Saviez-vous que c’est à Marseille que la première exposition coloniale a eu lieu en France ? Un événement qui fête cette année son 110ème anniversaire et qui est à l’origine de la création du Parc Chanot.
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Si les villes de Rouen (Seine-Maritime) ou Rochefort-sur-Mer (Charente-Maritime) ont bel et bien organisé chacun une exposition nationale/internationale et coloniale respectivement en 1896 et 1898, c’est à Marseille que la première exposition exclusivement coloniale s’est tenue pendant plus de six mois, entre avril et novembre 1906.
C’est à Édouard Marie Heckel, médecin marseillais et fondateur de l’école de médecine du Pharo, que l’on doit l’idée de cette exposition dès 1901. L’année d’avant, lors de l’Exposition Universelle de Paris, une section spécialement consacrée aux colonies et aux pays sous protectorat avait connu un grand succès. Depuis, le médecin militait pour organiser une exposition coloniale à Marseille. Le Conseil municipal et le maire de l’époque, Jean-Baptiste-Amable Chanot, sont séduits par le projet et décident de l’adopter. Un budget de 1,6 million de francs, dont plus de la moitié provient de la municipalité, est ainsi voté pour l’organisation de l’événement.
La manifestation a pour objectif de présenter aux Marseillais et à l’ensemble des métropolitains les richesses des colonies et les différentes cultures qui y étaient découvertes, mais aussi et surtout de mettre en valeur le négoce marseillais et d’encourager les investisseurs.
Une cinquantaine de pavillons au cœur du Parc Chanot
À cette époque, le Parc Chanot n’existait pas encore. En lieu et place se trouvait le champ de manœuvre du Rouet utilisé par l’armée. C’est sur ce terrain de 24 hectares, auxquels s’ajoutent une douzaine d’hectares prélevés sur un terrain appartenant à la Compagnie des Chemins de fer de Paris à Lyon et à la Méditerranée (P.L.M) et deux hectares cédés gratuitement pour deux ans par un particulier, qu’il est décidé que l’Exposition aura lieu.
L’entrée principale de l’exposition correspond toujours aujourd’hui à celle du Parc Chanot, face au rond-point du Prado. De part et d’autre de cet accès, deux serres coloniales qui abritent des plantes exotiques comme des orchidées, des palmiers et même des caféiers, cacaoyers ou plantes à caoutchouc sont installées. Une grande allée principale bordée d’arbres mène au grand palais baptisé pour l’occasion Pavillon des Exportations qui est le cœur de l’exposition. À l’intérieur y sont exposées les diverses activités de la métropole et de Marseille comme la savonnerie, la tannerie, le raffinage du soufre et du sucre ou encore l’usine à plomb. Y est présenté également tout ce que l’industrie et la fabrication Française expédient dans les colonies.
Le long de l’allée centrale et dans les autres zones du parc, une cinquantaine de pavillons et de palais sont construits suivant l’architecture de la région qu’ils représentent. Sont présents, entres autres, les pavillons de l’Indochine, de l’Afrique Occidentale, de Madagascar, de la Tunisie ou encore de l’Algérie. Aucun n’est voué à perdurer une fois l’exposition terminée c’est pourquoi ils sont construits avec des matériaux légers à base d’éléments métalliques, démontables et récupérables. Les visiteurs pouvaient y découvrir les spécificités de chacune des colonies françaises, qu’elles soient culinaires ou culturelles.
Le point de départ des expositions marseillaises
Au cours de ces sept mois, entre le 15 avril et le 18 novembre 1906, ce sont 1,8 million de visiteurs qui sont venus à l’Exposition Coloniale de Marseille. La majorité d’entre eux était de Marseille, mais pas seulement : grâce à la grande publicité qui avait été faite autour de l’événement, de nombreux français et même des étrangers s’y sont rendu.
Cette première exposition a été un tel succès que la ville de Marseille a rapidement voulu en organiser une autre pour l’année 1916. Mais en raison des bouleversements géopolitiques du début du 20ème siècle et la Première Guerre mondiale, la seconde édition ne s’est tenue qu’en 1922. C’est pour cette dernière que le Palais des Arts situé à l’entrée du parc a été construit et que les magnifiques grilles actuelles de l’entrée du rond-point du Prado ont été installées.
Quant au Parc Chanot, c’est après cette première Exposition Coloniale qu’il a vu le jour. Dès 1907, la Mairie de Marseille achète le terrain pour y organiser de nouvelles manifestations comme, par exemple, l’Exposition Internationale des Applications de l’Électricité en 1908 ou le Salon de l’Automobile en 1913. C’est aujourd’hui le parc des expositions de la ville où ont lieu chaque année de grands événements comme la Foire Internationale de Marseille depuis la fin des années 1920.
Par Agathe Perrier