Après le scrutin des européennes, La République en marche renforce sa conviction qu’elle peut désormais remporter la mairie de Marseille. Le mouvement cherche sa prochaine tête de liste. Dans cette quête du candidat idéal, différents profils sont en lice. Le député Saïd Ahamada entre officiellement dans le match. Yvon Berland, président de l’Université Aix-Marseille (Amu) et Jean-Philippe Agresti, doyen de la faculté de droit d’Aix-en-Provence sont dans les starting-blocks.

Acte II. La République en marche

La République en marche savoure. Regonflée à bloc. L’échec des Républicains rebat les cartes. Si le parti présidentiel (22,1%) est devancé par le Rassemblement national (23,3%) lors du scrutin européen, à Marseille LREM a bien résisté avec ses 20,10%.

« Après les présidentielles et les législatives, ces élections européennes démontrent l’existence pour LREM d’un socle électoral consolidé et d’une volonté de changement », affirme le comité départemental La République en marche. « Contrairement à ce qui était annoncé par l’ensemble de la classe politique traditionnelle de cette ville, LREM a démontré son fort ancrage local. »

Saïd Ahamada, officiellement candidat à l’investiture

Pour les municipales de 2020, le mouvement entend porter un projet politique central axé sur la « renaissance » de la ville « qui devra être plus durable et plus viable dans un futur écologiquement contraint », rejetant tout accord d’appareil. Ils misent sur une alliance avec « tous les Marseillais ». S’ils sont en accord sur le projet, les marcheurs peinent en revanche à impulser une stratégie pour faire émerger une tête de liste d’envergure.

Après le score aux européennes, l’hypothèse d’un parachutage est reléguée aux oubliettes. Pour l’instant. Le mouvement se penche désormais sur le vivier local. Depuis plusieurs semaines, les noms du député de la 7e circonscription Saïd Ahamada, ainsi que celui d’Yvon Berland, président de l’Université Aix-Marseille (Amu) et Jean-Philippe Agresti, doyen de la faculté de droit d’Aix-en-Provence, circulent pour conduire une liste.

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Saïd Ahamada, député des quartiers Nord de Marseille. © N.K.

Le porte-parole à l’Assemblée nationale, Saïd Ahamada, n’a jamais caché ses velléités. Il est le premier des trois à se lancer officiellement dans la course à l’investiture LREM. Le parlementaire mise sur une ouverture aux écologistes et à la société civile pour espérer gagner Marseille en 2020. « Il faudra aussi qu’on aille chercher les voix dans les quartiers populaires. C’est mathématique.» [Lire par ailleurs les raisons de sa candidature]

Yvon Berland, candidat d’un mandat

Pour remporter la ville, certains cadres LREM optent plutôt pour une candidature issue de la société civile, à l’instar d’Yvon Berland (68 ans) ou de Jean-Philippe Agresti (44 ans).

Les deux hommes jouissent tous deux d’une excellente réputation auprès des acteurs économiques et institutionnels du territoire. « Je respecte chaque candidature. Au-delà des clivages, celles qui peuvent venir de la société civile peuvent avoir leur importance, car il faudra rassembler pour gagner », souligne Pascal Chamassian, ancien candidat aux législatives de 2017, battu dans la 1er circonscription des Bouches-du-Rhône.

« On doit avoir une personnalité pour les municipales qui ne soit pas un maire de transition, mais qui s’inscrive dans la durée. »

Le président d’Amu aurait pu devenir député européen. Il était, en effet, pressenti pour figurer sur la liste « Renaissance ». Une 26e place qu’il aurait décliné, certains cadres LREM le poussant vers une candidature municipale. « Elle est la plus susceptible de correspondre à l’attente des Marseillais », estime d’ailleurs Pascal Chamassian, adjoint du pôle politique LREM départemental.

« Yvon Berland a prouvé qu’il pouvait réaliser sur le territoire quelque chose d’important en réunissant les trois universités. C’est quelqu’un de pragmatique qui a réussi à fédérer. Ce profil est intéressant, ce serait une candidature solide et qui correspond selon moi à une triple transition : politique, avec l’après-Gaudin, institutionnelle, même si en 2020 on votera aux municipales et à la Métropole, il y a cette dimension métropolitaine puis de renouvellement », analyse-t-il.

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Yvon Berand, président d’Aix-Marseille Université. © N.K.

Le professeur en médecine est, selon le marcheur, également capable « d’embarquer avec lui et de préparer une nouvelle génération ». Et d’ajouter : « Nous ne sommes pas une primaire. On parle de ces trois mais la porte n’est pas totalement fermée. Quel que soit le candidat, je ne crois pas en l’homme providentiel, mais en une personne qui peut apporter des garantis de travail, de solidité et entourée d’une équipe qui respire la diversité. » L’idée qu’Yvon Berland soit également l’homme d’un mandat séduit aussi.

Et lorsqu’on pose la question au principal intéressée sur une candidature à la mairie de Marseille, Yvon Berland sourit. Il nous confiait, il y a peu, vouloir prendre le temps de la réflexion, « ce n’est pas une décision facile à prendre ». 

Jean-Philippe Agresti, candidat du renouveau

L’autre profil, c’est celui du doyen de la faculté de droit d’Aix-Marseille. Jean-Philippe Agresti, dont l’épouse, la productrice Sabrina Roubache, est proche du couple Macron, a quant à lui l’oreille du président de la République. Chez les militants LREM, certains mettent aussi en avant sa proximité et son antériorité dans son engagement auprès du Président, bien qu’il ne soit pas encarté dans le parti.

Pour rappel, Sabrina Roubache avait ouvert le plus gros meeting de campagne d’Emmanuel Macron le 10 décembre 2016, Porte de Versailles.

Lors de sa première année de fonction, le doyen a d’emblée marqué par ses initiatives. D’abord à l’occasion de la cérémonie des voeux en 2018, en conviant l’avocate mauritanienne pour les droits de l’Homme Fatima M’Bay. Première avocate au barreau de Mauritanie, elle a fait de la lutte contre la torture, l’inégalité et les violences faites aux femmes sa priorité.

Une préoccupation pour le doyen, tout comme les enjeux économiques et écologiques. Sous son impulsion, la faculté de droit a été l’une des premières à avoir signé la « déclaration universelle des droits de l’humanité », portée par Corinne Lepage.

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Jean-Philippe Agresti et Christophe Castaner, à l’époque délégué général LREM. © Narjasse Kerboua.

Jean-Philippe Agresti est « le candidat idéal » pour Claire Pitollat. La députée a d’ailleurs clairement affiché son soutien au doyen. « On doit être dans la proximité, l’écoute et la bienveillance, trois notions dans l’ADN d’En Marche. On doit avoir une personnalité pour les municipales qui ne soit pas un maire de transition, mais qui s’inscrive dans la durée, car nous avons de grands chantiers à mener », nous confie-t-elle.

« Il faut également qu’il soit en capacité de dialoguer avec un échiquier politique assez large, pas dans une logique d’alliance, mais de partenariat, et en mesure de combattre les extrêmes. On sait que ce sera compliqué de gagner Marseille seuls, et cette logique de partenariat démontrera à quel point on fait de la politique autrement ».

« Il y a différents types d’incarnation. Tous ont des qualités, et ce sont des histoires différentes à raconter, mais il y en aura peut-être d’autres ». 

Jean-Philippe Agresti travaille activement sur une stratégie territoriale, dont il a déjà exposé les grands axes aux instances nationales. Un projet élaboré avec l’aide d’un collectif au sein duquel figure le sociologue Jean Viard. La conseillère régionale (Modem) Marie-Florence Bulteau-Rambaud lui a également apporté son soutien ou encore Guil Darmon, suppléant d’Eléonor Leprette (conseillère régionale déléguée au JO2024), aux législatives de 2017.

Homme de convictions, il faudra sans aucun doute, compter sur Jean-Philippe Agresti pour participer au débat municipal à Marseille, dans un esprit inclusif et avec cette envie de créer la même dynamique qu’à l’occasion des élections présidentielles.

« Il y a différents types d’incarnation », note Gérard Blanc. « Tous ont des qualités, et ce sont des histoires différentes à raconter, mais il y en aura peut-être d’autres. Il y a aussi peut-être des options qui ne sont pas connues de nous », poursuit l’ancien directeur de campagne d’Alexandra Louis, lors des législatives de 2017.

Justement le nom d’Alexandra Louis a, lui aussi circulé un temps, notamment par la voix de Marlène Schiappa, secrétaire d’Etat, chargée de l’égalité femme-homme. La jeune députée se concentre avant tout sur son mandat, missionnée, entre autres, par le gouvernement sur les questions de logements et d’habitat indigne.

Même si « lorsqu’elle s’est fixée un objectif, elle ne lâche rien », rien pour l’instant ne laisse penser qu’elle pourrait elle aussi songer à faire acte de candidature.

Bertrand Mas-Fraissinet : « On part pour gagner »

Au regard des résultats des élections européennes, où la REM enregistre entre 2 à 8 points de moins dans le 13e, 14e, 15e et 16 » par rapport aux élections présidentielles, et se renforce dans les 6e, 7e, et 8e, , certains cadres LREM partagent l’idée qu’ils doivent, non pas aller chercher les voix dans les quartiers populaires comme le pense Saïd Ahamada, mais plutôt mener une campagne de centre-droit et de démocratie participative. Objectif : faire barrage à Martine Vassal, voire faire alliance, tout en captant des voix de la droite.

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La République en marche à l’occasion du lancement de la team départementale. © Narjasse Kerboua.

Le référent départemental, Bertrand Mas-Fraissinet affirme, quant à lui, que « le mouvement est clairement dans une logique de non-alliance avec LR. On ne part pas dans une élection en envisageant de faire alliance au premier ou au second tour. On part pour gagner. Nous sommes les seuls en mesure d’incarner ce renouveau car nous ne faisions pas partie du casting il y a six ans ».

La stratégie LREM repose également sur une large ouverture. « Les choses sont prises dans le bon ordre. Il faut un bon projet qui repose sur une équipe, rassembler et fédérer les énergies au-delà des partis », souligne Jean-Pierre Serrus, responsable du pôle politique au sein de l’équipe départementale. Il faut donner envie aux électeurs marseillais d’adhérer à un projet et une équipe. Mais je crois qu’il y a en ce moment une bonne appétence au changement ».

Et les trois potentiels candidats à l’investiture LREM « qui ont des positions différentes ont aussi de sérieux atouts pour permettre d’offrir ce changement », poursuit le maire de la Roque-d’Anthéron.

Quant à la menace du FN, « il ne faut pas la sous-estimer », affirme Claire Pitollat, même si dans son fief elle renforce son électorat. « On est la seule métropole qui place le FN en tête ». Peu croient à l’hypothèse Marion Maréchal-Le Pen en terres marseillaises, même si cela constituerait un symbole fort pour RN dans la deuxième ville de France, et une séduisante opportunité pour certains élus LR.

Le choix d’ici à la rentrée

Alors chez les marcheurs, quel sera le meilleur « storytelling » à raconter aux Marseillais ? Si la commission d’investiture, mise en place ce lundi 3 mai, aura son mot à dire, Emmanuel Macron devrait trancher in fine. « Nous serons tous derrière le candidat désigné », assure Bertrand Mas-Fraissinet, « garant de l’unité. Je suis certain qu’on fera le bon choix ».

Il n’écarte toutefois pas l’hypothèse de (re)voir entrer dans le jeu des personnalités nationales. « Tout est encore possible… y compris les candidats dont les noms circulent déjà. Toutes les pistes sont explorées. On veut avoir la meilleure offre possible. »

Les investitures successives seront annoncées à compter de mi-juin, pour les villes de plus de 9000 habitants. Pour Marseille, le choix de la future tête de liste devrait vraisemblablement intervenir à la rentrée.

> A lire notre premier volet Marseille 2020 – Les Républicains sont-ils déjà hors jeu ?

> Retrouvez notre prochain volet politique, la semaine prochaine.

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