Les élus régionaux soutiennent à l’unanimité la candidature des Alpes françaises pour accueillir les Jeux d’hiver en 2030. Événement mondial auquel s’oppose toutefois le collectif « No JO ».

C’est la dernière ligne droite. Les élus régionaux ont voté, jeudi 26 octobre, à l’unanimité, leur soutien à la candidature des Alpes françaises pour organiser les Jeux olympiques et paralympiques d’hiver 2030, portée par les Régions Provence-Alpes-Côte d’Azur et Auvergne-Rhône-Alpes.

Il s’agissait, avec cette délibération, de prendre les engagements nécessaires à la bonne coordination du travail de la Région Sud avec le Comité national olympique et sportif français et la Région Auvergne-Rhône-Alpes (Aura), et renforcer le dossier définitif de candidature qui sera déposé le 7 novembre prochain.

« Au fond, cela ne doit pas nous étonner, car nous sommes un petit pays de montagne. Les Alpes du Sud sont le deuxième domaine skiable de France. Avec le Nord, nous devenons le premier domaine skiable du monde, 65 stations, 2 500 kilomètres de pistes de ski alpin, 200 kilomètres de ski de fond. Nos Alpes, c’est une terre de champions », a déclaré Renaud Muselier (Renaissance), dans l’hémicycle régional.

« Ces JO peuvent accélérer, désenclaver, faire progresser nos vallées »

À l’heure du réchauffement climatique et dans la ligne de la Cop d’avance engagée par l’institution en 2017, les Jeux des Alpes françaises se veulent vertueux sur le plan environnemental. « Nous aurons de la neige jusqu’en 2050, pas partout bien sûr, mais dans des proportions qui font de nous un lieu potentiel d’accueil de grands événements », poursuit le président de la Région Sud, en s’appuyant sur l’étude de Climsnow.

« Ces JO peuvent accélérer, désenclaver, faire progresser nos vallées », dans lesquelles la Région a investi 200 millions d’euros, avec un plan d’accompagnement des stations dans une démarche de sobriété énergétique et d’innovation. Illustrations avec la couverture solaire de 30% des équipements de Serre-Chevalier, l’expérimentation menée dans la vallée de l’Ubaye qui vise à fabriquer de la neige artificielle à partir des eaux usées ou encore l’achat de dameuses électriques ou à hydrogène dans d’autres stations.

Ces Jeux permettent aussi de développer une expertise « dans l’accueil de grands événements internationaux avec des retombées économiques et touristiques à la clé », poursuit le président de Région, saluant au passage son homologue de l’Aura, Laurent Wauquiez (LR). « Ça se passe très bien. On a passé des accords, on a rapproché les Alpes du Nord et du Sud. On a réalisé à quel point travailler ensemble, c’est intelligent, et finalement on gagne toujours à être plus intelligent à travailler ensemble ».

Le RN demande une consultation citoyenne

Si la voix des écologistes ne s’est pas fait entendre dans l’hémicycle, Franck Allisio, président du groupe Rassemblement national, droite populaire et indépendants, lui, taquine : « Faites attention avec M. Wauquiez, je pense qu’il [Laurent Wauquiez] veut vous voler à Macron ».

Favorable à l’accueil des Jeux, l’élu a souligné « l’importance historique et symbolique de cet événement sportif mondial, une formidable mise en lumière de notre territoire ». Toutefois, Franck Allisio pointe du doigt les conséquences financières, environnementales et logistiques découlant de cette décision. Il met en avant la transparence des coûts de l’organisation pour « que ça ne se transforme pas en fardeau financier à long terme » et alerte sur une potentielle sous-estimation de la logistique : « il faut que notre région soit préparée à faire face à la gestion des infrastructures , des transports… sans impacter la qualité de vie des habitants ».

Dans l’optique d’une grande fête populaire, l’élu plaide en faveur d’une consultation directe auprès des concitoyens. « Nous devrions leur donner l’opportunité de s’exprimer sur un événement comme celui-ci et asseoir une légitimité supplémentaire ».

Une demande qui s’inscrit d’ailleurs dans le droit fil du Comité international olympique (CIO) qui a évoqué en 2018 la possibilité d’un référendum systématique dans l’organisation des jeux, après l’accumulation des « non » dans les villes où un vote a été tenu (Munich, Davos, Cracovie, Hambourg, Calgary et Sion). « Cette consultation est pour nous importante dans la construction de cette candidature » et permettrait, selon lui, « d’éteindre les incendies que les écologistes trop zélés pourraient allumer ».

Les arguments de « No JO »

Un débat citoyen. C’est justement ce que réclame un collectif d’organisations et de particuliers qui questionne la légitimité de ces Jeux dans un contexte de réchauffement climatique. Manque de neige, coût exorbitant, dépense publique non nécessaire… « No JO » donne de la voix pour sensibiliser à ce qu’elle assimile à une « hérésie climatique ».

« À quel moment dans une société, on engage autant d’argent public – et privé – ça va chambouler beaucoup de choses en termes d’infrastructures, sans la moindre concertation publique », dénonce Stéphane Passeron, porte-parole du collectif.

Ce sportif de haut-niveau, ex-membre de l’équipe de France de ski de fond, suit de près le dossier depuis l’annonce de la candidature il y a deux ans, à l’occasion de la cérémonie des vœux de Renaud Muselier, à la presse. Malgré le soutien du Président de la République, de la ministre des Sports, du monde économique et sportif, lui maintient que « dans un contexte d’inflation, avec la hausse du coût de l’énergie, on pourrait mettre en place d’autres orientations budgétaires. On n’a jamais gagné d’argent sur les Jeux olympiques ».

L’ancien fondeur a fait le deuil de sa passion pour défendre sa juste cause : le climat. « Chaque JO accélère la problématique environnementale. Les stations de moyenne montagne ferment les unes après les autres, il faut se remettre en question », déplore le moniteur de ski. Il cite aussi en exemple, « les millions de touristes et supporters qui prennent des avions pour se rendre sur les compétitions, comme les JO 2024 à Paris », se référant au récent rapport du Giec. « Quels que soient les scénarios d’émission, le GIEC estime que le réchauffement de la planète atteindra 1,5°C dès le début des années 2030 », précisent les scientifiques.

Etude qui conforte toutefois la France dans sa détermination à agir. « Sa stratégie énergétique repose sur quatre piliers : la sobriété énergétique, l’efficacité énergétique, l’accélération du développement des énergies renouvelables (EnR) et la relance de la filière nucléaire française ». La Région Sud est d’ailleurs territoire-pilote de la planification écologique. 

L’organisation d’un référendum

La volonté d’organiser des Jeux vertueux sonne pour le Haut-Alpin comme un vœu pieux. « Je vois mon adversaire et il est monstrueux : le problème climatique, ce n’est pas du bricolage. Les Jeux d’hiver sont à la fois victimes et accélérateurs du réchauffement climatique. Plus la planète se réchauffe, plus la neige se raréfie, et plus les Jeux deviennent dépendants d’un ersatz polluant ».

No JO souhaite la tenue d’un référendum et l’a d’ailleurs fait savoir dans une tribune publiée dans le journal Le Monde le 12 octobre dernier. « Le référendum serait une occasion d’aborder leurs arguments. Car enfin : est-ce que la vertu économique des Jeux d’hiver est toujours d’actualité ? Est-ce un modèle économique à défendre ? Voulons-nous vraiment de nouvelles pistes de bobsleigh ? Et des tremplins de saut à ski ? Leur ratio utilité/carbone est-il convenable ? Ces enjeux doivent faire l’objet d’un vrai débat public », estiment les signataires. Les mêmes préparent désormais une lettre ouverte à l’attention des officiels et s’organisent pour de prochaines mobilisations.

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