Martine Vassal, Présidente (Les Républicains) du Département des Bouches du Rhône depuis bientôt deux ans, revient à l’occasion d’un entretien exclusif sur son mandat en cours et ses ambitions plus intimes, comme celle de briguer la présidence de la métropole en 2020, pour succéder à son ami Jean-Claude Gaudin (LR).
C’est au 9e étage du bateau bleu, l’Hôtel du Département, dans un immense bureau avec une vue imprenable sur le 13e arrondissement, que nous a reçu Martine Vassal, présidente du Conseil départemental des Bouches du Rhône. Celle qui est considérée aujourd’hui comme la numéro 2 de la droite locale ne cache pas ses ambitions et dévoile une vision précise du territoire qu’elle préside, entre gestion du quotidien et nécessité de faire rayonner la Provence dans le monde entier.
Culture, éducation, transport, solidarité, sport, économie, propreté, sécurité, politique, suppression des départements,… retour sur les points clés de cet entretien.
L’entretien
Made in Marseille – Bonjour Martine Vassal, vous êtes à la tête du département depuis bientôt deux ans, quel regard portez-vous sur le travail que vous avez accompli ?
Martine Vassal – Je retiens la vitesse à laquelle les semaines passent et défilent. Nous sommes partis depuis notre arrivée sur un programme. Ce programme a été confirmé à l’occasion des Etats Généraux de Provence et 90% des actions présentées, ont été lancées. Aujourd’hui, on continue à travailler sur les thématiques qui sont nos compétences pures, la solidarité, le RSA, les personnes du « bel âge », puisque dorénavant on ne dit plus personnes âgées, ou la petite enfance… En parallèle, on a beaucoup travaillé sur la préservation du territoire, notamment avec l’aide aux communes. Et puis aussi, à travers des thématiques qui ne sont pas nos compétences directes, c’est-à-dire la culture et le sport.
Pourquoi la culture et le sport ?
Parce que ces thématiques regroupent et véhiculent des valeurs qui me sont chères comme l’intégration mais aussi le développement économique.
L’un des grands rôles du Département est la solidarité, comment vous positionnez-vous sur ce sujet ?
L’idée c’est de dire que le Département a repris sa place auprès des habitants. Nous avons ouvert nos portes pour qu’ils puissent venir nous rencontrer et nous sommes très présents à l’extérieur. On invite régulièrement des personnes du bel âge à venir au siège du Département, et on s’aperçoit que c’est la première fois qu’ils y mettent les pieds, alors qu’on gère quand même des choses qui les touchent.
Quelles seront vos actions phares pour l’année 2017 ?
Nous travaillons sur deux axes majeurs. Le premier au profit des habitants avec l’aide aux communes qui bénéficient à toutes les communes du Département pour financer les projets promis pendant les campagnes municipales de 2014. Pour certaines, ce sont des gymnases, pour d’autres des écoles, ou alors pour la voirie,… et le second pour la préservation du territoire. Notre objectif est d’améliorer le quotidien des habitants. C’est ce que l’on a fait par exemple, avec le dispositif « Provence Éco-Rénov », une aide financière pour les classes moyennes qui souhaitent entreprendre des travaux de rénovation énergétique dans leur logement. Plus de 600 dossiers ont déjà été déposés et chacun doit attendre environ trois mois pour être traité. Nous avons un objectif d’environ 1000 dossiers par an et nous voulons toucher les ménages aux revenus moyens, qui d’habitude n’ont droit à aucune aide publique.
Dans le cadre de votre aide aux communes, vous avez récemment fait un chèque de 100 millions d’euros à la ville de Marseille, pour rénover les écoles, les crèches, les piscines, mais aussi pour la culture, et notamment pour soutenir les théâtres Toursky et Badaboum. Pourquoi ces deux établissements plus précisément ?
Parce que nous avons été en difficulté, notamment sur le Toursky, où ils ont créé une nouvelle salle qui s’appelle Léo Ferret, plus petite, sans augmentation de leurs subventions. Alors, même si cela coûte moins cher que d’avoir deux théâtres séparés, il faut tenir compte de l’évolution des charges. Surtout qu’ici, dans le quartier le plus pauvre d’Europe (Ndlr : le théâtre Toursky est situé dans le 3e arr.), il y a un réel besoin. Mais, je suis allée aussi à la rencontre du collège Versailles, qui a été bloqué pendant des années par l’exécutif précédent, et que nous devons aujourd’hui complètement refaire, dans un secteur qui est très compliqué. Sur ce projet, nous allons mettre entre 30 et 40 millions d’euros. Et je pars du principe, qu’en ayant des pôles articulés autour d’un collège moderne avec un théâtre à côté, qui fait des représentations absolument remarquables, nous allons pouvoir redynamiser le quartier.
Pour le Badaboum théâtre, je me suis aperçue qu’ils étaient en difficulté et qu’ils leur manquaient 60 000 euros pour acheter une salle qui leur permettait de rester ouvert, et qu’ils n’arrivaient pas à les trouver. Personnellement, c’est une salle que je connais bien puisque ma fille y prenait des cours. Il y a là-bas une qualité d’enseignement remarquable qui mérite d’être accompagnée.
Justement, vous expliquez votre soutien aux structures culturelles, éducatives, sportives, etc, qui font le quotidien des Marseillais, parfois même dans les quartiers les plus difficiles. En parallèle, certains observateurs et certains de vos opposants, notamment lors du dernier conseil municipal de la ville de Marseille (Ndlr : le 6 février 2017), ont vivement critiqué la politique menée par votre majorité, qui consiste à miser sur des « Labels » touristiques, sportifs ou culturels, pour développer l’attractivité du territoire et qu’ils opposent directement à la gestion des « besoins réels » des Marseillais, tels la culture, la propreté, l’éducation ou les transports. Que répondez-vous à cela ?
J’ai été choqué par l’intervention de madame Carlotti, mais surtout de monsieur Coppola qui a dit « je regrette qu’autant d’argent soit mis dans la culture au niveau du département et ne soit pas pour le quotidien des gens« . Mais, moi j’aimerais que l’on aille au fond des choses. Vous expliquez dans votre question que les Marseillais veulent plus de propreté ou de transports. Mais, il faut dire que le département a donné une enveloppe de 300 millions pour améliorer les transports. On a par exemple réalisé des voies réservées pour les bus sur l’autoroute A51, et cela libère pas mal la situation. Après, il faut bien que les élus de l’opposition et les Marseillais comprennent que la métropole a des projets pour les transports, mais qu’elle attend l’aide de l’Etat, environ 3 milliards d’euros. Et, de mon côté, avec les 300 millions, je donne tout ce que je peux. Pour ce qui concerne la propreté, c’est une compétence de la métropole, qu’est-ce que le conseil départemental pourrait faire ? Je n’ai pas le droit d’embaucher des cantonniers pour les mettre sur le domaine public. Ensuite, oui c’est sûr, nous travaillons aussi en parallèle des besoins quotidiens sur l’attractivité du territoire pour créer plus d’emplois, pour que les bénéficiaires du RSA puissent retrouver un travail au plus vite. On a fait par exemple l‘accélérateur de l’emploi. La culture, c’est un vecteur économique et social. Moi j’invite l’opposition à aller voir le travail formidable qui est fait pour les enfants au théâtre Toursky. Nous allons passer une convention avec eux d’ailleurs pour qu’ils travaillent avec les collégiens. Et puis, je voudrais aussi ajouter que depuis mon arrivée, le département est dans l’investissement. On construit des collèges, des gendarmeries, des casernes de pompiers, on investit dans les équipements sportifs. Moi, je pense qu’il faudrait plutôt qu’on essaye de voir comment on peut travailler sur le système social du RSA qui est catastrophique aujourd’hui. Comment faire pour que l’Etat assume ses responsabilités ? Notamment avec la CAF qui n’a plus les moyens de pouvoir mener une politique sociale digne de ce nom. C’est là-dessus que nous devons plus travailler. Il faut bien comprendre que parmi les bénéficiaires du RSA, il y en a une petite partie qui n’arriveront pas à trouver du travail, pour des conditions sociales ou familiales, voire même des conditions physiques qui font que ces personnes ne sont pas aptes à trouver du travail. Et notre rôle d’élu est de leur trouver un autre dispositif et pas essayer systématiquement de leur faire faire des CV, des entretiens…
Pouvez-vous nous expliquer ce que vous faites depuis deux ans, justement pour aider ces personnes au RSA ?
L’idée, c’est d’aider les associations qui réinsèrent ces personnes, mais la difficulté c’est de ne pas avoir de dispositif spécifique. Hier, on discutait avec les travailleurs sociaux sur les personnes qui sont en situation de handicap, et notamment des handicaps mentaux. Ces personnes sont dans le RSA, mais n’ont pas de suivi particulier. Quand elles sont à l’hôpital, leur suivi est parfait, ça ne pose aucun souci. La difficulté est d’assurer un suivi adapté quand ces personnes sont chez elles. Et finalement, elles se retrouvent à venir dans les MDS (Ndlr : Maisons de la solidarité), et les assistants sociaux qui les reçoivent ne sont pas formés pour ça. On vient de passer une convention avec le centre Valvert, pour aider les MDS, mais il faut que l’Etat nous aide encore plus sur ces sujets.
Découvrez ici la suite de l’entretien sur sa candidature à la tête de la Métropole Aix Marseille Provence, sur l’actualité nationale, les élections présidentielles, le cas Fillon, sa proposition de suppression de 500 000 postes de fonctionnaires à laquelle elle s’oppose car elle concernerait principalement les agents des collectivités territoriales ou encore la surpression du département pour fusionner avec la métropole, une mesure qu’elle ne trouve pas envisageable.