La Ville de Marseille s’appuie sur une nouvelle étude pour faire adopter sa proposition alternative au Boulevard Urbain Sud, qu’elle juge « écocide » et « d’un autre siècle ». La Métropole, aux manettes du projet, interprète différemment l’analyse et souhaite le poursuivre au moins dans le secteur des 9-10.

Le Boulevard Urbain Sud (BUS) entre dans la liste des projets sur lesquels la Métropole Aix-Marseille-Provence, présidée par Martine Vassal (LR) et la Ville de Marseille dirigée par le maire PS Benoît Payan, peinent à s’accorder.

Cette nouvelle grande rocade de 8,5 kilomètres, en partie sur 4 voies, doit relier l’échangeur Florian, à l’Est, à la Pointe-Rouge, au Sud, d’ici 2026. Alors que la première tranche est déjà réalisée, militants et citoyens continuent de s’opposer à la poursuite du projet qu’ils jugent, comme la Ville de Marseille, « écocide », en raison de plusieurs espaces verts qu’il traversera. Et même  « d’un autre siècle » car favorisant l’usage de la voiture individuelle, à l’ère du développement des mobilités douces et des transports en commun. Ce, malgré le bus à haut niveau de service (BHNS) prévu en voie propre et les pistes cyclables qui seront créées.

Parmi les opposants de la première heure, quelques-uns sont aujourd’hui en fonction à la mairie de Marseille, au sein du Printemps marseillais, et entendent radicalement revoir le projet. Dans ce sens, la Ville a commandé une nouvelle étude à l’Agam, agence d’urbanisme métropolitaine à qui elle attribue des subventions.

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L’analyse des propositions alternatives a été présentée jeudi 9 décembre, en présence des élus concernés qui représentent les deux sensibilités politiques. Comme les maires de secteurs, Pierre Benarroche pour les 6-8, élu du Printemps marseillais hostile au BUS. Ou Lionel Royer-Perreaut, maire des 9-10, élu sur la poursuite du projet et par ailleurs conseiller de la majorité métropolitaine, favorable au projet.

« Les solutions alternatives sont possibles »

Laure-Agnès Caradec était également présente en tant que présidente de l’Agam et vice-présidente métropolitaine en charge de l’Urbanisme. Du côté de la mairie centrale de Marseille, les adjointes à l’urbanisme Mathilde Chaboche et aux transports Audrey Gatian assistaient aussi à la restitution. Cette dernière n’a d’ailleurs pas attendu pour dégainer la première annonçant, via les réseaux sociaux, que les conclusions allaient dans le sens de leurs vision alternative.

Pour Mathilde Chaboche, « les évidences sont posées. Sur la base de cette étude on pourra co-construire ce nouveau projet avec la Métropole ».

Quelles évidences ? « Que les solutions alternatives à ce grand tuyau dans lequel on empile tous les transports [BHNS, voitures, vélos, piétons, ndlr] sont possibles » répond l’adjointe à l’urbanisme. Comment ? « En utilisant les voiries existantes et en les redimensionnant un peu ».

De cette manière, la Ville entend consacrer un tracé au BHNS « jusqu’à la future station de tramway de la Gaye pour favoriser l’intermodalité ». Mais également une « piste cyclable ambitieuse connectée aux axes structurants », et reporter la circulation automobile sur la voirie existante « qui peut être améliorée ».

Solution qui permet, selon elle, de se conformer « à trois invariants sur lesquels on ne transigera pas : aucune imperméabilisation supplémentaire, pas de destruction d’espaces verts existants, l’intermodalité des transports avec notamment le raccordement du BHNS au tramway ».

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Le tracé initial du BUS

Pour la Métropole, la Ville propose « un gymkhana »

Sauf que les représentants de la Métropole ont une toute autre interprétation de l’étude de l’Agam qui « au contraire, montre les limites de ce scénario », selon le maire  des 9-10, Lionel Royer-Perreaut. Avec Laure-Agnès Caradec, ils partagent l’expression de « gymkhana » pour qualifier l’organisation des flux proposée par la Ville.

Les deux élus de la majorité métropolitaine évoquent des « zigzags », des « détours », des « problèmes de gestion d’intersections ». « Les pistes alternatives dégradent les fonctionnalités du projet », juge Laure-Agnès Caradec. « Nous proposons un cheminement direct, avec le BHNS en site propre sur 100 % du tracé et des pistes cyclables de part et d’autres. Les voitures se concentrent sur un axe structurant unique. À Saint-Loup [tronçon déjà réalisé, ndlr], ça a permis d’apaiser les voiries adjacentes avec une baisse de trafic de 10 % ».

Le maire des 9-10 rappelle, par ailleurs, qu’il a « été élu sur une promesse de campagne de réaliser le Boulevard Urbain Sud ». Il se dit notamment « étonné que la proposition du Printemps marseillais prévoit de faire passer le BHNS par la « forêt urbaine » de 150 arbres en cours de réalisation aux pied des résidences de Mazargues ». Projet qu’il porte avec sa casquette de président de bailleur social public 13 Habitat.

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La « forêt urbaine » que 13 habitat réalise aux pieds des résidences sociales de Mazargues.

Bras de fer sur le foncier

Quoi qu’il en soit, et alors que l’étude n’a pas été rendue publique à la rédaction de cet article, la Ville et la Métropole ne semblent pas en voie de « co-construire » un projet alternatif au Boulevard Urbain Sud. En tout cas sur le secteur des 9-10. Pour le dernier tronçon qui aboutit à la Pointe-Rouge, « le maire des 6-8, Pierre Benarroche a été élu en ne cachant pas son opposition au BUS », admet Laure-Agnès Caradec.

De son côté, Mathilde Chaboche pense que « le bon sens l’emportera » pour faire adopter la proposition municipale : « stopper la poursuite du BUS au niveau du Cabot et se conformer à nos trois invariants ». Si c’est le cas, « la Mairie sera contributeur et facilitera le projet en aidant la Métropole sur le foncier ». Une des rares armes à la disposition de la Ville pour peser dans ces négociations.

« Si on peut améliorer les choses avec des pistes avantageuses pour les fonctionnalités du BUS, bien sûr qu’on peut évoluer », lance la vice-présidente métropolitaine à l’Urbanisme. « Mais ce qui a été présenté n’est pas convainquant », estime-t-elle. La route s’annonce encore sinueuse sur le devenir du Boulevard Urbain Sud.

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