Sup de Sub a pris ses quartiers dans les locaux de l’ancienne école d’architecture de Luminy. Cette « formation supérieure d’autodidaxie » repense l’insertion des jeunes en décrochage scolaire par une pédagogie artistique libre et diversifiée.
À Luminy (9e), entre les murs de l’ancienne école d’architecture, Sup de Sub réinvente le concept de formation aux beaux-arts. Fondée en 2019 par le cinéaste et plasticien Jean-Michel Bruyère, cette école hors normes redonne confiance à des jeunes de 16 à 26 ans en rupture scolaire ou sociale, à travers un parcours où l’art devient outil d’émancipation.
Ici, pas de salles de classe traditionnelles ni d’emploi du temps rigide. La soixantaine d’étudiants composent librement leur parcours parmi les différents ateliers proposés simultanément.
Alors que certains façonnent une tenue sur un buste de couture, d’autres prennent en photo leur dernière création textile ou interviewent leurs pairs à l’aide d’un enregistreur vocal. « Les jeunes vont où ils veulent, c’est leur choix qui prime », explique le directeur.
« Réintroduire l’art dans la société »
Après des décennies passées dans les milieux culturels qu’il juge « élitistes et autophages », ce dernier, membre du collectif international d’artistes LFKs, a créé cette école pour « réintroduire l’art dans la société ».
L’approche immersive de Sup de Sub mêle l’initiation aux pratiques artistiques comme le cinéma, le théâtre, la danse ou les arts numériques, à celle des sciences humaines, comme la philosophie, la sociologie ou l’histoire. Près d’une centaine d’intervenants professionnels proposent ces cours tout au long de l’année scolaire.
« C’est une école supérieure d’autodidaxie, où chacun apprend à apprendre par soi-même, avec la créativité au centre de toutes les préoccupations, insiste Jean-Michel Bruyère. Ce sont aussi les étudiants qui co-construisent le programme et s’auto-évaluent ».
Un accès « sans mérite ni diplôme »
L’admission se fait sans prérequis académiques. « On y accède par la volonté, sans mérite ni diplôme », comme le précise le site de la formation. Avec, pour objectif, « non pas de former des artistes professionnels, mais d’apprendre à faire sa vie comme une œuvre ».
Une méthode qui porte ses fruits, comme en témoigne Kahina, 25 ans, insatisfaite de ses quelques années de faculté. « J’ai appris à coudre, à faire du montage, du son… Mais aussi à réfléchir différemment grâce aux ateliers de philosophie », témoigne-t-elle.
Le cinéma, une matière plébiscitée
Si toutes les disciplines artistiques coexistent, le 7e art, et l’image plus généralement, s’imposent comme la passion commune. « Le cinéma est très valorisé, à la demande des élèves eux-mêmes », constate Jean-Michel Bruyère. Une attirance que Rémy Tampia, intervenant en photographie, explique ainsi : « Avec juste un smartphone, on peut déjà créer des choses étonnantes. Petit à petit, ils découvrent qu’ils ont tous une créativité à exprimer ».
Chaque mois, cette effervescence créative prend une dimension publique lors de « semaines de création » à la Friche la Belle de Mai. Ces temps forts, ouverts au public, permettent aux jeunes de présenter leurs réalisations en groupes autour d’une thématique définie.
Soutenu par le ministère du Travail via le dispositif 100% Inclusion, le projet a donné vie à une petite antenne à Bobigny, en Seine-Saint-Denis. À l’issue de leur parcours de dix mois, les étudiants de Sup de Sub ne reçoivent pas de diplôme, mais publient un portfolio numérique résumant leur parcours qui « reste éternellement sur le web », modifiable à volonté. Une innovation qui permet à ces jeunes de capitaliser sur leurs expériences artistiques pour construire leur avenir.