A l’heure où le sujet de l’attractivité territoriale fédère tous les élus, où la naturalité a été choisie comme l’une des 12 OIR (Opération d’Intérêt Régional) de la région PACA, il est d’actualité de présenter l’importance de la filière cosmétique en Provence.

De l’agriculteur au produit fini : une filière d’excellence mondialement reconnue

Fleuron économique du pays, la cosmétique française repose essentiellement sur la région parisienne (Cosmétic valley) et la Provence. Les entreprises du secteur, françaises ou étrangères, cherchent à se rapprocher de l’origine des matières premières pour en maîtriser la traçabilité. Le « Made in France » étant capital d’un point de vue marketing, la délocalisation reste faible.

La Provence a la particularité de réunir tous les acteurs de la filière : les agriculteurs, les transformateurs producteurs de substances aromatiques, les entreprises de formulation de cosmétiques et de compositions parfumantes, et les entreprises de mise sur le marché.

La région PACA est le 1er pôle national de création de compositions parfumantes, le 1er territoire pour la cosmétologie parfumerie, et la 1ère région pour la distillation et l’assemblage des huiles essentielles. L’ensemble de la filière génère 17 000 emplois directs et indirects et 2,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires par an.

, Reportage au coeur de la filière cosmétique en Provence, numéro 1 en France, Made in Marseille
La fabrication de parfum

La production agricole des Plantes à Parfum, Aromatiques et Médicinales (PPAM)

L’extraordinaire biodiversité de la région PACA en fait le premier pôle français producteur de PPAM : près de 2 000 exploitations cultivent 80 espèces destinées à l’industrie cosmétique, la parfumerie, l’agroalimentaire et la pharmacie sur 23 000 hectares (source : ceddem). Elle est devenue la première région française de production de PPAM issues de l’agriculture biologique. Le chiffre d’affaires annuel généré estimé à 35 millions d’euros constitue la 1ère ressource économique et touristique de Haute Provence.

La région PACA et la Drôme concentrent l’essentiel des productions de plantes à parfum qui façonnent nos paysages. La filière est organisée en coopératives d’agriculteurs producteurs d’huiles essentielles de lavande fine, de lavandin, sauge sclarée, menthe poivrée, romarin exportées dans le monde entier. Le territoire de Grasse, très concurrencé par la production
étrangère et la chimie cultive encore la rose Centifolia, le jasmin, l’iris, la violette, le lys, la tubéreuse composant les parfums les plus prestigieux.

La première transformation en ingrédients naturels

La Provence est la première région française productrice de matières premières aromatiques obtenues par transformation des PPAM, et des fruits et légumes (distillation, macération, extraction).

La région possède un réel savoir-faire en matière de distillation, elle compte 96 des 130 distilleries françaises, installées à proximité des zones de culture afin de distiller les plantes fraîches. Fortement concurrencée par la Bulgarie, la production d’huile essentielle de lavande fine ne couvre que 20% du marché mondial alors que 95% de la production mondiale d’huile essentielle de lavandin est Française. 70 entreprises dont Mane et Robertet dans le pays grassois, Naturex à Avignon (1700 salariés dans le monde), Bontoux SAS en Drôme provençale, Technicoflor à Allauch, Ies Labo à Oraison fabriquent ces ingrédients naturels.

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Extraction de sauge – Bontoux

En 2015 Inolex (USA), fabricant de composants cosmétiques, rachète l’entreprise Ies LABO : « Ce qui a intéressé cette entreprise américaine, c’est notre localisation en Provence et notre démarche filière qui assure une traçabilité totale à nos produits » assure l’un de ses dirigeants, Pierre Cappanera. Ces entreprises championnes de l’export (75 % de leur CA) emploient plus de 5 000 salariés en Provence. Cette activité est déterminante pour les différentes industries utilisatrices et pousse les transformateurs à travailler de concert avec les agriculteurs soumis aux saisons, aux aléas climatiques et aux phénomènes de mode.

La fabrication de parfums et de produits cosmétiques

L’industrie des compositions parfumantes et des cosmétiques compte près de 200 entreprises réparties entre les activités de formulation, de conception et de mise sur le marché, soit 55 % de la production nationale, 1,3 milliard d’euros de CA et plus de 5 000 emplois directs. La région accueille 25 % des sièges sociaux du secteur. C’est le secteur d’activité le plus dynamique de la région, l’emploi y a progressé de 32 % entre 1990 et 2005 (source : ceddem).

Le bassin grassois compte 60 entreprises qui produisent des concentrés de parfums pour la parfumerie, la cosmétique, les arômes alimentaires et les détergents. Probionat Provence à La Fare Les Oliviers (13), Sicaf à Valréas (84), BEA à Forcalquier (04) font partie des nombreux fabricants à façon qui formulent et produisent des cosmétiques pour les marques non équipées de laboratoires. L’Occitane à Manosque a engendré un essaimage d’entreprises sous-traitantes, source de création d’emplois et de richesses dans son
département, et contribue largement à la renommée internationale de la Provence. “En Provence, 5 savonneries, réalisent 25 % de la production française de savons en sous-traitance qui exportent dans le monde entier et fournissent les marques de luxe” explique Daniel Margot Pdg de la Savonnerie de Haute Provence à Villeneuve (04).

Un réseau de sociétés de services complète cette filière : tests toxicologiques, chimie analytique, conseil et accompagnement dans la création de gammes et la mise sur le marché.

Une filière humaine et solidaire, ayant intégré la RSE

« Dans cet univers, la notion de filière et de partenariat est très importante« , insiste Benoît Articlaux des Laboratoires Acanthis. Nous, transformateurs de PPAM, sommes les intermédiaires entre l’agriculteur et le fabricant de cosmétiques. « C’est en forgeant des relations humaines de qualité, que l’on peut comprendre et respecter les contraintes respectives de chaque acteur de la filière ainsi que le cycle végétal. Cette relation permet de s’entraider, d’anticiper, de collaborer pour aboutir à une meilleure qualité » poursuit-il.

« Il n’y a pas de filière sans formation endogène » précise Daniel Margot, de La Savonnerie de Haute Provence, ancien cadre de l’Occitane. Avec le laboratoire BEA, ils ont créé une formation diplômante de conducteur de ligne portée par l’Union des Entreprises des Alpes de Haute Provence.

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Un champ de sauge

Le projet de R&D Claryssime porté par la société Bontoux SAS a permis de soutenir et développer la filière sauge sclarée (troisième PPAM cultivée en Provence après le lavandin et la lavande). Devant la concurrence internationale, Bontoux SAS organise des journées techniques avec les agriculteurs afin de conduire « un travail en filière depuis la mise en culture jusqu’à la commercialisation du produit fini, le sclaréol » explique Claire Delbecque, responsable R&D de la société. En 10 ans, cette conjugaison de compétences a permis de différencier la filière sauge française à l’international par sa qualité et de multiplier par deux le revenu par hectare cultivé.

Une filière innovante et engagée dans le développement durable

Une offre de formation de pointe et complète

« Dans la parfumerie qui utilise 3500 ingrédients différents, l’innovation est dans la création » souligne Han-Paul Bodifee, Président du Prides PASS. Et de rajouter que la compétition mondiale, la règlementation en constante évolution et les controverses sur les ingrédients placent l’innovation pour l’innocuité des produits et le développement de procédés respectueux de l’environnement et des hommes au cœur des préoccupations de la filière.

Dans ce contexte, nos universités et écoles se distinguent et donnent tout son sens à la notion de filière :

Le laboratoire GREEN de l’université d’Avignon (à l’origine de la plateforme d’éco-extraction de Valréas inaugurée en septembre 2016), la Faculté des Sciences de l’Université Sophia Antipolis, l’école Polytech de Nice, le Laboratoire de Pharmacie Galénique de la Faculté de Pharmacie d’Aix-Marseille Université proposent une offre de formation élaborée et labellisée par les acteurs de la filière. Le pôle de compétitivité PASS à Grasse partage toute sa connaissance afin d’aider l’université à préparer les étudiants aux futurs métiers de la filière.

L’Université Européenne des Senteurs & Saveurs (UESS), centre de formation et de valorisation du végétal aromatique, cosmétique et agroalimentaire basé à Forcalquier (04) est le seul centre en France dispensant une formation de savonnier par saponification à froid délivrant le titre de savonnier.

Des startups régionales investies dans l’innovation

« La filière est importante car elle permet de réfléchir de manière cohérente » affirme M. Bouche, agriculteur à Queyranne (84) qui a relancé la culture de la Garance. Remplacée par des colorants chimiques, elle est cultivée à nouveau pour répondre aux exigences règlementaires sur les colorants. La startup Erubescence à Valréas fabrique des colorants naturels à partir de plantes régionales telle que la garance. Ainsi, la réintroduction de cette culture a permis de favoriser le maintient de la polyculture, gage d’enrichissement des sols, et de répondre à un enjeu de développement durable.

Immunosearch a mis au point des tests d’immunité alternatifs aux tests sur animaux sur le point d’être reconnus par l’OCDE.

Le laboratoire IN’OYA à Gardanne a breveté en collaboration avec le CNRS, des cosmétiques contre l’hyper pigmentation des peaux noires. IN’OYA s’est engagé dans une démarche de développement durable au profit de l’initiative africaine de la Grande Muraille Verte.

Capsum installée au Technopôle de Château-Gombert (70 salariés, 38 brevets) a développé une technologie d’encapsulation des actifs qui permet de se passer des solvants et autres tensioactifs dans la formulation des produits.

Feeligreen à Valbonne conçoit des dispositifs utilisant des micro-courants pour diffuser des actifs à travers la peau.

Une filière entreprenante et éco-responsable

Des initiatives privées collectives telles que « La route des saveurs et senteurs en Haute Provence » valorisent le territoire et s’ajoutent aux retombées touristiques et économiques indirectes de cette filière estimées à 1,7 milliards d’euros en 2007.

A côté de nos marques régionales bien installées (citons Florame, Terre d’Oc, L’Occitane en Provence, L’Othantique, Melvita, Thalgo), la Provence a vu naître ces dernières années de belles marques de cosmétiques naturelles, bio, sourcées et produites en Provence. Cet entrepreneuriat très féminin est engagé dans des démarches éco-responsables, sociales et
solidaires : parmi elles citons SENTEURS DU SUD à La Ciotat, LES FÉES EN PROVENCE à Aubagne, PULPE DE VIE à Marseille, OLIVE ET CALISSONS à Aix-en-Provence, COEUR DE CIGALE à Valréas, PROPOS NATURE, à La Roque d’Anthéron.

Une filière structurée

Investie dans une révolution verte, la filière bénéficie de tout un écosystème dans un engagement éco-responsable pour des produits plus sûrs, utilisant moins de solvants, consommant moins d’énergie et réduisant les rejets.

Le pôle de compétitivité PASS (Parfums, Arômes, Senteurs, Saveurs) à Grasse (06) fédère les entreprises du secteur et favorise par ses actions l’innovation et la compétitivité mondiale.

Le CPPARM (Comité des Plantes à Parfum, Aromatiques et Médicinales) à Manosque travaille à défendre, accroître et valoriser la production provençale. « Les retombées de ces filières en termes d’image, et d’économie sont très positives pour la Provence » affirme Aurélie Gommé, directrice du CPPARM.

L’association AUTHENTIC PROVENCE est née en 2013 de la volonté d’entreprises du secteur de garantir aux consommateurs l’origine provençale de la marque : « Cette initiative apporte une garantie aux distributeurs étrangers en quête d’authenticité et en lutte contre la contrefaçon » souligne Christophe Gilles, président de l’association et dirigeant du
laboratoire Algovital.

L’association COSMEBIO promeut une filière d’excellence et sensibilise le public à une cosmétique différente. En Provence, 50 entreprises y adhèrent. « La cosmétique bio a ouvert de nouvelles voies de recherche à la cosmétique conventionnelle » précise Jean François Gravier, membre de la commission technique et Président des Laboratoires Gravier en évoquant le rachat de SANOFLORE par L’ORÉAL.

COSMED (700 adhérents dont 200 en PACA) à Aix-en-Provence réunit les TPE et PME du secteur, sa vocation est de défendre les intérêts de ses membres et de fournir des services (veille règlementaire, formation, groupement d’achats).

Obligatoire à partir du 1er janvier 2017, le référentiel européen COSMOS s’emploie à sauvegarder l’environnement et à assurer le bien-être en favorisant le développement de produits cosmétiques naturels et biologiques et en diffusant une information transparente afin que les consommateurs puissent être les acteurs du développement durable.

A Marseille, la plateforme Cosmétic Provence offre aux petites entreprises du secteur l’accès à des ressources techniques, marketing, industrielles et juridiques. “C’est un réseau de partenaires”, explique son président Jean-Claude Hubaud, fondateur du laboratoire Hélioscience spécialisé dans l’évaluation des protections solaires.

Anne Farcy

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