L’entreprise marseillaise SubSea Tech élabore actuellement SeaClear, le premier robot autonome capable de nettoyer les fonds marins. Ce système innovant devrait être commercialisé dès 2023.
Entre les 22 et 66 millions de tonnes de déchets qui polluent les océans, plus de 80 % se concentrent en zone côtière*, parfois posés jusqu’à 50 mètres de fond, ce qui rend leur ramassage quasi impossible. C’est à ce problème que veut s’attaque le SeaClear, un robot télécommandé. Cette invention made in Marseille a été mise au point avec un consortium de huit partenaires étrangers dans le cadre du programme « Horizon 2020 » de l’Union européenne.
La société marseillaise Subsea Tech, spécialisée dans l’ingénierie marine et sous-marine, assemble tous les équipements robotiques de SeaClear, en collaboration avec des équipes croates, allemandes, hollandaises et roumaines.
Le SeaClear est composé d’une flotte de quatre appareils : un drone aérien, le robot sous-marin Mini Tortuga, qui cartographie les fonds marins et détecte les déchets à l’aide d’un sonar multi-faisceaux, le robot sous-marin Tortuga qui collecte les objets et les ramène au drone de surface et le SeaCat, qui transporte et ramène au bord les débris collectés.
Rendre autonome la détection et le ramassage des déchets
C’est ce dernier qui a été présenté pour la première fois en France lors d’une démonstration jeudi 15 septembre, devant les locaux de SubSea à l’Estaque. Les chercheurs, notamment ceux de l’université de Delft aux Pays-Bas, continuent de perfectionner les logiciels d’intelligence artificielle pour permettre au SeaClear de reconnaître les différentes sortes d’objets tombés au fond de la mer et les collecter automatiquement.
« L’objectif, à terme, est d’autonomiser la détection et le ramassage des déchets », projette Yves Chardard, président de Subsea Tech. Le « vaisseau-mère » SeaCat peut s’éloigner jusqu’à 3 km des côtes : relié au poste de commande via un réseau wifi et piloté à distance par deux opérateurs, le robot peut effectuer des opérations de nettoyage sans aucun équipage à bord.
Les données répertoriées en temps réel sur un ordinateur embarqué sont directement transmises au robot ramasseur. Le robot sous-marin est ensuite amené au-dessus de la « cible », qu’il ramasse et relâche dans le panier récupérateur de déchets. Ce système quasi-autonome, une fois terminé, ferait de SeaClear un engin pionnier dans le nettoyage automatisé des fonds marins.
900 000 € de fonds européens
Les coordonnées de chaque cible pourraient être répertoriées, permettant de récolter des données afin d’étudier la corrélation entre les déchets de surface et sous-marins, et notamment les flux de migration des déchets depuis la surface vers les fonds. « À l’aide des caméras haute résolution et des sonars du SeaClear, on pourrait aussi capturer des images en haute résolution et établir une cartographie des fonds marins », s’enthousiasme Yves Chardard.
En tout, un financement de 900 000 € a été accordé aux équipes afin de développer le SeaClear, qui privilégie « deux types d’environnement : les ports et les zones touristiques », là où se concentrent « 75 à 80 % des déchets » : sur la côte, au bord du littoral. « Ce n’est pas la peine d’aller essayer de chercher à 3000 mètres de fond, poursuit le président de Subsea Tech, il y a déjà tellement à faire dans 10 ou 20 mètres d’eau ».
Le système sera testé dans les ports de Hambourg et de Dubrovnik, qui ont déjà commandé la version finale de SeaClear afin de nettoyer leur littoral. Toute la connectique étant terminée, il ne manque plus aux équipes qu’à parfaire le système de « pince » qui permettra de descendre pour ramasser les déchets échoués sur les fonds marins.
800 kg de déchets par jour
Lorsqu’il sera pleinement opérationnel en 2023, SeaClear devrait être en mesure de collecter jusqu’à 90 % des déchets sur le fond marin, soit environ 80 % des déchets identifiés. Il pourrait nettoyer jusqu’à 800 kg par jour, pour un coût d’opération estimé à 4 000 €.
Un taux d’efficacité conforme aux objectifs de la mission de l’Union européenne « Restaurer nos mers et océans d’ici 2030 », qui vise à éliminer la pollution et à restaurer les écosystèmes marins en réduisant les déchets en mer.
Le système devrait être commercialisé après une dernière phase de test l’année prochaine, et destiné à la fois « aux entreprises qui sont intéressées par la location des robots, mais aussi aux collectivités locales des régions côtières, notamment dans les zones touristiques », indique Yves Chardard.
*Selon une étude d’Eunomia