Cela fait plusieurs mois que la polémique fait rage à Aubagne, autour du lieu emblématique de la culture locale ouvert depuis 1973 : la MJC, comprenez Maison des Jeunes et de la Culture, appelée aussi l’Escale.
D’un côté, la ville d’Aubagne qui a depuis l’arrivée de son nouveau maire Gérard Gazay (LR) en 2014, réduit la subvention accordée à l’association qui gère la salle tout en pointant du doigt une très mauvaise gestion financière, et de l’autre, un collectif de citoyens menés par l’humoriste qui officie sur France Inter, Nicole Ferroni, craignant de voir leur « Escale » fermer, faute de moyen, dès le mois de juin 2017.
«Honnêtement, il y a très peu d’espoir en ce moment. Il s’agit surtout d’essayer de mourir la tête haute». La phrase de Nicole Ferroni, marraine de l’association, a le mérite d’être claire. Elle est pour le moins alarmante. L’association d’éducation populaire de l’Escale serait vouée à disparaître ? En décembre dernier, la municipalité a décidé de récupérer la gestion des locaux à l’issue du bail actuel qui se termine en juin. L’avenir lui reste incertain.
L’Aubagnaise avait fait le buzz sur sa page Facebook avec son interpellation de la Ministre de la Culture au sujet de la MJC.
Des subventions à la baisse
A la suite des élections municipales de 2014, qui ont porté la victoire du candidat Les Républicains Gérard Gazay après près de 50 ans de gestion communiste, les subventions allouées à la structure ont chuté de 50% passant de 600 000 euros en 2012 à 290 000 euros pour cette année. En outre, le personnel mis à disposition par la municipalité n’étant payé que l’année d’après, la MJC se retrouve aujourd’hui dans une situation inextricable qui pourrait mener à la cessation de l’exploitation.
Ayant anticipé ces problèmes, l’association a fait parvenir à la mairie le rapport du commissaire aux comptes expliquant la situation difficile que connaît la MJC qui a lancé une procédure d’alerte. Dans un courrier envoyé aux participants de l’Assemblée Générale Extraordinaire de la MJC, Gérard Gazay explique que «cette situation est de la seule responsabilité de la MJC qui n’a pas su respecter ses engagements contractuels. En effet l’association n’a pas provisionné comme elle aurait dû le faire et a accumulé d’année en année, les erreurs de gestion».
De son côté, le rapport du commissaire aux comptes explique que les «efforts sont faits, d’une part en direction de l’activité de la MJC pour orienter la programmation vers des spectacles pratiquement autofinancés et des budgets très réduits, d’autre part, vers la recherche de nouvelles sources de financement». Après le versement des sommes dues au personnel détaché et le salaire des employés qui ne peut pas fluctuer, «l’association se retrouve à devoir faire vivre la structure et assurer son bon fonctionnement avec quelques dizaines de milliers d’euros pour l’ensemble de l’année» explique Nicole Ferroni.
La programmation en cause ?
Interrogée, la municipalité aubagnaise se défend de vouloir la mise à mort de la structure : «Si on voulait tuer la MJC, il suffirait de ne plus les subventionner du tout», affirme Philippe Amy, adjoint au maire en charge de la Culture.
Selon la mairie, les raisons de la baisse de subventions ne seraient pas liées qu’à la mauvaise gestion des ressources par l’association, mais aussi au nombre trop réduit d’activités proposées aux 12-18 ans : «Nous avons travaillé avec la MJC pour la reconquête du jeune public, mais les objectifs n’ont pas été atteints», nous explique Philippe Amy.
Quelle solution alors ?
La possible liquidation judiciaire de la structure ne signifie pas forcément la disparition pure et simple de la MJC, puisque la mairie entend mettre en place un partenariat avec elle ainsi qu’avec d’autres associations culturelles.
Ainsi, si la MJC perdait la gestion de la salle, l’Escale conserverait sa vocation première d’espace culturel et une synergie serait faite avec d’autres lieux comme le théâtre municipal ou celui de la Distillerie. Nul ne sait à quoi ressemblera le futur de la scène culturelle aubagnaise, ni le rôle que tiendra la MJC qui a toujours eu pour objectif de favoriser l’insertion par l’éducation populaire et l’accessibilité culturelle. « Beaucoup d’artistes commencent à la MJC, c’est dans des lieux comme celui là que naissent de véritables vocations professionnelles», explique Nicole Ferroni.
Quid de la saison prochaine ?
Une question reste toutefois en suspens : qu’adviendra-t-il de la structure et donc de ses activités l’année prochaine ? « La programmation se prépare toujours des mois an amont, j’ai bien peur qu’il n y ait pas de saison culturelle l’année prochaine, ou alors qu’elle soit particulièrement morose», nous confie Nicole Ferroni.
Une crainte rapidement balayée par Philippe Amy : « Certaines activités déjà en place seront maintenues et d’autres seront créées pour les jeunes, notamment par le développement des activités liées au numérique». L’adjoint à la Culture reconnait les connaissances et capacités de la MJC sur certains points, notamment les musiques actuelles et la danse moderne et entend continuer dans cette direction en ouvrant également la scène musicale à d’autres associations qui n’ont que peu de visibilité. Quant au sort des salariés de la MJC, il reste encore flou, même s’ils devraient, pour la plupart, conserver leur emploi.
Le bail de l’association culturelle prendra fin le 31 mai prochain et il faudra attendre la rentrée de septembre pour connaitre exactement le sort qui lui sera réservé. D’ici là, la mobilisation autour de la structure devrait continuer, notamment avec des groupes qui lui ont toujours porté beaucoup de considération comme Chocolate Jesus de Stephane Ribeiro alias Elvas, les Bongoaï, les Oaistar, Super Kemia, Joe Corbeau, etc.