Amélie Manceau est blogueuse, elle est même la première a s’être lancée à Marseille en 2009, à une époque pas si lointaine, où les réseaux sociaux commençaient à faire leurs premières émules… Amélie est la fondatrice du site Le So Girly Blog, qui retrace depuis 8 ans son expérience de Marseillaise accomplie.

A l’occasion de la journée de la femme, elle accepte de se livrer sur son parcours de blogueuse numéro 1 à Marseille, sur un univers qui se transforme ces dernières années et dans lequel elle ne se reconnait plus forcément, mais aussi sur sa nouvelle vie comme Community manager chez Wiko, et sur la parité homme – femme avec l’avénement du digital.


INTERVIEW

Bonjour Amélie, aujourd’hui, tu es suivie par plus de 10 000 personnes sur Facebook, plus de 25 000 sur Instagram et plus de 15 000 sur Twitter, 10 000 sur Pinterest, ce qui fait de toi la numéro 1, mais peux-tu nous raconter comment tout a commencé ?

Quand je suis arrivée à Marseille en novembre 2009, je lisais pas mal de blogs parisiens, et comme je ne connaissais personne ici, je me suis dit, il doit bien y avoir un blog à Marseille pour connaître les beaux endroits, les boutiques où aller… Et là surprise, c’était le néant. La seule blogueuse que j’ai trouvée, c’était Aude de The little world of fashion, mais elle était d’Aix en Provence, et avait donc une cible aixoise et pas du tout marseillaise… C’est à ce moment là que je me suis dit, allez, pourquoi pas se lancer ! Il faut quand même savoir que j’étais déjà un peu accro aux blogs à cette période. J’avais lancé pendant mes études de langue, un blog en Anglais. J’ai toujours aimé écrire et partager.

Donc tu as lancé ton blog à ton arrivée…

Oui en novembre 2009. Mais, on ne va pas se mentir, les trois premières années, je ne me montrais pas vraiment, d’ailleurs j’écrivais plus pour moi que pour les autres. Je ne me préoccupais pas du nombre de lecteurs, je répondais à un besoin personnel de m’exprimer. Je crois qu’au début de la « blogosphère », les blogueurs faisaient plus ça par plaisir que par objectif de carrière. Au départ, j’avais d’ailleurs envisagé ce site non pas comme un blog, mais comme un magazine féminin digital, avec des rubriques différentes dans lesquelles je pouvais m’exprimer. Mais, au fur et à mesure, les lectrices ont commencé à me dire « il faut que tu te montres, on veut te voir », donc j’ai amorcé le virage un peu plus personnel fin 2010.

Et tu as commencé rapidement a avoir des partenariats ?

Plutôt la 2e année, mais pas du tout avec des entreprises marseillaises. Ce sont les marques parisiennes qui ont commencé à m’approcher, comme par exemple Naf Naf. La marque m’envoyait des fringues et je devais les « shooter » et les montrer sur mon blog. Petit à petit, j’ai eu de plus en plus de lecteurs, mais toujours pas de Marseillaises ! Quand je parlais de Marseille d’ailleurs, je faisais un bide complet ! A ce moment là, je me suis dit « tant pis Marseille » et j’ai décidé de mon consacrer au national.

« En 2013… Avec capitale européenne de la culture. Bizarrement, tout à coup, les Marseillais se sont réveillés et ont découvert les blogs »

A quel moment alors, tu es devenue une référence à Marseille ?

En 2013… Avec capitale européenne de la culture. Bizarrement, tout à coup, les Marseillais se sont réveillés et ont découvert les blogs. A ce moment là, tout s’est inversé, on a commencé à me dire que je ne parlais pas assez de Marseille, alors que j’y étais installée. C’est comme ça que j’ai commencé à vraiment parler des bons plans marseillais. Aujourd’hui, 4 ans plus tard, je pense que j’ai réussi à créer un bon équilibre entre Marseille et le national. J’ai d’ailleurs de plus en plus de lectrices marseillaises, même si ce n’est pas la majorité de ma communauté. Dans l’ordre, je suis suivi à Paris, Lyon et Marseille. Par contre les Marseillaises sont plus actives sur mon Instagram, car elles suivent mon quotidien, où je vais manger, etc. Instagram est un réseau social plus proche de la télé réalité.

, Rencontre avec Amélie, la blogueuse « So Girly » numéro 1 à Marseille, Made in Marseille
Amélie sur Instagram

A ce moment là, tu étais encore blogueuse « par plaisir ». A quel moment tu as fait la bascule entre bloguer par passion et être blogueuse à plein temps ?

Pendant plusieurs années, je bossais à côté, donc en tout je faisais 40 heures de travail par semaine pour le blog en plus de mon temps complet de salariée. J’étais dans une boite où cela ne se passait pas forcément super bien, et j’avais vraiment envie de me lancer en freelance. J’ai donc franchi le pas en mars 2015 en travaillant pour le blog à temps complet, plus d’autres petites missions parallèles pour des boites.

Tu travaillais de chez toi à ce moment là ?

Oui complètement, les premiers mois, je restais cloitrée chez moi. Et quand je sortais, c’était soit pour un rendez-vous pro pour une les boites pour lesquelles je travaillais, soit un rendez-vous pour le blog, soit une soirée entre blogueuses marseillaises. En fait, tu restes dans un espèce d’écosystème qui est très fermé, surtout que la blogosphère marseillaise est assez restreinte. On n’est même pas une vingtaine, c’est beaucoup moins développé que dans les autres villes, donc on reste beaucoup en vase clos. Et puis, c’est très axé « mode », alors que moi j’aime bien parler d’autres sujets, comme le bien être par exemple.

« J’avais l’impression de ne plus être aussi curieuse qu’avant et que je perdais de mon discernement »

Mais au final, ton blog en freelance marchait hyper bien, pourquoi avoir tout arrêté au bout d’un an ?

Je me suis rendue compte au bout de peu de temps qu’il y avait deux soucis. Le premier, clairement en France, c’est hyper mal vu d’être son propre patron et de faire de l’argent avec quelque chose que l’on a créé soit même, et encore plus dans les blogs. On m’a déjà fait la réflexion « oh ça va tu te prends en photo dans la rue, on ne va pas te décerner une médaille ». Je crois que sur le web, les gens ne voient pas tout le boulot qu’il y a derrière… Et puis, vivre en vase clos comme ça, c’est devenu rapidement très étouffant. J’avais l’impression de ne plus être aussi curieuse qu’avant et que je perdais de mon discernement. A partir du moment où ton blog devient ton seul gagne pain, tu perds en indépendance… Je l’avoue volontiers, il y a une période où je prenais tous les contrats qui passaient, parce que ça me faisait du revenu et sans ce revenu, je ne pouvais pas vivre. Il faut être honnête. Au fur et à mesure, une partie de mon lectorat est partie à cause de ça, heureusement je les ai récupérés par la suite (Ndlr : un an après), quand j’ai annoncé que j’arrêtais de faire ça pour l’argent, que je reprenais par passion.

Mais concrètement, comment une blogueuse gagne sa vie ?

En partie avec des bannières pubs sur le site et des articles sponsorisés. Ça m’est déjà arrivé de refuser un article car le sujet ou le texte ne me convenaient pas. Par exemple, j’ai eu des demandes de partenariats pour des cliniques dentaires qui proposaient des prestations de blanchiment de dents, ou pour des cliniques esthétiques en Tunisie avec le tourisme esthétique. Dans ces cas là, je disais non. Je pars du principe que je dois rester maitre de ce que j’écris sur mon blog.

Tu arrivais pendant cette année en freelance à te rémunérer à plein temps ?

Il faut savoir qu’une blogueuse est surtout payée avec de l’échange de visibilité et des produits… Des produits de beauté, des fringues, des voyages, des restos. Au final, je me faisais moins qu’un SMIC, mais l’avantage c’est que je ne payais quasiment rien de ma poche. Le peu que je gagnais me convenait très bien pour vivre.

Du coup, la concurrence est rude… Comment se passent vos relations entre blogueuses à Marseille ?

Clairement, c’est la bagarre, la cour de récré, mais pas qu’à Marseille, partout ! Alors, quand tu as 30 ans et de voir que tu raisonnes comme ça, c’est un peu flippant ! Après, j’ai aussi noué de très fortes amitiés avec certaines. Mes premières amies quand je suis arrivée sur Marseille étaient des blogueuses. Il faut simplement essayer de se voir en dehors de l’univers des blogs pour parler d’autres choses. Aujourd’hui, je suis encore très proche de trois d’entre elles.

Dirais-tu que les temps ont changé depuis 2009 ?

Oui clairement, aujourd’hui une blogueuse n’ouvre plus son blog par passion mais pour en vivre, donc il y a une très forte compétition. Il y a un réel appât du gain local ou national et les blogueuses recherchent la célébrité. Aujourd’hui, avec Instagram en plus, tout le monde est une petite célébrité en puissance ! Et quand comme moi, tu fais partie de ce qu’on appelle les « dinosaures de la blogo », et que tu vois arriver la nouvelle génération, tu te rends compte que ce n’est que l’appât du gain, de qui aura la plus grosse (Ndlr : communauté). Je crois que tout ça m’a fait prendre beaucoup de recul par rapport à mon investissement en freelance, et m’a fait retourner à un blog plus par passion, en ayant un job à côté.

Si tu devais tirer le bilan de ces 8 années d’expérience de blogueuse, que retiendrais-tu ?

Pouvoir montrer à mon petit niveau les bons côtés de la vie à Marseille et lutter contre le Marseille bashing. Ce qui me fait le plus plaisir, c’est que j’ai des lectrices qui sont venues s’installer à Marseille, alors qu’au départ, elles avaient l’image clichée « tu sors avec ton gilet par balle et à partir de 18h tu ne sors plus de chez toi ». J’aime aussi le partage avec les lectrices, ça m’a beaucoup enrichi. Cela m’a permis aussi de me développer personnellement, et de prendre confiance en moi. Et puis, je ne vais pas me cacher, le blog m’a ouvert des portes et m’a fait décroché mes emplois à Marseille. J’ai bossé dans des boites comme Rue du Commerce. Aujourd’hui, je travaille chez Wiko, et ils m’ont choisi par rapport à d’autres candidats beaucoup plus diplômés que moi, grâce à mon blog, parce que je sais gérer une communauté, et finalement si j’en suis capable, je suis aussi suis capable de gérer la leur.

Et pour les inconvénients ?

C’est très chronophage. Un blog c’est 40 heures de travail par semaine. Parce qu’il faut écrire les articles, répondre aux mails, aux commentaires, faire des photos, aller chercher des infos si on fait un article un peu plus technique, et tout ça prend énormément de temps.

Mais au final, tu n’as jamais lâché…

Oui, je crois que c’est hyper addictif. J’ai toujours aimé écrire et partager, et même si c’est chronophage et que ça prend un temps fou, je fais toujours ça avec plaisir et passion. C’est vraiment la partie business qui ne me plait pas du tout. Mais l’écriture est une addiction.

Avec le recul, tu ne regrettes pas d’avoir mis le doigt dans l’engrenage ?

Non pas du tout, je suis même contente d’avoir pris la décision de créer ce blog en 2009. Je suis heureuse et en plus, j’aime me dire que rien n’a été calculé dans tout ça. J’ai tout fait à l’instinct. Et puis, passer son temps à rencontrer les gens qui font Marseille, un peu comme vous à Made in Marseille je suppose, c’est hyper enrichissant.

Tu conseillerais à des jeunes filles de 18 ans de se lancer dans un blog ?

Oui, mais il faut le faire pour les bonnes raisons. Si tu ouvres ton blog parce que tu veux être une célébrité, non. Parce qu’en fait ce rythme va t’user, et c’est là que tu risques de faire un burn out. Etre blogueuse, ce n’est pas juste se prendre en photo et pavaner sur les réseaux sociaux, c’est beaucoup de travail. C’est un vrai job ! Surtout que tu n’as pas forcément le salaire qui suit.

« Etre blogueuse, ce n’est pas juste se prendre en photo et pavaner sur les réseaux sociaux, c’est beaucoup de travail »

Aujourd’hui, tu le sais, c’est la journée de la femme, est ce que tu penses que les métiers du numérique et de la communication permettent de rééquilibrer la parité homme – femme au travail et qu’ils sont une chance ?

Je pense que l’avènement du blog, et du digital, a permis à la femme d’entreprendre, d’avoir des idées et de montrer qu’elle était capable de créer sa boite. C’est important de prouver que nous ne sommes pas simplement des potiches à la solde des hommes qui ont de bonnes idées. Je pense que c’est aussi un moyen de s’émanciper. Après, il ne faut pas se cacher, les hommes sont toujours très présents dans l’univers du numérique et dans certaines entreprises. Chez Wiko en revanche, c’est assez équilibré. La boite est dirigée par des hommes, mais on retrouve de plus en plus de femmes à des postes stratégiques, par exemple, la directrice marketing France est une femme. Et globalement, j’ai l’impression que c’est du 50-50. Dans le domaine digital, clairement, l’égalité salariale et la parité sont de plus en plus respectées. Et je pense, que les blogs ont participé à cette reconnaissance des valeurs de la femme entrepreneuse.

Merci Amélie !

Retrouvez-là sur www.sogirlyblog.com

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