Installé au cœur du 15e arrondissement, l’artisan Clément Guéton fabrique des guitares et basses électriques artisanales et personnalisées.
Installé dans un conteneur transformé en atelier, au cœur du tiers-lieu Make ICI Marseille, Clément Guéton ajuste les contours d’un manche. Depuis 2023, cet ancien designer industriel a ancré son entreprise Ligérie Guitares dans le paysage marseillais et vient d’obtenir le label « Fabriqué à Marseille ».
Designer de formation, autodidacte en lutherie, il mène seul l’ensemble du projet. Chaque pièce est pensée dans le détail, construite à la commande, à partir de bois français, naturellement séchés et transformés localement.

Bois français, savoir-faire local : l’art de fabriquer des guitares durables
Créée en 2016 dans un garage près d’Orléans, Ligérie Guitares s’est installée à Marseille en 2023. « Au départ, j’avais envisagé de prendre un local indépendant, mais les loyers étaient élevés, et tout déménager et rééquiper semblait complexe », explique Clément. L’atelier partagé s’est révélé être une évidence : « Je n’avais pas forcément l’aspect collaboratif en tête au début, mais c’est devenu un vrai avantage. »
Récemment, cette implantation locale a été récompensée par le nouveau label « Fabriqué à Marseille », lancé par la municipalité pour valoriser les productions artisanales de la ville. « Être reconnu par la Ville en tant que fabricant marseillais, c’était quelque chose que j’avais à cœur », confie-t-il.
Attaché à une production responsable et durable, Clément privilégie le bois français issu d’arbres coupés autour de chez ses parents, en Auvergne : « Ce sont souvent les fermiers du coin qui me proposent leurs arbres lorsqu’ils doivent les abattre ». Le bois est ensuite récupéré, débité et mis à sécher naturellement.
Moderniser sans renier l’artisanat
Depuis son installation à Make ICI Marseille, Clément a fait évoluer sa façon de travailler. « Les machines m’ont permis de gagner en efficacité. Le dernier modèle que j’ai sorti a été entièrement conçu sur ordinateur et fabriqué avec une machine à commande numérique ». Cette évolution lui permet aussi de réfléchir à de petites séries pour les magasins locaux.
Clément souhaite aussi redévelopper un service d’entretien. « J’ai testé une après-midi de réglage à l’Hôtel de la Musique de Saint-Marcel, et ça avait bien marché. Je réfléchis à développer un point de rendez-vous régulier, peut-être même un local sur place ».
Au-delà de la production, l’atelier partagé stimule les échanges. « Je ne pensais pas forcément collaborer avec d’autres artisans. Mais ici, il y a une vraie richesse. J’ai bossé avec un artisan brésilien sur un berimbau (instrument traditionnel à corde), par exemple. Et dès qu’on a un souci technique, il y a toujours quelqu’un pour aider ».
Des modèles signature jamais identiques
Chez Ligérie, chaque guitare porte un nom de cépage : Sauvignon, Syrah… « Je me suis toujours dit qu’une bonne guitare vivait comme un bon vin », sourit Clément. « C’est aussi une manière de me rattacher au terroir ».
Les formes sont dessinées par ses soins. « J’ai créé mes propres modèles, que je fais évoluer. J’aime garder une silhouette reconnaissable, mais jouer sur les détails. » Fabriquées à la commande, toutes les guitares sont uniques. « J’en ai fabriqué presque une centaine, et je n’en ai jamais fait deux identiques ».
« Je n’ai quasiment pas de stock, juste quelques modèles d’expo. Dès qu’une commande est finie, elle part », précise-t-il. Les prix débutent à 1300 euros, avec un panier moyen autour de 1800-1900. « On peut toujours monter en gamme, mais l’essentiel, c’est le bois ».
Des guitares fabriquées pour ceux qui les jouent
Clément fabrique ses guitares en dialogue constant avec les musiciens. « Quand on fait appel à un artisan, ce n’est jamais pour un premier instrument. Les gens savent ce qu’ils veulent. Mon rôle, c’est de traduire leurs envies et de les conseiller si une configuration ne fonctionne pas ».
Il tisse aussi des liens avec la scène locale. « Mon premier partenariat avec la scène marseillaise, c’était avec le bassiste du groupe Blueming Discord. On a conçu une basse personnalisée ». Il collabore aussi avec SP Custom, fabricant de micros de la région. « J’ai ses micros sur mes guitares, et lui a une de mes guitares pour présenter ses micros ».
Clément cherche aussi à se rendre plus visible sur le terrain. « J’ai participé au Paris Guitar Festival et au festival de la Sainte Roque, que je vais refaire cette année. J’aimerais aussi participer à un festival rock à Marseille ».
Clément ne se contente pas de fabriquer. Après avoir tout appris par lui-même, il souhaite transmettre le geste. « J’ai toujours eu envie d’expliquer ce que je fais. J’aimerais développer des stages où les gens fabriquent leur propre guitare. C’est comme ça que j’ai appris, en mettant les mains dedans ».