La Métropole vient de racheter une ferronnerie historique désaffectée à Endoume pour y créer un parking et ainsi soulager le manque de stationnement dans le quartier. Le collectif Alt +, qui occupe le bâtiment depuis 9 mois, préférerait voir le lieu se transformer en pôle culturel et social, à l’image du destin embrassé par la Friche Belle de Mai.

Vous pouvez passer devant sans y faire attention. Pourtant, si vous levez les yeux au numéro 5 de la rue Sauveur Tobelem dans le 7e arrondissement, le bâtiment se démarque de ses voisins. Le crépi défraîchi laisse apparaître des briques rouges, de grandes poutres métalliques encadrent des façades entièrement vitrées, au rez-de-chaussée se dresse une porte en fer forgé.

La ferronnerie Piana a fermé ses portes dans les années 1960, et le bâtiment témoigne aujourd’hui de ce patrimoine industriel de la ville. Un patrimoine qui rayonne encore dans les rues de Marseille : « C’est dans cet atelier qui faisait vivre le quartier d’Endoume qu’ont été réalisés le kiosque du square Léon Blum, le portail de l’Hôtel Dieu ou la verrière de la Criée », raconte Stéphane Rutily. Cet architecte occupe une partie du site  depuis une quinzaine d’années avec l’assentiment des propriétaires.

, Un collectif veut créer « La Belle d’Endoume », une friche culturelle, Made in Marseille
Affiche publicitaire de l’ancienne ferronnerie

Et ces derniers viennent de changer. La Métropole Aix-Marseille-Provence a fait valoir son droit de préemption alors que le promoteur Nexity s’apprêtait à acquérir ce site pour un montant avoisinant les 800 000 euros. « C’est une somme dérisoire pour une emprise au sol de 1 200 m2 dans le 7e arrondissement de Marseille ! », s’étonne Stéphane Rutily. « On estime plutôt le prix autour de 3,5 millions d’euros. Mais l’ancienne propriétaire, aujourd’hui décédée, avait signée cette promesse de vente avec Nexity. Une descendante l’a contestée en justice mais sans succès ». 

« C’est un bon prix, en effet, dont a bénéficié la Métropole, car la préemption se base sur l’acte notarié de la vente », explique Laure-Agnès Caradec, adjointe à l’urbanisme de la collectivité.

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Les bureaux des établissements Piana abandonnés depuis des années

Créer un parking pour répondre au besoin de stationnement

« Cela fait des années que nous nous intéressons au site », explique la maire des 1er et 7e arrondissements, Sabine Bernasconi. « Nous avions déjà déposé une réserve au PLU (Plan local d’urbanisme ndlr). Pour des raisons patrimoniales, car il faut préserver la façade et les éléments remarquables de ce bâtiment magnifique et historique. Mais il y a aussi un fort besoin en places de parking dans le quartier. C’était le but de cette préemption ».  

Une étude sera prochainement lancée par la Métropole pour définir les besoins de stationnement et faire un diagnostic du bâtiment. « Le projet ne sera pas dessiné avant un ou deux ans », estime Laure-Agnès Caradec.

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Comme ce piano, certains vestiges de la vie de l’atelier sont insolites

« La Belle d’Endoume », une petite soeur pour la Friche de la Belle de Mai

Pourtant, depuis septembre 2018, le collectif Alt + imagine un autre avenir au bâtiment. Ce groupement d’architectes et urbanistes occupe un espace du rez-de-chaussée de l’ancienne ferronnerie. Stéphane Rutily en fait partie :  « Au regard de projets tels que le tramway, du déficit des transports en commun, de la pollution due à la voiture à Marseille », pour lui « ça n’a pas de sens de transformer ce bâtiment patrimonial en parking ». Depuis neuf mois, le collectif anime des concertations citoyennes, des débats, des ateliers créatifs et participatifs pour donner une vocation et un sens au lieu, bien éloigné du stationnement de voitures.

« Incubateur d’idées innovantes, catalyseur d’expérimentations artistiques, architecturales et paysagères, révélateur du potentiel humain du quartier », après leurs échanges avec les citoyens, associations, et CIQ du quartier, le groupement estime que ce site pourrait devenir un projet de vie dans le quartier. Un lieu de vie social, artistique et culturel, construit « avec et pour les habitants ». Inspiré de la Friche de la Belle de Mai, ou du projet plus récent de Coco Velten, Alt + fédère désormais des acteurs tels que Yes We Camp, l’association nationale Sites et Monuments, ou l’école d’architecture de Marseille. Un projet pour redonner vie à cette friche industrielle, nommé ‘‘La Belle d’Endoume’’.

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Stéphane Rutily dans les bureaux du collectif Alt +

Le collectif prône une discussion avec les élus

« La vocation de stationnement du bâtiment ne se discute pas », répond pourtant Laure-Agnès Caradec, à l’évocation de ce projet. Si le collectif juge la création d’un parking « incohérente avec les enjeux réels du quartier », ils estiment que « la vocation de stationnement » pourrait cohabiter avec leur projet au regard de la superficie du bâtiment. « Nous voulons travailler avec les élus, discuter, et continuer de travailler sur un diagnostic urbain, environnemental, social et paysager dans le quartier », explique Stéphane Rutily.

Pour cela, ils espèrent pouvoir continuer d’occuper les lieux tant qu’un projet définitif n’est pas décidé, et l’influencer. Une occupation éphémère pour expérimenter des projets « basés sur l’humain », espère Stéphane Rutily, et « constituer un terreau pour esquisser une proposition alternative et novatrice. Cette manière de travailler sur un diagnostic complet de la vie du quartier va dans l’intérêt des collectivités ».

« Tout est envisageable, on n’exclue rien », tempère Laure-Agnès Caradec. « Mais il va falloir faire diagnostic du bâtiment. C’est du patrimoine, d’accord, mais dégradé. Il y a des préalables de sécurité à assurer, pour envisager, en fonction, une occupation temporaire du site ». La porte n’est donc pas tout à fait fermée pour « La Belle d’Endoume ».


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Un commentaire

  1. Ni parking (c’est obsolète la bagnole) ni aubaine pour bobo cultureux, un Bolo’Bolo. Et si vous ne savez pas ce que c’est, allez-y voir (chemin : éditions de l’éclat). De toutes façons, si c’est pas sur le champ, il y aura d’abord un parking puis une friche à prendre.

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