’objectif, à terme, que ce soit ces personnes en situation de handicap qui assurent toute la production », ajoute la fondatrice d’Espigas.
L’insertion de personnes en situation de handicap comme moteur
Bérengère et Olivier ont donc acheté les machines et l’outillage nécessaires à la fabrication de leurs alpargatas à la fin de l’année 2017. Des engins installés dans l’ESAT du Rouet (12e) début 2018 et qui, depuis, forment trois personnes en situation de handicap à la confection de ces chaussures. « Aujourd’hui, deux des trois employés savent faire les trois-quarts du process de fabrication, qui comprend tout de même 25 étapes. Pour finaliser le projet, il nous reste à former le chef d’atelier ».
Une formation qui passe par l’apprentissage d’éléments basiques comme la droite et la gauche par exemple. Le couple d’entrepreneurs a pour cela mis en place des processus mémo techniques pour aider les trois employés et rendre leur formation la plus simple possible.
Actuellement, entre six et 12 paires de chaussures sortent de l’atelier chaque jour. Quand, entre mai et juillet, au moins 1 000 paires devraient être fabriquées mensuellement. « On ne peut pas dire que l’on fabriquera tout à Marseille pour l’instant. On est à l’amorce de notre projet ! La transition se fera en deux ans. L’idée est d’abord de pérenniser ces trois premiers emplois et ensuite d’en créer d’autres et de diversifier les modèles de chaussures ».
Outre la fabrication des alpargatas, la marque souhaite aussi que toutes les étapes liées à la confection des chaussures se retrouvent dans l’atelier de l’ESAT. Comme la teinture des tissus, pour le moment réalisée dans une usine de Saint-Étienne faute d’en avoir trouvée une à Marseille.
Un coût plus élevé mais des valeurs respectées
Bérengère Perret le reconnaît : produire en local se révèle beaucoup plus onéreux qu’en Argentine ou en Asie. C’est pourquoi une campagne de financement participatif vient d’être lancée pour précommander la première collection d’alpargatas 100% confectionnée à Marseille. Elle se composera d’une série de 200 paires disponibles en trois coloris : bleu, blanc ou rouge. « Si la précommande fonctionne, ça aidera l’ESAT à embaucher d’autres personnes et ça permettra à notre projet de se développer », souligne-t-elle.
Malgré le coût, c’est surtout les avantages de la production locale que retient la cofondatrice. « C’est une économie qui permet à des personnes qui ne pourraient pas travailler dans le domaine de la mode de pouvoir désormais le faire. Et pour nous, cela nous donnera plus de souplesse, de proximité et de réactivité. On pourra réaliser du sur-mesure pour seulement 50 paires de chaussures par exemple, chose que l’on ne peut pas imaginer aujourd’hui ». Le consommateur aussi y est gagnant car la marque s’engage à proposer ses chaussures à un prix correct pour une chaussure de créateur, soit 59€ la paire.
Retrouvez la première collection d’alpargatas Espigas en précommande en cliquant ici.
Par Agathe Perrier
Très bonne idée, initiative !! Je trouve le projet intéressant et l’intégration des personnes en situation de handicap me touche personnellement. Se sentir et être utile, travailler, produire est fondamental pour appartenir à la société, L’intégration est un sujet toujours d’actualité parce que les hommes et les femmes de cette planète ne savent pas toujours vivre ensemble. Sur un produit de consommation courante, il est intéressant de voir que la production, fabrication peut être réalisée par des personnes considérées comme inadaptées… Eh bien prouvez leur que si !! Fabriquez vos chaussures et vendez les, je serai dans les premiers acheteurs !!! promis